Avis CNCDP 2020-15

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Dispositifs d’intervention du psychologue dans le cadre d’un conflit parental : prudence et impartialité.

Dispositifs d’intervention du psychologue dans le cadre d’un conflit parental : prudence et impartialité

 

Il existe pour le psychologue différentes manières et divers contextes dans lesquels il exerce son activité. Ainsi, il n’y a pas qu’un seul dispositif lui permettant de légitimer son intervention. À ce titre, l’article 2 délimite sa mission centrale, et l’article 3 précise les champs d’application ainsi que le choix, libre et éclairé, des outils sollicités, dont le principal est l’entretien :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. »

La situation pour laquelle la Commission est ici sollicitée implique deux psychologues qui sont intervenues à différents moments de l’histoire familiale. En effet, pour l’une, il s’agit d’un mandat d’expertise psychologique, pour l’autre, de la psychothérapie d’un enfant. Néanmoins, pour chacune des deux, l’entretien a constitué l’outil principal de leurs investigations, comme en attestent les écrits produits.

Quelles que soient les modalités d’exercice, le psychologue est responsable des méthodes qu’il emploie. Il est conscient des limites qu’elles imposent, mais aussi invité à les expliciter aux personnes qui le consultent, comme le rappellent les Principes 3 et 4 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »

En cela, il appartient au psychologue de savoir ce qui relève de ses prérogatives et de ses responsabilités, mais aussi de savoir s’en expliquer. Dans le cas présent, la Commission n’a pas été en mesure de se prononcer sur une possible erreur diagnostique concernant la mère ou sur un manque de discernement clinique de la part de la psychologue qui a reçu la fille du demandeur. Il apparaît cependant que le patronyme de l’enfant a été modifié, en rajoutant le nom de la mère à celui du père. Au vu du livret de famille, cette liberté n’est pas apparue conforme au respect de la personne qui figure au Frontispice du Code :

Frontispice

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Concernant l’approbation des deux parents, à défaut d’avoir pu obtenir le consentement des deux détenteurs de l’autorité parentale, comme le veut l’article 11, la psychologue aurait pu accepter de recevoir le père, sauf si la fille y était expressément opposée :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

De fait, à la lecture des pièces transmises à la Commission, rien ne permet d’infirmer ou de confirmer que la psychologue n’ait pas recherché son assentiment au cours des six années de suivi. Le bénéfice du doute doit pouvoir lui être laissé à cet égard car un consentement implicite n’est pas de même nature qu’un accord formel.

De surcroît, le Principe 2 rappelle le besoin pour le psychologue de savoir s’armer de certaines qualités, comme la prudence et le discernement, à l’épreuve de la réalité clinique qui s’offre à lui :

Principe 2 : Compétence

« […] Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Ces précautions doivent être accompagnées d’une certaine relativité, aussi bien dans les pratiques que dans les méthodes et les interprétations du psychologue, comme le précisent les articles 23 et 25 :

Article 23 : « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques. »

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Dans la situation présente, seules les deux psychologues seraient habilitées à répondre de leurs choix et de leurs conclusions respectifs.

Concernant l’exercice de l’expertise, aucune normativité n’est, à ce jour, prescrite aux experts mandatés dans un cadre judiciaire, médico-légal ou médico-social. La Commission tient cependant à rappeler, par le biais de l’article 12, combien le respect de la dimension psychique doit prévaloir, même dans ce cadre de contrainte :

Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. »

Un rapport d’expertise est un document rédigé par un psychologue et faisant suite à un mandat ordonné par une autorité judiciaire. Si le cadre judiciaire supprime la liberté de pouvoir s’opposer à sa diffusion, il faut néanmoins que la personne concernée soit informée de cela. Les éléments reportés dans le rapport doivent, par ailleurs, ne servir qu’à répondre aux questions pour lesquelles le Juge a souhaité avoir un éclairage précis. Tout ceci est inclus dans l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Pour le demandeur, l’écrit présenté au JAF ne suivrait pas les règles de déontologie. Si la Commission a été sensible à cette observation, elle n’a cependant constaté aucun élément étayant une doléance précise à ce propos.

Tout juste peut-elle préciser que le Code stipule qu’il est de la responsabilité du psychologue d’accepter des missions, notamment d’expertise, qui répondent à ses qualifications, comme l’indiquent les articles 3, déjà mentionné, et 5 :

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

Il est ainsi de la responsabilité du psychologue d’informer au préalable les personnes concernées des modalités de transmission ou de restitution des conclusions de son travail, et d’obtenir leur consentement, comme préconisé à l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Un écrit peut, en effet, avoir des conséquences auprès des personnes mentionnées comme de ses destinataires. La question préalable consiste à cerner les raisons et l’objectif de celui-ci, ce que synthétisent le Principe 6 et l’article 17 déjà cité plus haut :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans la situation présente, les écrits rédigés par la seconde psychologue, dénommés « Attestation » par le demandeur, sont pour les uns intitulés « Bilan d’accompagnement psychologique » et, « Compte-rendu psychologique » pour d’autres. Quoiqu’il en soit, ils répondent bien aux caractéristiques préconisées par l’article 20 :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »

 

Le demandeur a également transmis une « Attestation de témoin » de cette même psychologue. En l’état, il a été difficile pour la Commission de saisir exactement les raisons qui l’ont poussée à produire un tel document.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-16

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Discernement
– Impartialité
– Information sur la démarche professionnelle (Explicitation de la démarche aux usagers /clients ou patients (avant ou/ et en cours d’intervention))
– Respect de la personne
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle

Forme et contenu des écrits du psychologue dans un contexte de séparation parentale : rigueur, prudence et impartialité.

Au préalable, la Commission souhaite préciser qu’il ne lui appartient pas d’établir des arbitrages ou des jugements sur les situations qui lui sont présentées. Toute personne peut saisir la juridiction de son choix à des fins de protection des individus en société, pour faire reconnaître ce qu’elle estime être un préjudice, ou encore une infraction envers elle-même.

Les interventions d’un psychologue sont encadrées par le respect fondamental des droits de la personne, comme le stipule le Principe 1.

Principe 1 : Respect des droits de la personne 

« Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées […] Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu à révéler quoi que ce soit sur lui-même ».

Les personnes qui consultent un psychologue, et leurs proches lorsqu’il s’agit de mineurs, ont notamment le droit d’être informées de manière éclairée du cadre qui leur est proposé, tel que l’énonce l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Dans le cadre d’une rencontre avec un enfant mineur, l’article 11 rappelle, d’une part la nécessité de recueillir l’accord de l’enfant, d’autre part le consentement des détenteurs de l’autorité parentale :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation, ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposées par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » 

Dans la situation présente, le demandeur indique que l’une de ses filles a rencontré une psychologue à l’initiative de leur mère dont il est séparé. Cette dernière aurait vu l’enfant à trois reprises sans n’avoir jamais échangé avec le père, ni de visu ni par téléphone. Selon lui, elle ne souhaiterait pas s’entretenir au téléphone à ce sujet et lui aurait même « raccroché au nez » un jour où il tentait de la joindre. Ce père se dit donc « choqué par le manque flagrant de déontologie » de la psychologue. Même si les entretiens ont été, semble-t-il, à l’initiative de la mère, ce qui est parfaitement licite, la Commission recommande, par souci de rigueur et de discernement, de recevoir les deux détenteurs de l’autorité parentale pour expliquer la spécificité d’une consultation psychologique, comme le précisent l’article 11 déjà cité et le Principe 4 ci-après :

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ».

À la suite de ses rencontres avec la mère et la fillette, la psychologue a fourni un écrit dans lequel elle donne des éléments sur ses observations. Elle y écrit qu’il « existerait une rivalité morbide entre la fillette et sa sœur », que la fillette a, semble-t-il donné des indications « de violences physiques et surtout verbales avec chantage affectif chez le père », et mentionne enfin « l’évocation par la fillette d’avoir assisté à des violences conjugales ». La psychologue conclut par « ainsi la fillette et sa sœur doivent être extraites de toute forme de violence, pression ou chantage affectif de la part du père ». Ces propos sont qualifiés par le demandeur comme étant « à charge contre lui ». Ce dernier exprime son étonnement et souhaite savoir dans quelle mesure les « conclusions accablantes » de l’écrit constitueraient « un manque à la déontologie ».

Le Principe 3 rappelle qu’un psychologue peut utiliser des méthodes et donner des avis sur des situations auxquelles il a à faire, et ce, en toute autonomie :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Le psychologue peut donc rédiger divers documents tels que ceux dénommés « attestations », « comptes rendus », « courriers » ou bien encore « expertises ». Une attestation, par exemple, a pour but de certifier qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Un compte-rendu, rend compte du travail réalisé lors d’un bilan psychologique, par exemple, et a donc pour objectif de relater des éléments du travail psychologique entrepris. Ces documents, sont, en principe, remis en main propre à la personne qui les demande et portent généralement la mention « pour faire valoir ce que de droit ».

Quelle qu’en soit la dénomination, l’écrit d’un psychologue doit répondre aux règles formelles énoncées dans l’article 20 :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »

Dans le cas présent, il apparaît que la psychologue n’a pas contrevenu aux attentes posées par cet article. Ici, apparaissent bien l’identité de la professionnelle, sa qualité de « psychologue clinicienne », l’adresse du lieu où elle exerce, son numéro ADELI, l’ensemble de ces informations encadrant un écrit daté et signé.

Toutefois, le document proposé n’a pas de titre et ne mentionne pas d’objectifs spécifiques. La Commission a estimé qu’il était difficile de savoir avec précision à quelles fins répondait la production d’un tel écrit, contrairement à ce qui est stipulé dans le Principe 6 du Code :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». 

Ici, le contenu de l’écrit soumis à la Commission dépasse le simple cadre de ce qui s’apparenterait à une attestation, car les propos de la psychologue semblent manifestement vouloir faire état de certaines hypothèses et interprétations au sujet de l’enfant et de sa situation, en mettant en avant, notamment, une problématique autour de la relation paternelle. Ces propos faisant suite aux seules observations de la psychologue, et cette dernière n’ayant jamais rencontré le père de la fillette, la Commission considère qu’ils ne sont pas conformes aux recommandations de l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Le psychologue a conscience de la relativité de ses évaluations et interprétations. Il doit être clair et conscient des limites de ses observations, ainsi que du caractère variable et évolutif du comportement humain. Il ne saurait donc émettre des conclusions qui soient à la fois réductrices de la complexité et de la singularité de la personne, et définitives concernant ses possibilités d’évolution, comme le rappelle l’article 25 :

 

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

Par ailleurs, le demandeur conteste le fait que cet écrit soit produit devant la justice et que la psychologue, en le rédigeant, « se pense manifestement au-dessus de ses obligations ». Or le Principe 3, déjà cité, indique qu’un psychologue a toute latitude pour formuler un avis sur une situation qu’il a pu examiner. La psychologue pouvait donc réaliser un tel document à la demande d’un des parents.

Dans les cas de conflits, quand le psychologue reçoit un des membres du couple et qu’il accepte de rédiger un écrit à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction, en prenant en considération la diffusion potentielle de son texte, comme le rappelle l’article 17. Il se prémunit ainsi d’une quelconque accusation de partialité envers l’un des parents :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ».

Enfin, les propos avancés dans l’écrit questionnent le respect du secret professionnel rappelé dans l’article 7 :

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

En dépit de la nécessaire prudence dont doit faire preuve le psychologue lorsqu’il émet un avis, il convient de rappeler que ce dernier ne rapporte, dans ses écrits, des éléments d’ordre psychologique concernant son patient que si nécessaire.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-19

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Examen psychologique

Questions déontologiques associées :

– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Compétence professionnelle (Élaboration des données, mise en perspective théorique, Reconnaissance des limites de sa compétence, orientation vers d’autres professionnels)
– Consentement éclairé
– Confraternité entre psychologues (Coordination professionnelle entre psychologues)
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Évaluation (Droit à contre-évaluation, Relativité des évaluations)
– Impartialité
– Information sur la démarche professionnelle (Explicitation de la démarche aux usagers /clients ou patients (avant ou/ et en cours d’intervention))
– Mission (Distinction des missions, Compatibilité des missions)
– Respect du but assigné

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Forme et contenu des écrits du psychologue concernant une évaluation ayant recours à des outils psychométriques.
  • Prudence, rigueur et impartialité dans le cadre d’une procédure judiciaire impliquant un mineur.
  • Forme et contenu des écrits du psychologue concernant une évaluation ayant recours à des outils psychométriques.

Quel que soit l’écrit du psychologue, il comporte un minimum d’éléments formels. Le document transmis à la Commission comporte bien le nom et le prénom de la psychologue et ses coordonnées professionnelles, mais sans son numéro ADELI ni sa signature. Même s’il est divisé en plusieurs parties structurées, par des intertitres comme la « Demande de Monsieur », le « Cahier des charges », il ne comporte pas d’intitulé général, ni d’objectif précis, ce qui va à l’encontre de l’article 20 du code de déontologie :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique.»

Ainsi, sous un semblant de structure claire, la rigueur et l’absence de but assigné explicite font défaut. Il est difficile de saisir le type d’évaluation dont il est question ici : le père demanderait un « bilan cognitif », une « évaluation de l’enfant qui souffre d’un trouble autistique », ce à quoi la psychologue répond qu’elle sera « généraliste », comportant non pas une évaluation cognitive au sens strict, mais une investigation sur les « performances intellectuelles » et les « potentialités affectives » de l’enfant. Enfin, elle conclut par des « conseils de guidance parentale ».

Or, les compétences du psychologue découlent des connaissances théoriques et méthodologiques acquises, régulièrement réactualisées, comme défini par le Principe 2, duquel découle l’Article 5 :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence :

  • de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par la loi relative à l’usage professionnel du titre de psychologue;
  • de la réactualisation régulière de ses connaissances;
  • de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité.».

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

La responsabilité professionnelle est affirmée dans le Principe 3 du Code qui indique que, dans le cadre de sa compétence, le psychologue décide des outils et des méthodes qu’il met en œuvre, sans négliger leur mise en perspective théorique comme précisé dans l’Article 23 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

«  Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule ».

Article 23 : « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques. »

Le psychologue explicite également son intervention et recueille l’assentiment de son patient sur ces modalités en accord avec l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions ».

Dans la situation présente, la psychologue paraît avoir eu quelques difficultés à délimiter les objectifs de son évaluation et à choisir ses outils. Ses « conclusions/préconisations » restent limitées et ne semblent pas explorer les ressources de l’enfant. L’écrit témoigne du choix inapproprié des outils retenus pour conduire le bilan psychologique, de manière de plus en plus flagrante au fil de sa lecture. L’adolescent aurait participé à trois séances de passation de tests, d’une heure chacune, et n’aurait répondu qu’à un seul item dans chaque subtest, témoignant ainsi d’une difficulté majeure. La psychologue aurait pu, même dans le cours du bilan, orienter le père et cet adolescent vers un collègue à même de mieux faire face à ce type de pathologies, comme préconisé par l’article 6 :

Article 6 : « Quand des demandes ne relèvent pas de sa compétence, il oriente les personnes vers les professionnels susceptibles de répondre aux questions ou aux situations qui lui ont été soumises. »

La Commission a estimé que les conclusions de l’écrit ne sont ni abouties, ni complètes. Elles ne répondent que partiellement à la demande initiale, en contradiction à l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

Quant à l’«Additif au CR», produit à la demande du père, s’est posée la question du but assigné à cet écrit, en référence au Principe 6, la transmission au père ayant exposé le garçon et impliqué la psychologue dans le conflit parental :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

  • Prudence, rigueur et impartialité dans le cadre d’une procédure judiciaire impliquant un mineur.

Dans une situation de séparation, il est paraît bienvenu de rencontrer les deux parents de l’enfant. Une telle initiative vise non seulement à mieux cerner la dynamique relationnelle, mais aussi à promouvoir un souci d’impartialité et d’équité, au sens du Principe 2 déjà cité, préservant ainsi le psychologue d’une éventuelle instrumentalisation dans le conflit familial. Quand l’évaluation concerne un mineur, elle nécessite le consentement ou tout au moins l’assentiment aussi bien du mineur que de ses parents, comme le précise l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent ou le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement, des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux ».

Or, dans la situation présente, la psychologue n’aurait pas tenté de contacter la mère. Ceci ne condamne probablement pas la démarche de la psychologue mais cette dernière pouvait certainement mieux apprécier la situation en profitant aussi de ce que pouvait lui apporter une rencontre avec l’autre adulte détenteur de l’autorité parentale.

De plus, quand le psychologue reçoit l’un des parents en ayant connaissance d’un contexte conflictuel et qu’il accepte de rédiger un document à sa seule demande, il veille à observer une certaine prudence dans le contenu de sa rédaction et prend en considération la possible diffusion de son texte à des tiers, comme le rappelle l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci ».

Par ailleurs, la Commission estime que la psychologue, informée de la situation d’accompagnement scolaire du jeune garçon au sein d’une ULIS et de sa prise en charge par un SESSAD, aurait dû se concerter avec les psychologues de ces dispositifs, afin de rester dans la pertinence de leurs interventions, comme l’article 31 le préconise :

Article 31 : « Lorsque plusieurs psychologues interviennent dans un même lieu professionnel ou auprès de la même personne, ils se concertent pour préciser le cadre et l’articulation de leurs interventions. »

Enfin, la psychologue avait également la possibilité de mentionner la possibilité d’une contre évaluation, comme proposé à l’article 14 :

Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation. »

En conclusion, la Commission rappelle l’importance pour le psychologue, en préliminaire à son intervention, de se concerter avec son ou ses consultant(s), pour en définir le but assigné. Elle persiste à recommander rigueur, prudence et impartialité dans l’exercice de la psychologie.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-20

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Rapport d’expertise judiciaire

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Discernement
– Information sur la démarche professionnelle (Explicitation de la démarche aux usagers /clients ou patients (avant ou/ et en cours d’intervention))
– Mission (Compatibilité des missions)
– Respect de la personne
– Secret professionnel (Obligation du respect du secret professionnel)
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Aspects déontologiques de l’expertise psychologique dans le contexte d’une séparation.

 

Aspects déontologiques de l’expertise psychologique dans le contexte d’une séparation.

Le cadre d’exercice d’une mission confiée à un psychologue se définit par les fonctions et compétences de ce dernier, comme le stipule l’article 5 :

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

Dans la situation présente, il est inscrit, sur la page de garde du rapport d’expertise psychologique, le fait que le psychologue a été « commis expert » par l’autorité d’un JAF. L’expertise est une intervention dans un cadre de contrainte qui peut être confiée au psychologue, comme le stipule l’article 3 :

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. »

D’une manière générale, le psychologue intervient auprès de personnes pour lesquelles il doit être en mesure de garantir, sans aucune réserve, le respect de leur dimension psychique, comme y invite l’article 2 :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Dans le cas plus précis où le psychologue intervient dans un cadre de contrainte, il tend à répondre aux questions qui lui sont posées afin d’éclairer les décisions du Juge. Là encore, le psychologue doit s’assurer de respecter chaque personne dans sa dimension psychique comme le préconise l’article 12 du Code :

Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte […], le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. »

Au-delà de la pluralité des méthodes dont il a la responsabilité, mais aussi de l’obligation de garantir le respect de la dimension psychique des personnes rencontrées, le psychologue doit pouvoir, même dans ce cadre, répondre de la nécessité de respect du but assigné comme le veut le Principe 6 :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans le cas présenté, la finalité de la mission attribuée au psychologue est clairement stipulée sur la même page de garde en les termes suivants : « procéder aux expertises psychologiques des enfants » et « à un entretien » avec les parents avec mention de l’identité de chacun.

L’exercice d’entretiens d’expertise implique néanmoins que les personnes rencontrées les acceptent, en ayant reçu toutes les informations relatives à la démarche, notamment sur son déroulé, ses finalités et la production finale d’un écrit destiné au magistrat, comme le veut l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

L’écrit soumis à la Commission fait, en effet, état du travail du psychologue mandaté et comprend la restitution de ses expertises et des entretiens. La Commission relève toutefois l’absence d’objectifs clairement énoncés. En cela, elle regrette de ne pas avoir trouvé les questions ayant amené le JAF à missionner le psychologue ce qui, là encore, ne constitue pas une règle intangible.

Une contextualisation plus précise de la démarche aurait certainement permis de mieux apprécier dans quelle mesure les éléments restitués par le psychologue dans ce rapport étaient nécessaires ou pas. Cela aurait facilité l’appréciation du respect du secret professionnel, au sens de l’article 7 :

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

C’est en effet sur ce point que le positionnement du psychologue est discuté par la demandeuse qui qualifie son implication de partiale dans le processus d’évaluation ce qui, selon elle, transparait dans l’écrit. La Commission s’est interrogée sur le degré de neutralité d’un psychologue dans un contexte de conflits familiaux. Selon le Principe 2, l’indépendance professionnelle implique de faire preuve en la matière de prudence et d’impartialité. Le psychologue engage sa responsabilité dans les préconisations adressées au magistrat :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Si les faits attestés par la demandeuse, qu’elle répertorie dans une liste non-exhaustive, sont avérés, alors le contenu du rapport d’expertise psychologique apparaît discutable. La Commission se réfère aux recommandations de l’article 17 qui préconise la plus grande prudence concernant la transmission à un tiers d’éléments psychologiques qui ne concerneraient pas directement le but assigné à l’intervention.

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Néanmoins, la Commission s’est étonnée de l’absence d’éléments d’expertise psychologique concernant l’aîné des enfants, aucune mention n’a été apposée permettant de comprendre cette inégalité de traitement.

Au cours des entretiens réalisés avec les deux autres enfants rencontrés, le psychologue a eu recours à la passation d’épreuves habituellement utilisées avec des enfants de cet âge, comme l’indique l’article 24 :

Article 24 : « Les techniques utilisées par le psychologue à des fins d’évaluation, de diagnostic, d’orientation ou de sélection, doivent avoir été scientifiquement validées et sont actualisées. »

De l’ensemble des entretiens, c’est-à-dire autant avec les enfants que les parents, le psychologue a tiré des observations qui devaient lui permettre de répondre aux questions du JAF. Le psychologue a alors été amené à faire des préconisations, et non à poser un diagnostic.

Pour autant, la Commission rappelle combien toute observation doit conserver une certaine relativité, au sens de l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Pour se trouver en adéquation avec le Principe 2 et l’article 17, cités plus haut, le psychologue commis en tant qu’expert s’efforce d’être, autant que cela est possible, dans une démarche prudente, notamment quant aux conclusions auxquelles il peut arriver. La restitution d’informations ne peut être considérée comme valide qu’à la condition d’être fidèle aux propos qui ont été tenus par les différentes personnes rencontrées. Là encore, aucun élément ne permet une position critique dans la situation apportée par la demandeuse sur cette question.

La Commission rappelle combien l’exercice de l’expertise doit pouvoir se trouver en conformité avec le Principe 1, relatif au respect de la dimension psychique d’une personne :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-23

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Consentement éclairé
– Discernement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Évaluation (Évaluation de personnes que le psychologue n’a pas rencontrées)
– Impartialité
– Secret professionnel (Obligation du respect du secret professionnel)

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire impliquant un mineur et but assigné à ses interventions.

 

Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire impliquant un mineur et but assigné à ses interventions.

La Commission a examiné l’écrit de la psychologue. Sur le plan formel, hormis l’objet de l’écrit, les règles précisées à l’article 20 du code de déontologie sont respectées :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

Même si l’écrit n’est pas intitulé, il peut, au début, être assimilé à une attestation dans la mesure où la psychologue dit « attester » avoir reçu l’enfant « dans le cadre d’un suivi thérapeutique » et pouvoir dater cette initiative. Mais la Commission a pu constater qu’il prenait par la suite l’allure d’un « rapport » sur l’état « affectif » de l’enfant ainsi que sur le type de relation entretenue avec un père qui « lui a menti ». Enfin, malgré l’absence de mention d’un destinataire, son contenu suggère qu’il s’agisse d’un magistrat.

En ce qui concerne le but assigné à son intervention, quels que soient le domaine et les modalités d’exercice du psychologue, ce dernier s’assure d’en définir préalablement les contours. Cela permet de définir l’axe central et le type de travail proposé, permettant ainsi d’en expliciter objectifs, modalités et limites à la(aux) personne(s) concernée(s) afin d’accueillir de leur part un consentement libre et éclairé, comme précisé par l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Or, dans la situation présente, le dispositif psychothérapeutique a été institué en tant que but assigné dès le départ ce qui n’excluait pas, en fonction du contexte, de le redéfinir ultérieurement. Néanmoins, il est curieux que ledit écrit porte sur une situation qui s’est produite plusieurs mois auparavant et non pas dans la période situation actuelle. Son utilité dans cette temporalité est d’autant plus douteuse qu’il est produit cinq jours après l’audition du garçon par la Cour d’Appel.

Dans ce sens, comme stipulé à l’article 19, il interroge le maintien de la confidentialité inhérente au dispositif thérapeutique. La levée de cette dernière ne peut s’envisager que dans la situation extrême où une personne est en péril psychique ou physique, contexte qu’un psychologue évalue avec discernement, tout en respectant le secret professionnel comme précisé par l’article 7 :

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. »

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

Dans le cas du document produit par la psychologue, cette dernière précise qu’elle a été « alertée » par la « situation » de « violence physique et verbale » de la part du père, et verbalisée quelques mois auparavant par son jeune patient. Elle écrit avoir alors « convoqué » le père  pour faire un « rappel à la loi ». Or, cela se serait produit il y a plusieurs mois, sans mention que ce contexte perdure actuellement.

Si, dans le passé, elle avait estimé qu’il existait un réel danger pour le mineur, elle aurait pu décider d’alerter les autorités compétentes. Or, selon son écrit, ce n’est pas ce qu’elle a fait.

Par ailleurs, lorsque le psychologue reçoit les dires d’un consultant ou les difficultés relationnelles que celui-ci exprime vis-à-vis de tiers, il ne peut faire des interprétations ou rendre compte de son évaluation que sur des personnes qu’il a lui-même entendues, comme stipulé à l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Outre son souci effectif quant à l’intérêt du garçon, l’écrit de la psychologue suppose qu’il « se sent manipulé par son père » et « a besoin d’un cadre sécurisant ». Elle suggère en filigrane que ce n’est pas auprès de son père qu’il « peut amorcer son processus d’adolescence ». Il aurait été plus prudent d’utiliser, à tout le moins, un conditionnel.

Pour finir, la Commission rappelle que la responsabilité professionnelle du psychologue est engagée quant au respect de la personne dans sa dimension psychique. Ceci figure dès le Frontispice même du Code, invitant à faire preuve d’une grande prudence, mesure et impartialité dans toute intervention, comme rappelé par le Principe 2, et en particulier dans le cas de conflits parentaux qui impliquent des mineurs et impactent leur psychisme en devenir :

Frontispice : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence :

  • […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-24

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie d’un adolescent

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Respect de la personne
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Déontologie du suivi d’un enfant mineur dans le contexte d’un divorce.

Déontologie du suivi d’un enfant mineur dans le contexte d’un divorce.

Accueillir la demande d’un enfant mineur de la part du psychologue peut impliquer diverses personnes, et principalement ses parents. Si le psychologue a la possibilité de recevoir un enfant mineur qui en fait la demande, il doit tenir compte de la spécificité de son patient, celle de ne pas pouvoir jouir des mêmes droits que les adultes, comme le stipule l’article 10 :

Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. »

Si la fille aînée du demandeur semble avoir pris cette orientation, le contexte de divorce de ses parents a pu potentiellement interférer. Dans un tel contexte, le psychologue s’efforce de respecter la dimension psychique de chacune des personnes impliquées, ce que rappellent les articles 2 et 12 :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter         la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes           psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les        capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. »

Dans la situation présente, rien ne semble indiquer que la psychologue qui a reçu la fille aînée du demandeur n’ait contrevenu à ces dispositions. Pour autant, le demandeur pointe le fait de ne jamais avoir pu réellement discuter avec cette professionnelle, au contraire de son ex-épouse qui aurait été reçue avec sa fille. L’article 11 indique la nécessité de pouvoir recueillir le consentement et l’assentiment du mineur, ainsi que des personnes détentrices de l’autorité parentale:

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Or, selon les dires du demandeur, la psychologue consultée n’aurait pas donné suite à ses sollicitations de rencontre, afin que celui-ci puisse être écouté en lien avec la demande de sa fille.

Si tel est le cas, la Commission peut donc déplorer que la psychologue n’ait pas recherché le consentement des deux parents. Cela peut être interrogé car la psychologue avait sans doute connaissance du contexte familial et des faits de violence de la jeune fille sur son père et sa compagne.

Ainsi, la psychologue pouvait recevoir l’adolescente en entretien pour, par exemple, préserver la confidentialité des séances avec elle, sans obligation d’avoir à recueillir au préalable la parole du demandeur et se faire un avis sur les enjeux de la problématique familiale. Le psychologue est responsable du choix de ses modes d’intervention et de ses analyses comme le rappellent le Principe 3 et l’article 13 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer ».

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Cependant, lorsque le psychologue prend contact avec un parent, il ne peut s’autoriser aucun positionnement dépréciatif à son égard, comme l’a suggéré le demandeur dans la situation présente. La Commission ne peut que rappeler la nécessité absolue pour chaque personne d’être respectée dans sa dimension psychique comme inscrit dans le Préambule du Code :

Préambule : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-01

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Professionnel Non Pyschologue (Avocat)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Impartialité
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Respect du but assigné

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Écrits du psychologue dans un contexte de séparation parentale

Écrits du psychologue dans un contexte de séparation parentale

Au préalable, la Commission tient à rappeler que les psychologues ne sont pas médecins. En cela, leur exercice n’est régi que par le seul code de déontologie des psychologues, donc en rien celui des médecins.

L’exercice professionnel du psychologue peut l’amener à produire des écrits relatifs à des personnes ou bien des situations auxquelles il n’a pas eu un accès direct. Ceci est confirmé par l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Ces interventions peuvent conduire le psychologue à rédiger des écrits sa responsabilité au sens du Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

L’écrit doit alors être rédigé de manière réfléchie, à la mesure de ce que le Code préconise en termes de rigueur et d’impartialité, comme l’indique l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Dans le cadre d’une séparation ou d’un divorce, lorsqu’un psychologue reçoit l’un des membres du couple et accepte de rédiger un document, il doit veiller à conserver la plus grande prudence, comme le veut le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Par ailleurs, finaliser un document écrit requiert d’observer quelques règles formelles telles que celles réunies dans l’article 20 du Code :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

La pièce jointe au dossier adressé à la Commission ne fait aucunement défaut quant aux mentions relatives à l’identité professionnelle (nom, prénom, numéro ADELI, fonction, coordonnées et signature) de la psychologue qui a accepté de la rédiger. En revanche, se pose plus volontiers la question de sa nature. Il s’agit, en effet, moins de savoir si des règles formelles ont été oubliées que de savoir si la psychologue a outrepassé sa fonction au travers dudit document.

Intitulé « Attestation », il précise qu’il a été établi à la demande de la patiente et n’indique aucun objet clairement défini. Se succèdent ensuite, sur deux pages, des éléments relatifs à la psychothérapie de cette patiente, des observations concernant le comportement supposé de son ex-compagnon et enfin des hypothèses mettant en lien les éléments cités et la situation des enfants du couple. La Commission s’est interrogée sur le respect du Principe 1 relatif au respect des droits des personnes qui incite les psychologues à préserver la vie privée et l’intimité des personnes qui le consultent en garantissant le respect du secret professionnel.

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue [… ] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

La Commission rappelle ici qu’une « attestation » a pour objectif de mentionner qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Elle est toujours remise en main propre à la personne qui la demande et porte généralement la mention : « pour faire valoir ce que de droit ». Un « compte rendu » relate pour sa part une intervention, par exemple une consultation psychologique, un bilan ou aussi une expertise. Il renseigne les résultats d’une investigation et peut contenir des hypothèses ou des diagnostics psychologiques voire même des préconisations.

En l’état, la psychologue était habilitée à rédiger, à la demande de sa patiente, un document intitulé « Attestation » mais aurait dû s’en tenir à ce qui est habituellement attendu pour ce type de production, au contraire de ce qu’elle a proposé. Ceci est en adéquation avec le Principe 6 :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

En cela, si son initiative ne peut être condamnée au regard de la déontologie des psychologues, elle mérite au moins d’être discutée quant au risque de confusion entre différents types d’interventions et d’écrits.

La Commission réitère l’importance de respecter la rigueur et la prudence face à la demande d’un patient, autre manière d’assurer à chaque personne le respect de son intimité comme le Frontispice du même Code le laisse entendre :

Frontispice

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-03

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Tiers)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Confraternité entre psychologues (Coordination professionnelle entre psychologues)
– Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle du psychologue)
– Impartialité

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Interventions du psychologue dans un contexte judiciaire entre parents.

Interventions du psychologue dans un contexte judiciaire entre parents

Recevoir en consultation psychologique un enfant, à la demande d’un seul de ses parents, implique de définir clairement l’objectif et les limites de l’intervention, en se fondant sur l’article 9 du code de déontologie des psychologues :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Concernant l’accueil des mineurs, le Code préconise de rechercher l’accord des détenteurs de l’autorité parentale avant même d’engager une évaluation ou une psychothérapie, en s’appuyant sur les articles 10 et 11. Lorsque les parents sont séparés ou divorcés, cette recommandation est particulièrement importante afin de prévenir une possible instrumentalisation du psychologue dans le conflit parental.

Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. »

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Dans la situation présente, il semble que les parents ont, chacun de leur côté, consulté des psychologues sans que ces recommandations aient été prises en compte. La demandeuse signale par contre que la psychologue qui reçoit l’aîné des garçons aurait cherché à joindre sa « consœur », ce que l’article 31 peut autoriser, mais sans y parvenir :

Article 31 : « Lorsque plusieurs psychologues interviennent dans un même lieu professionnel ou auprès de la même personne, ils se concertent pour préciser le cadre et l’articulation de leurs interventions. »

Or, il est aisé de saisir, à la lecture des documents fournis, le caractère particulièrement conflictuel de la situation. Une procédure auprès du Juge aux Affaires Familiales (JAF) est évoquée, ainsi que différentes plaintes devant l’autorité judiciaire. Dans ce contexte, l’attestation fournie à la mère, qui est établie « pour faire valoir ce que de droit », indique que la psychologue semblait consciente de l’usage qui pouvait être fait de son écrit, au sens du Principe 6 :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

La Commission a donc examiné le document et tout d’abord constaté, que, du point de vue formel, il respecte les attendus contenus dans l’article 20 :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature.»

Par contre, elle s’est interrogée sur l’adéquation entre son intitulé et son contenu. Une « attestation » suppose de consigner qu’une consultation a bien eu lieu et précise éventuellement les suites envisagées. Or, l’écrit examiné contient des éléments d’observation pendant cette consultation ; des informations portant sur la situation familiale, basées uniquement sur les dires de la mère et des enfants ; des appréciations sur l’attitude du père, jamais rencontré, et aussi des préconisations relatives aux droits des parents. Ces éléments juxtaposés, constituant un « témoignage » lisible en faveur de cette mère, ont semblé manquer du recul et de la prudence attendus par le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« …Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

D’autre part, si le psychologue peut donner un avis sur une situation qui lui est décrite, cela ne peut être assimilé à une évaluation circonstanciée et approfondie, comme le précise l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner »

En ce sens, cette « attestation » présente un tableau figé et sans perspectives de changement, sans suivre l’avertissement de l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

Dans le cas présent, un document intitulé « attestation » aurait pu venir compléter les certificats médicaux d’ITT délivrés par l’hôpital et le témoignage reçu par le commissariat dont il est fait mention dans le texte.

Enfin, affirmer que des enfants « ne sont pas en sécurité » chez un parent et qu’ils « souffrent de maltraitance psychologique et affective », doit conduire le psychologue à s’interroger sur l’opportunité de prendre conseil pour décider la levée du secret professionnel, en rédigeant dans ce cas un « signalement », comme indiqué par l’article 19 :

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-26

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Responsabilité professionnelle
– Respect du but assigné
– Respect de la personne
– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Cadre d’intervention et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale
  • Préalables déontologiques à la rédaction d’un écrit
  • Responsabilité du psychologue et procédures judiciaires: discernement et impartialité
  1. Cadre d’intervention et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale

Le psychologue a toute liberté pour concevoir, en fonction de ses compétences, le cadre de son intervention. Le dispositif instituant une relation entre lui et la personne accueillie se fonde sur plusieurs Principes et articles du Code. Assumer sa responsabilité professionnelle implique, qu’il a le choix des méthodes et outils qu’il va utiliser dans son espace d’intervention, ceci en conformité avec le Principe 3 du Code :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer ».

Dans la situation présente, le demandeur invoque des « manquements déontologiques » de la part de la psychologue qui a reçu sa fille. Il estime qu’elle a manqué à ses devoirs en lui refusant toute entrevue. La Commission commencera par rappeler l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation, ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposées par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Cet article précise la nécessité pour le psychologue de recueillir le consentement de(s) enfant(s), mais également celui des détenteurs de l’autorité parentale. Cette recommandation, inscrite dès le premier Principe du code de déontologie, se double dans son article 9 de la nécessité d’informer les personnes qui consultent un psychologue des objectifs, modalités et limites de l’intervention :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées… Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu à révéler quoi que ce soit sur lui-même »

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Dans la situation présente, le père n’a semble-t-il, ni été tenu informé de la démarche de la mère, ni même été contacté par la psychologue. Il aurait été souhaitable qu’elle le reçoive dès le début de la consultation pour comprendre son positionnement. Elle indique dans son écrit recevoir l’aînée des deux filles « en soutien psychothérapeutique » depuis plus d’une année. Outre l’imprécision de la formule, la Commission considère qu’il s’agit là d’un travail « au long cours » qui va bien au-delà d’une simple consultation, ce qui circonscrit le but auquel s’est dès lors assignée la psychologue.

La Commission s’est également interrogée sur la manière dont la psychologue a pris en compte le contexte de sa jeune patiente soumise à de nombreuses investigations et expertises avant de conduire son intervention et rédiger son attestation. Les Principes 6 et 4 du Code auraient pu accompagner sa réflexion :

            Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

            Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ».

Enfin, le demandeur indique avoir été écarté de toute rencontre avec la psychologue, sans qu’aucune communication ne soit semble-t-il possible, malgré ses différents courriers et prises de contact. La Commission a pu se demander dans quelle mesure les non réponses de cette psychologue avait pour but de préserver l’espace thérapeutique de la jeune fille, plutôt que de montrer un parti pris en faveur de la mère.

  1. Préalables déontologiques à la rédaction d’un écrit

Le psychologue qui est sollicité pour rédiger un document par un patient ou un parent de patient mineur manifeste sa compétence et son respect du Code de déontologie en faisant preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité tout en respectant le secret professionnel comme l’indiquent le Principe 2 et l’article 7 :

Principe 2 : Compétence

«[..]Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

A l’examen des pièces jointes, il est peu probable que la psychologue ayant reçu la mère et la fille aînée n’ait pas été informée des procédures multiples qui se déployaient entre les parents. Le contexte particulièrement conflictuel aurait dû l’inciter à plus de distance quand elle atteste de la bienveillance de la mère à l’égard de son ex-conjoint. En de telles circonstances, l’analyse de la demande qui lui a été adressée devait s’inscrire dans le respect des droits fondamentaux des personnes avec toute la rigueur et la probité qui s’imposent. Le Principe 1 du Code est à cet égard explicite :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

C’est la raison pour laquelle, avant même de concevoir un écrit et d’en rédiger le contenu, il est régulièrement conseillé au psychologue, comme le pose le Principe 6 cité plus haut, de bien circonscrire le but assigné à son intervention écrite. En prenant soin de préciser son destinataire et de nommer le type d’écrit dans l’entête (un certificat, un compte rendu, une évaluation ou toute autre production requise) le psychologue prend en considération l’exploitation possible par des tiers, qui plus est dans un contexte de procédure judiciaire en cours.

  1. Responsabilité du psychologue et procédures judiciaires: discernement et impartialité

L’examen du document soumis à la Commission respecte l’essentiel des règles formelles de présentation prévues en la matière par l’article 20 du Code, sans toutefois préciser sa nature ou son objet, car il est rédigé sous la forme d’un courrier.

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. […]»

Son contenu, par contre, s’apparente fortement à un « signalement direct » pour maltraitance. Il est  adressé nominalement à une juge du « Tribunal pour enfants » et non à la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) comme il est d’usage. La nécessité de produire cet écrit sous la forme d’un signalement  au titre de la protection des mineurs, aurait effectivement pu s’imposer à la psychologue au vu des éléments de discours recueillis dans le cadre des rendez-vous, comme le prévoit l’article 19, si toutefois un placement n’avait pas encore été prononcé par le JE.

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune.) Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. ».

Le demandeur ne peut donc, à ce titre, contester l’envoi d’un tel courrier qui engage par ailleurs la responsabilité voire le discernement de la psychologue. Son contenu rapporte des propos tenus par l’aînée des deux mineures et décrit ses propres observations et constats tout au long de son intervention. La Commission a, néanmoins, regretté que les paroles de l’enfant n’aient pas été citées entre guillemets.

Tout en considérant l’article 13 du Code, qui aurait pu amener cette psychologue à reconsidérer le contenu et l’urgence de son « signalement », elle aurait dû prendre appui sur le Principe 3.

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. »

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. […] Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Enfin, le demandeur est fondé à rapprocher les observations consignées, voire à en solliciter une contre-expertise comme l’article 14 l’évoque :

Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-20

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Code de déontologie
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle du psychologue)
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Impartialité
– Mission (Distinction des missions)
– Respect du but assigné

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Modalités d’intervention du psychologue auprès d’un enfant mineur dans un contexte de séparation parentale : autorisation, consentement et but assigné
  • Forme et contenu des écrits du psychologue

1 – Modalités d’intervention du psychologue auprès d’un enfant mineur dans un contexte de séparation parentale : autorisation, consentement et but assigné

Les interventions d’un psychologue auprès d’enfants mineurs sont encadrées par plusieurs principes et articles du code de déontologie. Ainsi, l’article 11 rappelle d’une part la nécessité de recueillir l’accord de l’enfant, mais également le consentement des détenteurs de l’autorité parentale.

Article 11 : « L’évaluation, l’observation, ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposées par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Cette recommandation, fondamentale, inscrite dès le premier Principe du code de déontologie, se précise dans l’article 9 :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées…Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu à révéler quoi que ce soit sur lui-même »

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Dans la situation présente, la mère n’a pas été tenue informée de la démarche du père dont le fils souhaitait, selon les dires de la professionnelle, « changer de psychologue ». Par ailleurs, cette dernière ne l’a pas rencontrée malgré sa demande. Elle n’a pas non plus, selon la mère, cessé les entretiens avec l’enfant alors qu’elle l’avait explicitement exigé.

Le psychologue doit veiller à instaurer une relation respectueuse avec les enfants reçus en consultation. Ce respect doit concerner à la fois la vie psychique et la reconnaissance des besoins de l’enfant, mais aussi la manière dont est considéré chacun des parents. Ceci est rappelé dès le Préambule du Code ainsi que dans le Principe 1 déjà cité.

Préambule :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues ».

La non-observance de ces principes fait courir au psychologue le risque d’être pris dans des conflits parentaux et de n’être pas en mesure de savoir en protéger les enfants qu’il reçoit. Dans une situation de séparation familiale en particulier, le psychologue doit être des plus vigilants quant aux demandes adressées par un seul des parents. L’analyse du contexte relationnel dans lequel se trouvent les enfants est indispensable et suppose prudence et discernement comme indiqué dans le Principe 2 du Code. Le psychologue doit être également attentif à la façon dont les enfants perçoivent ses interventions, surtout quand la relation entre les parents est conflictuelle :

Principe 2 : Compétence

« […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ».

Les éléments portés à la connaissance de la Commission invitent à penser que la psychologue a pris position en faveur du père dans le conflit concernant les deux parents. Elle a, de ce fait, engagé sa responsabilité et grevé sa crédibilité sans prendre appui sur le Principe 3 du Code :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. … Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Il aurait été souhaitable que cette professionnelle s’entretienne directement avec la demandeuse avant de prendre position, dans l’intérêt des enfants et en accordant un traitement équitable aux deux parents. De même, la psychologue aurait pu prendre contact avec les autres professionnels prenant ou ayant pris en charge l’enfant, de façon à préciser le cadre de son intervention comme l’y invite l’article 31 du Code :

Article 31 : « Lorsque plusieurs psychologues interviennent dans un même lieu professionnel ou auprès de la même personne, ils se concertent pour préciser le cadre et l’articulation de leurs interventions ».

Par ailleurs, le psychologue est tenu de respecter un principe de cohérence entre le dispositif mis en place et le motif initial de sa mission. Dans les documents qui lui ont été adressés, la Commission a eu des difficultés à retrouver le but initial de l’intervention : était-ce de travailler sur les difficultés rencontrées par les enfants avec leur mère, de répondre au souhait de l’enfant de « changer de psychologue », ou encore de « l’aider dans son quotidien » ? Le Principe 6 du Code précise que le psychologue ne saurait détourner un cadre d’intervention à d’autres fins que celles dans lesquelles il s’était engagé, sans avoir précisé les nouvelles modalités auprès de son patient et auprès des parents :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

La mère s’est vue écartée de toute rencontre avec la psychologue, sans semble-t-il aucune communication, malgré ses différents courriers et prises de contact. Au regard du Principe 4 du code de déontologie, il aurait été souhaitable et certainement possible de la recevoir pour lui expliquer la spécificité du cadre de la prise en charge en cours :

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ».

 

  1. Forme et contenu des écrits du psychologue

Un écrit produit par un psychologue n’est pas qu’un simple document rédigé par un professionnel, il est aussi porteur de potentiels effets et conséquences auprès des personnes mentionnées et aussi de ses destinataires. Les mots ont un poids et, en ce sens, un écrit faisant trace, la question se pose toujours du but et des destinataires de celui-ci, ce que synthétise le Principe 6 déjà énoncé plus haut. 

Dans la situation présente, il est à remarquer que le document proposé ne mentionne pas d’objectifs spécifiques, si ce n’est à travers son titre « attestation compte-rendu du suivi psychologique ». La Commission a estimé qu’il était difficile de savoir avec précision à quelles fins répondait la production d’un tel écrit.

Toutefois, il est à relever que cette professionnelle n’a en rien contrevenu aux attentes posées par l’article 20 auquel tout psychologue doit se soumettre au moment de la rédaction d’un écrit :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »

Ici, apparaissent bien l’identité de la professionnelle, les deux compétences « psychologue clinicienne et de psychothérapeute », l’adresse du lieu où elle exerce, son numéro ADELI, l’ensemble de ces informations encadrant un écrit daté et signé.

Le document pour lequel la Commission doit apporter un avis se présente donc sous la forme d’un écrit rédigé à la demande du père des trois enfants, par une psychologue ayant reçu ceux-ci au cours de quatre séances de travail. C’est en ce sens que la demandeuse exprime son étonnement à la lecture de son contenu et pose la question de savoir si la professionnelle avait le droit de produire un tel document sans que la justice ne l’ait requis. Le Principe 3 cité ci-dessus répond positivement à cette question :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« […] Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule… »

L’ambiguïté de la démarche réside dans l’intitulé, donc la nature d’une telle production, et non dans le caractère licite ou pas. En effet, une attestation a pour objectif de dire qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Cette attestation est toujours remise en main propre à la personne qui la demande et porte généralement la mention : « pour faire valoir ce que de droit ».

Par ailleurs, quand un psychologue reçoit un des membres d’un couple parental et qu’il accepte de rédiger un document à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction et prendre en considération la diffusion potentielle de son texte comme le rappelle l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ».

Or le contenu de l’écrit soumis à la Commission dépasse le simple cadre d’une attestation, les propos semblant manifestement vouloir faire état des hypothèses, interprétations et conclusions au sujet des enfants du couple. Il est même possible de se demander jusqu’à quel point le document rédigé pourrait être exploité ou vouloir être exploité comme une expertise psychologique. En cela, il ne correspond pas à l’esprit de l’article 16 pour lequel :

Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés. »

Dans la situation présente, les deux parents n’ont pas été les destinataires conjoints de cet écrit relatif à la dynamique familiale ou, tout au moins, de l’état des trois enfants. Le but assigné à l’intervention reste confus et combine différents types d’écrits. Ceci ne coïncide pas avec l’impératif de rigueur énoncé par l’article 25 du Code dont doivent faire preuve les psychologues en toutes circonstances, en particulier dans celle de production d’un écrit :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

La psychologue aurait en outre pu informer du droit à demander une contre-évaluation comme l’indique l’article 14 :

Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation ».

Enfin, la Commission souhaite rappeler que l’exercice de la psychologie vaut pour tout praticien détenteur du titre et l’invite à questionner sa propre pratique, comme le propose l’article 23 :

Article 23 : La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques.

Elle signale par ailleurs qu’aucun ordre des psychologues n’est à ce jour en cours de création.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.