Après lecture et examen des éléments apportés par le demandeur, la Commission choisit d’étudier la situation au regard des points suivants :
– Le consentement parental dans le cas de suivi psychologique d’enfants,
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– La transmission écrite de données psychologiques,
– Le secret professionnel.
1 Le consentement parental dans le cas de suivi psychologique d’enfants
Dans l’exercice de ses fonctions, le psychologue peut être amené à rencontrer des enfants pour un suivi psychologique. Généralement, la demande n’émane pas de l’enfant lui-même, mais d’un de ses parents, voire des deux.
Comme l’indique l’article 9 du code de déontologie, le psychologue doit veiller au consentement de la personne qui le consulte, préalablement à toute intervention :
Article 9 : Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise.
Dans le cas d’une situation de séparation parentale, il arrive que l’un des parents prenne seul les décisions au sujet de l’enfant. Lorsqu’un suivi psychologique pour l’enfant est sollicité par l’un des parents, il est préconisé d’obtenir le consentement des détenteurs de l’autorité parentale, en l’occurrence des deux parents:
Article 11 : L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux.
Informer l’autre parent du suivi psychologique de l’enfant permet au psychologue d’appréhender plus objectivement le contexte dans lequel l’enfant évolue, mais également de donner à l’un ou l’autre des parents le sentiment d’avoir été traité équitablement.
Le Principe 2 du Code invite le psychologue à faire preuve de prudence, mais aussi d’impartialité :
Principe 2 : Compétence
[…] Quel que soit le contexte et les éventuelles pressions subies, il [le psychologue] fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »
2. La transmission écrite de données psychologiques
Dans la situation présentée, le demandeur qualifie d’ « attestation » l’écrit du psychologue, alors que ce dernier a intitulé son écrit « compte rendu d’examen psychologique ». Au vu du contenu de cet écrit, la Commission considère qu’il s’agit davantage d’un compte rendu de séances de suivi psychologique. En effet, le psychologue évoque essentiellement le contexte dans lequel évolue l’enfant, rapporte les propos de celui-ci, sans développer une analyse psychologique de la situation, ni faire état de l’utilisation d’outils d’évaluation.
Le demandeur signale que le psychologue « n’était pas mandaté pour faire ce type d’attestation ». A ce sujet, la Commission rappelle qu’il n’est pas nécessaire d’être mandaté par un juge pour produire un écrit. Le psychologue peut en rédiger à la demande de son patient, de l’un ou des deux détenteurs de l’autorité parentale lorsqu’il s’agit d’un enfant.
Comme mentionné dans l’article 20 du code de déontologie, le psychologue est seul responsable de ses écrits :
Article 20 : […] Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique.
En outre, le psychologue doit prendre en compte l’usage qui sera fait de ses écrits :
Principe 6 : Respect du but assigné
[…] En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers.
Lorsqu’il rédige un écrit destiné à un tiers, le psychologue doit être rigoureuxdans ses formulations, indiquer par exemple si le contenu de cet écrit concerne des propos qu’il a entendus, en utilisant le conditionnel ou des guillemets, être prudent dans ses conclusions. Le psychologue doit donc spécifier si ce qu’il écrit émane de sa propre analyse ou s’il s’agit de propos tenus par la personne qui le consulte. Ces précautions, en accord avec l’article 13, permettent au psychologue de se protéger contre le risque d’indiquer des informations à caractère mensonger :
Article 13 : Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même.
L’article 25 du Code introduit la notion de relativité des évaluations du psychologue, dont il doit être conscient lorsqu’il rédige un document destiné à être transmis :
Article 25 : Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes.
Ces précautions répondent également à l’impératif de rigueur défini dans le Code :
Principe 4 : Rigueur
Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail.
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3 Le secret professionnel
Le code de déontologie pose le secret professionnel comme un impératif indissociable de la pratique du psychologue :
Article 7 : Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice.
Le secret professionnel permet d’instaurer une relation de confiance entre le psychologue et la personne, cette dernière sait que ses propos resteront confidentiels. La rencontre avec le psychologue est un espace d’expression préservé par le cadre professionnel.
Lorsqu’un psychologue transmet des éléments psychologiques concernant un enfant, il doit prendre en considération le fait que ce dernier, en raison de son immaturité, ne mesure pas la portée que pourront avoir ses propos, c’est-à-dire l’impact et les conséquences de ses propos sur des décisions qui le concerneront. Par conséquent, ce que dit l’enfant au cours d’un suivi psychologique doit être entendu et repris avec discernement par le psychologue.
Le respect du secret professionnel implique également que lorsqu’il transmet des informations à un tiers, le psychologue doit au minimum informer la personne concernée, ici l’enfant,et au mieux obtenir son accord :
Article 17 : Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci.
Dans le cas présenté ici, l’écrit du psychologue comporte des éléments rapportés par l’enfant. Toutefois, rien ne permet de savoir si le psychologue a eu ou non un échange avec l’enfant concernant le contenu de cet écrit.
Pour la CNCDP
La Présidente
Claire Silvestre-Toussaint