Avis CNCDP 2022-22

Année de la demande : 2022

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Discernement
– Impartialité
– Respect de la personne
– Secret professionnel (Travail d’équipe et partage d’informations)

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Positionnement du psychologue dans un contexte de conflit familial.

Positionnement du psychologue dans un contexte de conflit familial

Le travail du psychologue peut s’inscrire dans celui d’une équipe pluridisciplinaire, notamment en institution. Selon des recommandations actuelles, les professionnels peuvent être invités à travailler de façon coordonnée et personnalisée afin qu’une approche globale de la situation complexe puisse se mettre en place. Le psychologue veille alors à faire reconnaitre les spécificités de ses missions en coordination avec les missions des autres membres de l’équipe, ainsi que le préconise l’article 4 du Code :

Article 4 : « Qu’elle·il exerce seul·e ou en équipe pluriprofessionnelle, la·le psychologue fait respecter sa spécificité professionnelle. Elle·il respecte celle des autres».

Son intervention peut prendre différentes formes, en appui sur ses compétences comme l’indique le Principe 4. Les missions du psychologue relèvent alors d’une grande variété comme le décline l’Article 3 du code de déontologie des psychologues :

Principe 4 : Compétence 

« La·le psychologue tient sa compétence :

– de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par l’article44 de la loi du 25 juillet 1985 modifiée, relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ;

–   de l’actualisation régulière de ses connaissances ;

– de sa formation à discerner son implication personnelle dans l’approche et la compréhension d’autrui.

Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Elle·il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité déontologique de refuser toute intervention lorsqu’elle·il sait ne pas avoir les compétences requises. Quels que soient le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, elle·il agit avec prudence, mesure, discernement et impartialité ».

Article 3 : « Ses champs d’intervention, en situation individuelle, groupale ou institutionnelle, relèvent d’une diversité de missions telles que : la prévention, l’évaluation, le diagnostic, l’expertise, le soin, la psychothérapie, l’accompagnement psychologique, le conseil, l’orientation, l’analyse du travail, le travail institutionnel, la recherche, l’enseignement de la psychologie, la formation ».

Ainsi, il peut notamment réaliser une évaluation, prendre part au diagnostic, mener un suivi psychothérapeutique, être l’interlocuteur référent dans le suivi de l’enfant. Dans ce cas, il lui appartient de définir son cadre d’intervention, en appui sur ses compétences, comme le rappelle le Principe 4 du Code déjà cité, et de faire distinguer ses différentes missions afin que les personnes avec lesquelles et auprès desquelles il travaille en aient une représentation claire, comme le recommande le Principe 5 :

Principe 5 : Responsabilité et autonomie professionnelle 

« Dans le cadre de sa compétence professionnelle et de la nature de ses fonctions, la·le psychologue est responsable, en toute autonomie, du choix et de l’application de ses modes d’intervention, des méthodes ou techniques qu’elle·il conçoit et met en oeuvre, ainsi que des avis qu’elle·il formule. Elle·il défend la nécessité de cette autonomie professionnelle inhérente à l’exercice de sa profession notamment auprès des usagers, employeurs ou donneurs d’ordre. Au préalable et jusqu’au terme de la réalisation de ses missions, elle·il est attentif·ve à l’adéquation entre celles-ci et ses compétences professionnelles. Elle·il peut exercer différentes missions et fonctions. Il est de sa responsabilité de les distinguer et de faire distinguer leur cadre respectif».

Dans la situation présentée à la Commission, la psychologue est la « thérapeute [d’une des jumelles] et [a] contribué au diagnostic de [l’autre jumelle]. Elle « participe à la coordination des soins » et a proposé à la demandeuse un échange téléphonique qui sera suivi, quelques semaines plus tard, d’un entretien à son cabinet. D’après la mère des deux enfants, la psychologue aurait été désignée comme « point de contact [pour la grand-mère] au sein de l’équipe soignante. » La Commission s’est interrogée sur la complexité que présentait d’emblée la situation sur le positionnement de la psychologue, mais sur la base des documents joints à la demande, ce « point a été discuté avec les autres membres de l’équipe soignante ». Les différentes missions semblent distinguées les unes des autres et pensées en coordination avec les autres professionnels associés au soin des enfants, répondant ainsi au Principe 6 :

Principe 6 : Rigueur et respect du cadre d’intervention

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par la·le psychologue répondent aux objectifs de ses interventions, et à eux seulement. Les modes d’intervention choisis et construits par la·le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et adaptée à son interlocuteur, ou d’une argumentation contradictoire avec ses pairs de leurs fondements théoriques et méthodologiques. »

Recevoir un parent ou un autre membre de la famille demande au psychologue d’intervenir avec la plus grande prudence concernant les informations qu’il va transmettre au sujet de l’enfant dont il est le thérapeute, comme le recommande l’article 5 :

Article 5 : « En toutes circonstances, la·le psychologue fait preuve de mesure, de discernement et d’impartialité. La·le psychologue accepte les missions qu’elle·il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences dans le respect du présent Code. Si elle·il l’estime utile, elle·il peut orienter les personnes ou faire appel à d’autres professionnels ».

A la lecture des courriels de la psychologue, il apparait qu’elle a agi avec prudence sur les éléments à transmettre et dans le respect de la demandeuse. Elle expose de façon factuelle ses différentes missions, propose à la grand-mère de lui faire part d’informations qui permettront « la compréhension des comportements » de ses petites-filles et lui conseille des pistes de soutien « face à l’annonce de ce diagnostic » de TSA. En cela elle respecte les recommandations fondamentales du Principe 1 :

Principe 1 : Respect des droits fondamentaux de la personne 

« La·le psychologue réfère son exercice aux libertés et droits fondamentaux garantis par la loi et la Constitution, par les principes généraux du Droit communautaire et par les conventions et traités internationaux. Elle·il exerce dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa liberté.

La·le psychologue s’attache à respecter l’autonomie de la personne et en particulier son droit à l’information, sa liberté de jugement et de décision. Toute personne doit être informée de la possibilité de consulter directement la·le psychologue de son choix ».

La Commission s’est interrogée sur le fait que la psychologue ait pu manquer de discernement en transmettant au pédopsychiatre de l’équipe, des éléments sur la demandeuse, issus de l’entretien commun, sans que celle-ci en soit informée. La Commission rappelle l’importance du respect du secret professionnel même dans le cadre d’une transmission entre professionnels suivant la même situation, comme le recommandent le Principe 2 et les articles 7 et 8 du Code :

Principe 2 : Respect de la vie privée, du secret professionnel, de la confidentialité 

« La·le psychologue est soumis·e à une obligation de discrétion. Elle·il s’astreint au secret professionnel et à la confidentialité qui doivent être garantis dans ses conditions d’exercice. En toutes circonstances, elle·il en informe les personnes concernées et recherche leur consentement éclairé. Elle·il respecte le principe fondamental que nul ne peut être contraint de révéler quoi que ce soit sur lui-même ».

Article 7 : « La·le psychologue est tenu au secret professionnel dans les conditions et les limites des dispositions du code pénal (articles 226-13 et 226-14). Le secret professionnel couvre tout ce dont la·le psychologue a connaissance dans l’exercice de sa profession : ce qui lui est confié comme ce qu’elle·il voit, entend ou comprend ».

Article 8 : « Dans tout échange entre professionnels ayant pour objet l’examen de personnes ou de situations, la·le psychologue partage uniquement les informations strictement nécessaires à la finalité professionnelle, conformément aux dispositions légales en vigueur. En tenant compte du contexte, elle·il s’efforce d’informer au préalable les personnes concernées de sa participation à ces échanges ».

Enfin, dans le cadre d’un suivi psychothérapeutique, le psychologue recueille les paroles et les événements que son patient relate tels qu’il les lui transmet. Il n’est pas de son ressort de vérifier la véracité de ces propos. En cela, il respecte le Frontispice du Code :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action du psychologue. »

 

Pour la CNCDP

Le Président

Antony CHAUFTON

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-05

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Compétence professionnelle (Reconnaissance des limites de sa compétence, orientation vers d’autres professionnels)
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Discernement

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Intervention du psychologue dans le cadre d’un contexte judiciaire entre parents.

Intervention du psychologue dans le cadre d’un contexte judiciaire entre parents

La Commission a perçu la situation très conflictuelle qui gravite autour de cette famille. Elle a porté son attention sur les questions relatives au code de déontologie des psychologues : celle de l’autorisation parentale en cas de suivi d’un mineur, celle du consentement des parents dans le cadre d’un placement d’enfant au titre de sa protection et enfin celle de la responsabilité du psychologue quel que soit le cadre de ses interventions.

Lorsque l’autorité parentale est exercée conjointement et que le psychologue reçoit un enfant avec un seul de ses parents, ce dernier est considéré comme tiers de bonne foi, chacun des parents étant réputé agir avec l’accord de l’autre. Il est néanmoins souhaitable que le psychologue ait un contact avec l’autre parent, afin de l’intégrer au processus de la consultation comme l’article 11 y invite.

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de   majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Dans une situation conflictuelle, ou lorsque les parents sont en instance de divorce, le psychologue est invité à observer la plus grande prudence. En effet, s’agissant d’une séparation, associer l’un et l’autre des parents permet au psychologue de cerner au mieux la dynamique familiale dans son ensemble et d’ajuster son intervention auprès de l’enfant. Avant de rédiger un écrit, il mène une réflexion sur le bien-fondé d’une telle production, tout en déterminant sa forme et son contenu. Il cherche à préserver le principe d’impartialité, énoncé dans le Principe 2 du Code. En adoptant une démarche mesurée, il est conscient de l’usage qui pourrait être fait de ces documents par les parties.

Principe 2 : Compétence

« […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il [le psychologue] fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Dans un contexte judiciaire de placement par un Juge des Enfants (JE), au titre de l’assistance éducative, ce dernier peut ordonner l’intervention d’un psychologue sous la forme d’une expertise psychologique ou dans le cadre d’une injonction de soin. Le psychologue agit alors sur mandat et dans un cadre de contrainte. Il aura à présenter ses conclusions en tenant compte de l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Dans ces différents contextes, le psychologue veille à fonder son intervention en s’appuyant sur le Principe 1 et les articles 7 et 9 du Code:

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. »

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Enfin, lorsque le psychologue est amené à rédiger un document dans le cadre de son exercice professionnel, il engage sa responsabilité professionnelle rappelée au Principe 3.

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

En absence de document joint à la demande et de précisions sur le cadre exact et la temporalité de l’intervention de la psychologue citée par le demandeur, la Commission n’a pu se prononcer plus avant sur la situation.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2019-17

Année de la demande : 2019

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle du psychologue, Reconnaissance des limites de sa compétence, orientation vers d’autres professionnels)
– Consentement éclairé
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter le point suivant :

  • Modalités d’intervention du psychologue dans le contexte d’une procédure judiciaire entre parents.

Modalités d’intervention du psychologue dans le contexte d’une procédure judiciaire entre parents.

De manière générale, le psychologue doit se montrer vigilant et plus particulièrement quand il reçoit l’enfant de parents divorcés, afin de déterminer le but assigné à son intervention et d’en expliciter les contours aux intéressés comme l’article 9 du Code l’y invite :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

S’agissant de mineurs, il cherche à recueillir l’accord des deux parents comme l’article 11 le préconise :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Le psychologue s’appuie sur ses compétences et sur sa formation, comme le rappelle le Principe 2, pour choisir les modalités de ses interventions en étant conscient de ses responsabilités comme le pose le Principe 3 :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence :

– de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par la loi relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ;

– de la réactualisation régulière de ses connaissances ;

– de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

S’il conçoit son intervention en toute autonomie, il est néanmoins averti des possibles conséquences de ses actes, comme de ses paroles, comme le suppose le Principe 4 :

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »

Dans la situation présente, la demandeuse aurait, dès le premier rendez-vous, indiqué le désaccord du père quant au changement d’école de leur fille et avoir amorcé des démarches auprès du tribunal dans ce sens, ce qui aurait dû alerter la psychologue et la conduire à différer son avis. Le fait de prêter à l’enfant un livre faisant explicitement référence à des situations de harcèlement, s’il visait pour la psychologue, à servir de support pour évaluer si l’enfant en était victime, semble avoir laisser penser à cette mère que l’hypothèse faite par le médecin était correcte.

Devant la complexité de la situation familiale qui transparaît de plus en plus au fil des séances, la psychologue a invité dans la consultation la mère et le jeune frère âgé de six ans, puis a décidé d’entendre le père en présence des deux enfants. Cette initiative a déplacé le motif initial de la consultation en prenant en compte la dynamique familiale, sans que l’on sache si tous ont donné leur consentement et si cela a été explicité. Si l’accord des deux parents pour intervenir auprès des mineurs a été recherché, comme le recommande l’article 11, déjà cité, ce dispositif de consultation familiale pouvait apparaître soutenable et conforme au Principe 6 du Code :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans cette situation, les suites de cette consultation sont apparues nettement plus confuses aux yeux de la Commission qui s’est interrogée sur la manière dont la mère s’est engagée dans un suivi individuel pour elle-même avec cette même psychologue. Cela questionne la cohérence des interventions et du dispositif. En effet, elle a fait le choix d’enregistrer leur « deuxième séance » et de poursuivre en parallèle des rendez-vous entre cette psychologue et sa fille, ce qui interroge sur le degré de confiance réciproque. Cette superposition d’interventions est apparue porteuse de risques de dérives et de malentendus pour l’ensemble des protagonistes.

Si le psychologue peut remplir différentes fonctions, il est de sa responsabilité de les expliciter et de les faire distinguer comme le Principe 3, déjà cité, le mentionne. L’orientation vers des professionnels distincts est souvent indiquée dans ces cas complexes, comme les articles 5 et 6 du Code le suggèrent :

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

Article 6 : « Quand des demandes ne relèvent pas de sa compétence, il oriente les personnes vers les professionnels susceptibles de répondre aux questions ou aux situations qui lui ont été soumises. »

Le verbatim de la psychologue, tel qu’il est transcrit par la demandeuse, semble confirmer la difficulté à rendre compréhensible son positionnement aux yeux de cette mère au sens de l’article 16 :

Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés. »

Enfin, la Commission observe que le recours à l’hypnose, utilisable par un psychologue dûment formé à cette technique, a néanmoins à être explicitement accepté par un patient même mineur et aussi par ses représentants légaux, afin de rester conforme au Principe 1 du Code :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« […]. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

La Commission attire l’attention des psychologues sur la nécessaire explicitation de leurs modes d’intervention ainsi que sur l’importance que les conclusions adressées à leurs patients soient compréhensibles.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2013-01

Année de la demande : 2013

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Accès libre au psychologue
– Autonomie professionnelle
– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Code de déontologie (Référence au Code dans l’exercice professionnel, le contrat de travail)
– Compétence professionnelle
– Discernement
– Évaluation (Relativité des évaluations)

Au vu de la situation présentée et des interrogations du demandeur, la Commission se propose d’aborder les points suivants :

– Le psychologue et le choix de ses méthodes et techniques,

– L’aspect relatif des évaluations et interprétations du psychologue,

– Le travail thérapeutique avec l’enfant et le travail du psychologue avec les parents, dans un contexte de conflit parental,

– Le traitement équitable des parties.

    1. 1. Le psychologue et le choix de ses méthodes et techniques

Les modes d’intervention des psychologues sont divers. Cette diversité tient à la pluralité des situations et des personnes rencontrées autant qu’à la variété des spécialisations professionnelles des psychologues. Dans ce contexte, c’est bien à chaque psychologue d’apprécier quel dispositif est le plus approprié dans son secteur d’intervention pour les personnes qu’il rencontre.

Principe 3, Responsabilité et autonomie : […]Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. […]

Cela ne signifie pas que tout est possible. Le Code est clair à cet égard, l’autonomie technique du psychologue s’exerce dans le cadre de sa compétence professionnelle, une compétence dont le principe 2 rappelle les principales caractéristiques.

Principe 2 : Compétence

Le psychologue tient sa compétence :

de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par la loi relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ;

– […] Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […].

L’usage professionnel du titre étant protégé par la loi, ceux qui peuvent en faire usage ont suivi une formation longue et exigeante délivrée par des structures universitaires habilitées à cette fin. C’est dans ce cadre que chaque psychologue se dote de la qualification technique qui lui permettra d’utiliser à bon escient une gamme de méthodes et d’ajuster son intervention aux caractéristiques des situations dans lesquelles il interviendra. Comme le rappelle opportunément le principe 2, l’expérience professionnelle du psychologue lui permettra de clarifier et préciser encore l’étendue et les limites des qualifications dont il est garant.

Si les modes d’intervention choisis par le psychologue ne doivent rien à l’arbitraire, s’ils résultent d’une formation de haut niveau complétée par l’expérience du terrain, alors le psychologue doit pouvoir en répondre personnellement et justifier de la pertinence de ses choix. C’est à ce propos, le choix des modes d’intervention, que le Code invoque le principe de rigueur :

Principe 4 : Rigueur

Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail.

Les choix techniques que fait un psychologue sont donc généralement justifiés. Il reste qu’ils peuvent être discutés et que rien ne s’oppose à leur examen critique. Le code de déontologie des psychologues ne peut servir à cet examen que sur le plan déontologique. On y trouve des règles pour les personnes titulaires du titre de psychologue et le préambule du Code précise :

Préambule

[…] Le respect de ces règles protège le public des mésusages de la psychologie et l’utilisation de méthodes et techniques se réclamant abusivement de la psychologie. […]

Dans la situation exposée par le demandeur, le choix de la psychologue de recevoir la mère et l’enfant ensemble, comme tout choix peut être discuté, mais rien ne s’y oppose au regard des prescriptions du code de déontologie.

L’inquiétude du demandeur porte sur l’influence et les pressions que la mère pourrait exercer sur l’enfant pendant les entretiens. Tout psychologue qui choisit ses modes d’intervention dans le respect des principes énoncés plus haut a les compétences pour percevoir de tels effets, en tenir compte dans sa gestion de la situation et le cas échéant modifier sa méthode d’entretien.

    1. 2. L’aspect relatif des évaluations et interprétations du psychologue.

Les premières séances d’un psychologue avec un patient lui permettent une compréhension d’ensemble des problématiques de ce dernier. Cette première phase de travail nécessite la plus grande attention dans la prise en compte des facteurs concernés, surtout avec un jeune patient en situation de crise, comme cela semble être le cas ici.

Le demandeur questionne la Commission sur le bien-fondé de cette première évaluation. Celle-ci est possible en quelques séances, même si elle ne peut pas toujours être communiquée comme telle : elle va surtout permettre au psychologue de proposer et mettre en place des interventions au plus près de la situation donnée. Cela est d’autant plus vrai dans le cas d’une évaluation des problématiques d’un enfant dans un contexte de conflit parental. Les passions y sont exacerbées et le psychologue tentera surtout de préserver le lien qu’il commence à tisser avec l’enfant tout en travaillant à une alliance thérapeutique avec les parents.

Dans tous les cas, au moment de la communication, ici aux parents, le psychologue doit faire preuve de mesure, comme le rappelle le Principe 2 du Code :

Principe 2 : Compétence

[…]Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité.

Cette communication ne peut pas prendre la forme d’un jugement catégorique et définitif. Le psychologue dans ses évaluations se réfère en effet à l’article 25 du code de déontologie :

Article 25 : Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques ou psychosociales des individus ou des groupes.

Le caractère relatif des évaluations et interprétations du psychologue concerne, dans la situation présente, autant la problématique de l’enfant que la relation de chacun des parents avec celui-ci. La communication aux parents tient compte également du contexte conflictuel entre eux, s’il existe, dans le but de préserver tant que faire se peut le travail commencé avec l’enfant.

3. Le travail thérapeutique avec l’enfant et la relation du psychologue avec les parents, dans un contexte de conflit parental.

Le psychologue travaille dans le respect des législations en vigueur. Dans un contexte de conflit parental, il s’assure du consentement des deux parents avant d’entamer le suivi d’un enfant. Dans cette configuration particulièrement difficile en raison des tensions qui peuvent exister entre les deux parents, les différentes législations concernant les droits de l’enfant1 peuvent lui servir de point d’appui. Le principe 1 du Code incite le psychologue à s’y référer :

Principe 1, Respect des droits des personnes

Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection […] 

La notion d’intérêt supérieur de l’enfant, à laquelle se réfère la convention internationale des droits de l’enfant, peut guider le psychologue dans son travail avec les parents. Si le conflit parental est particulièrement exacerbé, le psychologue peut aussi proposer à ceux-ci un espace de médiation différent sous la responsabilité d’autres professionnels, ce qui permet de préserver l’espace thérapeutique de l’enfant. C’est la fonction possible d’une médiation familiale, souvent proposée dans de telles situations.

4. Le traitement équitable des parties.

Comme cela a été indiqué précédemment le psychologue assurant le suivi d’un enfant oriente son intervention en priorité vers l’enfant. Les différents adultes qui constituent son entourage proche sont tous susceptibles d’apporter au psychologue leur témoignage sur la situation de ce dernier. Mais si ces témoignages s’avèrent utiles voire indispensables dans le cas d’une expertise par exemple, ils n’ont pas nécessairement à être recueillis de façon systématique et exhaustive lors d’un suivi psychologique. Il revient au psychologue d’apprécier la nature des informations dont il a besoin pour comprendre et aider l’enfant, sachant que celles qu’il puise dans l’écoute et l’observation de ce dernier sont essentielles.

L’équité ne réside pas ici dans l’audition de toutes les parties qui souhaiteraient faire entendre leur vérité sur la situation de l’enfant, mais dans l’adoption d’un positionnement qui est celui du psychologue : reconnaître à chacun des parents (en particulier) la place qu’il occupe dans le psychisme de l’enfant. La crainte du demandeur que la psychologue qui suit sa fille soit influencée par tel ou tel interlocuteur peut se comprendre. Si le mot équité n’apparaît pas dans la version actuelle du Code, il faut néanmoins rappeler que la recherche d’impartialité fait partie de la compétence attendue du psychologue.

Principe 2 : Compétence

[…] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité.

Cela étant, le psychologue qui reçoit régulièrement un enfant en y admettant la présence ponctuelle d’une autre personne s’expose à ce que d’autres proches, directement impliqués dans le contexte familial conflictuel, souhaitent également rencontrer le psychologue.

Si une fois le suivi engagé, le psychologue souhaite rencontrer un proche de l’enfant ou accepte de le recevoir à sa demande, il a alors le choix, tout en veillant à préserver le cadre thérapeutique, de le faire soit en la présence de l’enfant, soit en dehors des séances régulières de suivi.

Pour la CNCDP

La Présidente

Claire Silvestre-Toussaint

1

Convention Internationale des Droits de l’Enfant du 20 nov. 1989

Avis CNCDP 2000-08

Année de la demande : 2000

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Consentement éclairé
– Évaluation (Évaluation de personnes liées au psychologue (personnellement ou professionnellement))
– Secret professionnel (Contenu des entretiens / des séances de groupe)

En réponse au premier point, la Commission répond que le psychologue était en droit de recevoir, lors de la première consultation, un enfant à la demande du père même si la mère n’en était pas informée, ce qui aurait été souhaitable « le psychologue peut recevoir, à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi » (article 10).
Cependant « avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation, une recherche ou une expertise … » (article 9) et « lorsque la consultation pour des mineurs… est demandée par un tiers, le psychologue requiert leur consentement éclairé, ainsi que celui des détenteurs de l’autorité parentale ou de la tutelle » (article 10). Or ici, ni la mère ni l’enfant n’ont donné un accord favorable, ils ont même exprimé leur refus. De ce fait, le psychologue se trouve en opposition avec le Code de déontologie : « le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées (…) » ( Titre I-1).
Dans deux courriers, la mère a exprimé son refus, sans jamais obtenir de réponse. Ici le psychologue est à nouveau en contradiction avec le code (Titre I-1 : « Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées ».
Le fait d’avoir reçu en consultation les enfants d’un ancien patient et d’un patient actuel, à la demande de ce dernier, contrevient à l’article 11 du code puisque « le psychologue n’engage pas d’évaluation ou de traitement impliquant des personnes auxquelles il serait déjà personnellement lié ».
Enfin, le fait que le psychologue se soit permis de parler aux enfants d’un de ses anciens clients, en l’occurrence leur mère, ne respecte pas les droits des personnes « Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même » (Titre I-1).

Conclusion

Si tout psychologue peut, dans un premier temps, accepter de recevoir un enfant, il doit ensuite s’assurer de son consentement ainsi que de celui des détenteurs de l’autorité parentale ou de la tutelle.

Fait à Paris, le 29 juin 2000. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

Avis CNCDP 2002-10

Année de la demande : 2002

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Évaluation (Droit à contre-évaluation)
– Traitement équitable des parties
– Signalement
– Discernement
– Respect du but assigné

Voir le document joint.

Avis CNCDP 2003-07

Année de la demande : 2003

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Abus de pouvoir (Abus de position)
– Signalement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))
– Respect du but assigné
– Évaluation (Relativité des évaluations)

Voir le document joint.

Avis CNCDP 2003-04

Année de la demande : 2003

Demandeur :
Particulier (Tiers)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Consultation

Questions déontologiques associées :

– Respect du but assigné
– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes

Voir le document joint.