Avis CNCDP 2019-24

Année de la demande : 2019

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Consentement éclairé
– Code de déontologie
– Confidentialité
– Recherche

La commission se propose de traiter le point suivant :

  • Respect de la dimension psychique des personnes évaluées dans le cadre d’une expertise psychologique.

 

Respect de la dimension psychique des personnes évaluées dans le cadre d’une expertise psychologique.

L’article 3 nous précise que le psychologue peut exercer en tant qu’expert judiciaire, et le Principe 3 que toutes situations rattachées à l’exercice professionnel engagent sa responsabilité professionnelle et son autonomie.

Article 3 « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité des pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation… »

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule… »

Le psychologue est ici auxiliaire de justice et il a à répondre strictement à la mission impartie et aux questions posées par le juge prescripteur. Le cadre de ces questions est peu codifié, d’une grande variabilité et d’une extension qui peut entrainer le psychologue hors de ses compétences ou de sa propre mission. Ceci incite le psychologue à une certaine vigilance, d’autant plus que l’expertise est un cadre de contrainte auquel la famille est soumise. L’article 12 précise les contours de cet exercice :

Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. »

Si dans ce rôle d’expert judiciaire, le psychologue peut avoir à partager des informations à caractère secret, cela ne l’exonère pas des obligations déontologiques, mentionnées dans l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

A la lecture du rapport d’expertise psychologique, la Commission constate que le psychologue présente l’anamnèse des personnes rencontrées, ce qui ne répond en rien aux questions posées par le juge. De même, il cite les dires de ses interlocuteurs, les noms et prénoms des anciens compagnons de la demandeuse et du père de l’enfant alors qu’ils ne sont pas impliqués dans la situation investiguée. Il interprète les maux dont souffre la mère comme une « mise en avant de troubles somatiques » qui l’empêcheraient de remplir son rôle de mère. L’article 17 précise les précautions à prendre avant toute communication à un tiers.

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent à la question posée et ne comportent des éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci »

Le psychologue, malgré son cadre d’intervention spécifique, devait faire preuve de discernement, prudence et esprit critique afin de ne pas se projeter dans une situation dont l’objectif est de donner un avis et non d’émettre un jugement. Dans la situation évoquée, ce dernier devient vite impartial, bafouant le respect du but assigné (Principe 6) et la dimension psychique de la personne, fondement de l’action du psychologue, tel que posé dans le frontispice.

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Frontispice :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Tout se passe comme si l’expert psychologue avait reçu caution de ses interlocuteurs pour dévoiler ce qu’ils avaient de plus intime. Les jugements de valeur émis sur les personnes soulignent le défaut de reconnaissance de la dimension psychique auquel a le droit chacun, tel que souligné dans l’article 2 qui reprend le frontispice.

Article 2 « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaitre et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Vraisemblablement, le psychologue n’a pas rendu compte aux personnes concernées de ses écrits, alors que certains d’entre eux étaient négatifs et invalidants. Rendre compte de ce document aurait permis à la demandeuse de s’approprier sans surprise le contenu du rapport, et au psychologue de mesurer les potentiels effets prévisibles. Le Principe 2 souligne la prudence, la mesure, le discernement et l’impartialité requis dans la pratique.

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience […] Quel que soit le contexte de son intervention il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Dans son rapport le psychologue s’appuie sur les critères diagnostiques du DSM5 (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders), et sur ceux de « Meadow » et de « Rosenberg », croisés avec des éléments de vulgarisation diffusés sur le site Wikipédia. Il en tire des conclusions en suspectant la mère d’entrainer dans son sillage « les services judiciaires et éducatifs, son avocate et les thérapeutes de l’enfant » et de renforcer « la crainte d’une relation parentale entre le père et son fils ». En cela, il ne tient pas compte des préconisations de l’article 25 :

Article 25 « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

La Commission invite donc le psychologue à redoubler de prudence, dans l’intérêt supérieur des enfants et de leurs parents, dans les situations d’expertise judiciaire.

 

 

 

 

Pour la CNCDP,

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

 

 

 

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2019-23

Année de la demande : 2019

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Impartialité
– Respect de la loi commune
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle
– Spécificité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Les écrits du psychologue dans une situation susceptible de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’une personne.

Les écrits du psychologue dans une situation susceptible de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’une personne.

Les écrits du psychologue sont de différentes natures et engagent sa responsabilité, comme le prévoit le Principe 3 du code de déontologie :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. […] »

Selon l’article 20 de ce même Code, le document doit, sur un plan formel, respecter un certain nombre de caractéristiques qui permettent d’identifier les coordonnées de son signataire et l’objet de l’écrit :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique ».

Dans le « compte rendu psychologique » joint à la demande, ces caractéristiques sont bien présentes. Il est cependant noté que le sigle ADELI est orthographié « Adélie » et que les coordonnées professionnelles de la psychologue se résument à un numéro de téléphone et une adresse e-mail. La Commission s’est par ailleurs interrogée sur ce que recouvre un rectangle noir qui figure en haut et à gauche de la copie. En l’état, aucune indication ne permet de saisir l’objectif de cet écrit, ni son destinataire. Il n’est pas précisé si la psychologue a donné un accord explicite pour qu’il soit transmis à la justice. De plus, le demandeur signale en post-scriptum que la psychologue aurait fait une erreur d’une année. Selon lui, cet écrit serait donc postérieur au classement sans suite d’une première affaire le concernant.

Le texte débute par une « présentation » qui situe le diagnostic posé sur l’ex-épouse du demandeur comme « conséquent du comportement de son mari », qualifié ensuite de « violent, agressif, querelleur, tyrannique, addicté aux jeux, manipulateur, voleur et pervers ». La Commission observe que l’accumulation de ces qualificatifs s’appuie uniquement sur les déclarations de la patiente, ce qui réduit leur fiabilité au sens de l’article 13 et peut également les discréditer.

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner ».

L’« histoire du cas » qui suit cette « présentation » décrit de manière très détaillée la vie conjugale du couple, les violences physiques et psychologiques exercées par le demandeur sur son ex-épouse et la possible existence d’attouchements du père sur sa fille. La psychologue ne prend pas soin de préciser que son récit est uniquement basé sur les dires de sa patiente, ce qui manque singulièrement de la prudence, de la mesure et de la rigueur préconisées au Principe 2.

Principe 2 : Compétence

« […] Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Au-delà d’une rédaction et d’une orthographe pour le moins approximatives, la structure du texte pourrait s’apparenter à une expertise psychologique, concernant une femme potentiellement victime de violences conjugales, voire une enfant pouvant avoir subi des attouchements, alors que la psychologue n’a aucunement été mandatée pour réaliser une telle investigation. La Commission a estimé que le diagnostic et les préconisations formulées auraient eu avantage à s’appuyer sur l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci ».

Le TGI a classé sans suite une première affaire concernant le demandeur pour « absence d’infraction ». Le document transmis étant incomplet, la Commission n’a pas pu identifier l’origine de la « dénonciation » et le type d’« infraction » qui avait alors été invoqué.

A la lecture du contexte décrit par la psychologue, la Commission s’est interrogée sur la raison pour laquelle elle n’a pas signalé aux autorités administratives ou judiciaires une situation pouvant être considérée comme portant atteinte à l’intégrité psychique et physique de cette mère et de ses enfants en suivant ainsi les recommandations de l’article 19 :

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».

Le contenu d’un signalement, élaboré par un psychologue, doit toutefois rester conforme aux Principes 6 et 4 du Code :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Principe 4 : Rigueur

« […] Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »

La décision de saisir une autorité administrative ou judiciaire appelle à observer rigueur et discernement dans les faits invoqués. Les allégations doivent être rapportées avec soin et entre guillemets afin de laisser place aux investigations ultérieures (évaluations, expertises, enquêtes voire auditions contradictoires). Le respect de ces dispositifs permet au psychologue de rester dans un positionnement respectueux des droits des personnes au sens du Principe 1 et de l’article 25 :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Enfin, si le but assigné à cet écrit était de « mettre en place des mesures de protection » pour la mère et ses enfants, comme la conclusion de la psychologue le laisse entendre, une saisine de la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) aurait pu déclencher l’intervention des services sociaux à même d’accompagner et de soutenir leur mise à l’abri.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2019-08

Année de la demande : 2019

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

– Assistance à personne en péril (Protection)
– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Compétence professionnelle (Reconnaissance des limites de sa compétence, orientation vers d’autres professionnels)
– Discernement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Secret professionnel (Obligation du respect du secret professionnel)

Après lecture du courrier du demandeur et des pièces jointes associées, la Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Cadre d’intervention du psychologue auprès d’un enfant dans un contexte de séparation parentale.
  • Rédaction d’un écrit dans un contexte de procédure judiciaire.
  1. Cadre d’intervention du psychologue auprès d’un enfant dans un contexte de séparation parentale :

Qu’elle que soit la forme de son intervention, le psychologue veille à prendre en compte le contexte dans lequel une demande lui est adressée, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’intervenir auprès d’un enfant et lorsque cela s’inscrit dans le contexte d’une séparation parentale. Le psychologue explicite aux intéressés le cadre et les limites de son intervention, tel que l’indique l’article 9 du Code :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions.».

Dans la situation présente, le psychologue exerçant en libéral a été sollicité par la mère pour un « suivi psychologique » de son fils. Il avait connaissance que cette demande s’inscrivait dans un contexte de « séparation parentale récente » et ne pouvait donc ignorer les enjeux potentiels de cette situation. Ceci devait l’encourager à redoubler de prudence et de discernement, selon le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence : […] – de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Lorsque la demande est portée par un seul parent, il est recommandé de s’assurer du consentement de l’autre parent, comme rappelé dans l’article 11 du code de déontologie :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Le psychologue oriente ses décisions selon l’article 2 du Code, en agissant dans l’intérêt de son patient, notamment dans des situations où ce dernier peut être l’enjeu de conflits parentaux :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Dans le cas présent, le demandeur indique n’avoir jamais rencontré le psychologue qui a reçu son fils. A la lecture des pièces jointes, il apparait qu’une « séance préliminaire », exclusivement avec la mère a été suivie de quatre « entretiens mère-enfant ». Dans l’intérêt de la prise en charge menée auprès de l’enfant, la Commission a estimé que le psychologue aurait pu prendre en compte le contexte familial, en rencontrant le père.

  1. Rédaction d’un écrit dans un contexte de procédure judiciaire

Lorsqu’un psychologue décide de rédiger un document, qu’il s’agisse d’une attestation ou d’un compte rendu psychologique, cet acte professionnel engage sa responsabilité, comme l’indique le Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

 

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Cela suppose aussi que, dans la continuité de son intervention, cet écrit puisse répondre à une finalité précise, en cohérence avec le but assigné à la mission du psychologue, comme le rappelle le Principe 6.

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

Le psychologue est par ailleurs attentif au cadre de diffusion de ses écrits. La transmission d’un document à un tiers ne se fait qu’avec son accord explicite, selon les recommandations de l’article 20 :

Article 20 : « […]. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

A l’examen du document joint par le demandeur, intitulé « bilan psychologique », la Commission n’a pas pu identifier de destinataire. Seule l’ordonnance de jugement jointe par le demandeur confirme la production en justice de celui-ci par la mère. Ainsi, la Commission s’est interrogée sur l’objectif premier du document et du cadre de diffusion préalablement défini par le psychologue.

Par ailleurs, répondre à une demande d’écrit, nécessite de circonscrire les éléments à communiquer avec mesure et discernement, comme le précise le Principe 2, déjà cité. Le psychologue, averti des conséquences que peuvent induire ses écrits professionnels, observe ainsi, selon l’article 17 du code de déontologie, une grande prudence lorsqu’il formule ses conclusions, tout en respectant le principe lié au secret professionnel auquel il est tenu, en référence à l’article 7 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice ».

Dans la présente situation, le psychologue a choisi de rédiger un compte rendu intitulé « bilan psychologique » cinq mois après l’ordonnance d’une expertise médico-psychologique par le JAF. Dans cet écrit très fourni, il rend compte d’observations des séances avec l’enfant, en proposant plusieurs interprétations issues de scènes de jeu. Il y indique des « observations préoccupantes » en s’appuyant sur une scène qualifiée « d’incestuelle » lors d’une visite chez son père. La concomitance entre la production de cet écrit et la mise en œuvre d’une expertise médico-psychologique portant sur la famille a pu interroger la Commission. En effet, ceci peut questionner sur la capacité du psychologue à prendre en compte, d’une part, le contexte dans lequel l’enfant et sa famille évoluaient et, d’autre part, le caractère relatif de ses interprétations et avis, tel que ceci est précisé dans les articles 25 et 13 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Si le psychologue avait par ailleurs estimé que l’intégrité de son patient était potentiellement en jeu, au sens de l’article 19, il devait alors apprécier la nécessité de transmettre ces observations préoccupantes aux services compétents, selon l’article 6 du Code, afin que ces derniers puissent mener une investigation.

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. »

Article 6 : « Quand des demandes ne relèvent pas de sa compétence, il oriente les personnes vers les professionnels susceptibles de répondre aux questions ou aux situations qui lui ont été soumises. »

Dans le cas présent, le fait que cet écrit ait été produit en justice en préconisant une « mesure de protection avec des visites médiatisées » avec le père, tout en s’appuyant sur des « observations préoccupantes », rend sa portée ambigüe, voire va au-delà de ce qu’un document intitulé « bilan psychologique » aurait dû viser. La Commission a pu d’ailleurs noter que l’ordonnance judiciaire soulève ce point : en ayant rencontré exclusivement la mère et agi dans un cadre libéral et non en qualité d’expert mandaté, ce psychologue n’avait « aucune qualité pour intervenir dans la procédure judiciaire ».

Enfin, la Commission tient à rappeler que rédiger un document nécessite de la part du psychologue prudence et mesure, qui plus est lorsque son intervention et son écrit s’inscrivent dans un contexte de procédure de divorce en cours.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-21

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Transmission/ communication des écrits psychologiques à l’extérieur du service ou de l’institution

Questions déontologiques associées :

– Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
– Compétence professionnelle (Reconnaissance des limites de sa compétence, orientation vers d’autres professionnels)
– Confidentialité (Confidentialité de l’identité des consultants )
– Consentement éclairé
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Impartialité
– Respect de la personne
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • But assigné lors de l’intervention auprès d’un enfant mineur et équité entre les parents.
  • Respect du secret professionnel et du cadre confidentiel des interventions.
  • Responsabilités dans la rédaction d’un « signalement » à l’autorité judiciaire.
  1. But assigné lors de l’intervention auprès d’un enfant mineur et équité entre les parents.

En premier lieu, le psychologue se doit de circonscrire le but assigné de son intervention, comme indiqué dans le Principe 6.

Principe 6 : Respect du but assigné.

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

La mission du psychologue dans le cadre scolaire est de recevoir les enfants et leurs parents. Comme pour tout entretien d’ordre psychologique, il veille donc à les informer des objectifs de la consultation et de ses aboutissements, comme précisé dans l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions ».

Quelle que soit la nature de la consultation avec un enfant mineur, le psychologue s’assure du consentement éclairé de l’enfant lui-même et des détenteurs de l’autorité parentale, en accord avec l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Dans le cas présent, la direction pas plus que l’assistante sociale et la psychologue de l’école n’ont reçu le père. Cela aurait peut-être évité de nourrir des convictions appuyées sur un seul discours et de formuler des conclusions potentiellement hâtives. La précipitation des évènements aurait dû inciter la psychologue à une grande prudence et à élaborer d’autres hypothèses que celles exprimées par la mère. Par ailleurs, la difficulté à interpréter les propos des très jeunes enfants aurait dû l’inciter à approfondir ses investigations. En ce sens, elle pouvait s’appuyer sur les dispositions du Code, en faisant preuve d’impartialité et de prudence, en étant consciente de l’utilisation qui peut être faite de ses écrits par des tiers, comme le précise le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence.

«  […] Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

  1. Respect du secret professionnel et du cadre confidentiel des interventions

Une des missions du psychologue est d’être à l’écoute du discours et des souffrances des personnes qu’il reçoit. Ces dernières s’expriment de façon singulière, en fonction de leur personnalité et de la qualité de leur investissement relationnel. Elles peuvent ainsi être amenées ou vouloir livrer des éléments de leur intimité. Le cadre confidentiel et le respect du droit des personnes sont garantis lors de l’intervention du psychologue, comme le rappelle le Principe 1 :

            Principe 1 : Respect des droits de la personne

         « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

Le secret professionnel doit être préservé par le psychologue quel que soit son cadre de travail, comme le souligne l’article 7 :

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

Dans la situation présente, le courrier de la psychologue mentionne non seulement les noms et les prénoms de l’enfant, de sa mère et du demandeur, mais également le nom des autres enfants et parents impliqués dans les évènements qui se sont produits dans le cadre scolaire, ce qui peut interroger le respect du secret professionnel et du droit des personnes.

La Commission rappelle néanmoins que le psychologue doit référer son positionnement aux principes édictés par la législation et peut être, dans certains cas, dans l’obligation de saisir les autorités compétentes, ne pouvant alors déroger aux obligations de la loi commune comme le précise l’article 19 :

Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. »

  1. Responsabilités dans la rédaction d’un « signalement » à l’autorité judiciaire

Dans la situation présente, la psychologue semble avoir pris à la lettre et en urgence l’obligation de lever le secret professionnel face à une situation supposée d’abus sexuel sur mineur de la part d’un membre de sa famille, en l’occurrence son père. Si la loi oblige à prévenir sans délais l’autorité administrative et/ou judiciaire dans les cas de danger imminent, force est de constater que la psychologue ne semblait disposer que d’indices bien minces pour procéder de la sorte. Cela l’amène néanmoins à établir un rapport circonstancié d’observations et de relevés de verbatim, allant dans le sens du discours de la mère, sans mise en perspective.

La Commission note que, dans son courrier adressé au Procureur de la République, la psychologue connote positivement le rôle de la mère, tandis que le père, non rencontré, est décrit négativement. Elle s’engage alors dans la problématique familiale sans prendre le recul suffisant qui aurait pu l’aider à clarifier la situation et à réaliser le caractère relatif de ses évaluations et représentations. Le compte rendu des entretiens, consignés dans son courrier au Procureur, relate essentiellement des citations sélectives des paroles des enfants interrogés et des éléments confiés par la mère. Il ne rend pas compte de l’élaboration par la psychologue de sa compréhension de la situation psychologique des différents protagonistes. Un tel manque de distance, d’impartialité et de discernement ne tient pas compte de l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus et des groupes ».

Quand il s’impose au professionnel, la rédaction d’un signalement en bonne et due forme, outre son aspect formel, doit inclure l’identification d’un objet et le numéro ADELI du psychologue qui le rédige, comme le précise l’article 20 du Code :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

Il peut s’adresser aux autorités compétentes en restant concis et circonstancié sur les circonstances du recueil des éléments qui orienteraient vers une suspicion ou des allégations rapportées. En outre, un signalement engage les responsabilités civiles et pénales de son rédacteur, comme le rappelle le Principe 3 du Code :

            Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

La Commission s’est interrogée sur l’existence d’une procédure interne au milieu scolaire sur ces situations de suspicion d’abus sexuels sur mineurs. De fait, il lui est apparu difficilement compréhensible la précipitation de la part de la psychologue à informer le Procureur de la République, sans avoir préalablement communiqué avec son institution par voie hiérarchique. Cette démarche prenait en effet le risque de court-circuiter l’évaluation déclenchée par le biais de l’assistante sociale auprès de la CRIP.

Comme indiqué dans l’article 19 déjà cité, la psychologue aurait pu prendre conseil auprès de collègues expérimentés. À cet égard, la Commission relève que la psychologue n’a pas estimé nécessaire de prendre contact avec la psychiatre qui suit l’enfant pour recueillir son avis et qu’elle s’en est tenue, là aussi, aux appréciations de la mère.

Par ailleurs, la Commission tient à préciser qu’elle ne peut se substituer à l’autorité administrative qui reste seule à pouvoir établir, voire sanctionner une éventuelle faute professionnelle de la psychologue.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-19

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie

Questions déontologiques associées :

– Respect de la personne
– Respect du but assigné
– Responsabilité professionnelle
– Impartialité
– Probité
– Mission

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter les deux points suivants :

  • Distinction des missions auprès des membres d’une même famille : but assigné, discernement et rigueur
  • Prise en charge d’un mineur dans un contexte de séparation parentale : respect des personnes et impartialité

1- Distinction des missions auprès des membres d’une même famille : but assigné, discernement et rigueur

Le Code de déontologie concerne chaque psychologue dans l’exercice de ses fonctions et l’usage de son titre, ceci en accord avec l’article premier du Code. Plus précisément, l’exercice de la psychothérapie, qui peut concerner également d’autres professions, constitue l’une des potentielles pratiques du psychologue, comme l’énonce l’article 3 du code de déontologie :

Article 1 : « Le psychologue exerce différentes fonctions à titre libéral, salarié du secteur public, associatif ou privé. Lorsque les activités du psychologue sont exercées du fait de sa qualification, le psychologue fait état de son titre. »

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. »

Ladite pratique requiert, comme tout autre intervention du psychologue, que celui-ci adapte ses méthodes de travail au cadre dans lequel il intervient et ce, en accord avec le but assigné à son intervention, tel que rappelé dans le Principe 6 :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans la situation présente, la demande initiale est celle d’un homme en souffrance adressée à une psychologue qui, en retour, lui propose une prise en charge individuelle. En acceptant d’accompagner le demandeur dans un travail de psychothérapie, la psychologue lui assure d’être ainsi en accord avec ses compétences, comme le veut le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. »

Il revient donc à chaque professionnel de savoir définir au mieux les limites de son espace d’intervention. En cela, si le cadre de prise en charge a évolué, après un an de travail individuel et à la demande du patient, vers une prise en charge du couple et ce, pendant quatre mois, la Commission considère que cela n’est en rien discutable si la psychologue pouvait faire état d’une compétence en la matière, comme le rappelle l’article 5 :

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

En revanche, la reprise d’un travail individuel avec le demandeur dès lors en parallèle d’un suivi engagé pareillement auprès de son épouse mérite d’être interrogé. En effet, il est acquis que la question méthodologique de l’implication de tout psychologue relève de la responsabilité de celui-ci, comme le stipule le Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Mais il n’en demeure pas moins que l’existence de deux espaces thérapeutiques définis par une même professionnelle auprès de deux personnes entretenant un lien d’intimité a de quoi surprendre. Ce positionnement semble même avoir fait fi de la rigueur introduite dans le Principe 4 :

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »

La Commission s’est interrogée sur ce qui aura guidé la réflexion de cette psychologue pour prendre le risque d’induire une telle confusion potentielle des espaces. Elle tient à cet égard à rappeler la mission fondamentale du psychologue définie dans l’article 2 :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Ainsi s’est posé pour la Commission la question de savoir jusqu’à quel point cette mission fondamentale a pu être assurée dans la prise en charge individuelle des deux membres du couple.

2-Prise en charge d’un mineur dans un contexte de séparation parentale : respect des personnes et impartialité

Dans le cas où un psychologue est sollicité par un des parents pour une prise en charge d’un mineur, il devrait intervenir en cohérence avec les obligations légales et de respecter les droits des détenteurs de l’autorité parentale, tels qu’il est mentionné dans l’article 11.

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. »

Qui plus est dans un contexte de séparation, le psychologue cherche à accueillir toute demande parentale avec discernement, prudence et impartialité comme l’y invite le Principe 2.

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Il s’assure que son intervention respecte les droits fondamentaux des personnes qu’il reçoit, en particulier leur autonomie et leur liberté de décision. Il favorise le cas échéant l’accès au professionnel de leur choix, selon le Principe 1.

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. […] »

Dans la situation soumise à la Commission, le demandeur précise que son ex-compagne l’avait préalablement informé de sa sollicitation pour leur fils de la même psychologue ayant reçu leur couple cinq ans plus tôt, à la fois individuellement et conjointement. Ce nouvel accompagnement, réalisé durant quatre séances auprès de l’adolescent, a conduit la psychologue à organiser un entretien réunissant les deux parents.

Le cadre d’intervention de cette psychologue a alors pu être fragilisé par le fait d’avoir été antérieurement impliquée, de manière différente, auprès des mêmes parents.  Ceci soulevant alors un risque de manquer de prudence et d’impartialité au regard de la demande parentale.

Par ailleurs, un psychologue mène son intervention en étant conscient des limites de son travail, tel que cela est notamment précisé dans l’article 25. En articulation avec l’article 6, il est préférable de favoriser une orientation vers un autre professionnel s’il estime ne pas pouvoir intervenir avec mesure, discernement et impartialité.

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Article 6 : « Quand des demandes ne relèvent pas de sa compétence, il oriente les personnes vers les professionnels susceptibles de répondre aux questions ou aux situations qui lui ont été soumises. »

Ici, faire appel à l’évaluation d’un autre professionnel aurait certainement permis aux parents de bénéficier d’une prise en charge et une analyse exclusivement centrées sur l’adolescent. Le demandeur souligne que son ex-femme, en présence de la psychologue, lui aurait indiqué que son fils « ne voulait a priori plus consulter ». Aucun élément ne vient préciser si la psychologue suivait encore la mère au moment où elle a accepté de recevoir l’adolescent. Mais la Commission s’est interrogée sur la façon dont le jeune avait pu investir son suivi, dans la mesure où il était réalisé par la psychologue qui avait également pris en charge ses parents ; et à quel point cela avait pu influencé son refus.

Tout ceci questionne enfin, selon le Principe 1 déjà cité, les précautions prises par cette psychologue afin d’évaluer directement auprès de lui, au regard de son âge et sa maturité, son désir de poursuivre un suivi psychologique avec un autre professionnel à distance de toute influence parentale.

 

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2019-04

Année de la demande : 2019

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Examen psychologique

Questions déontologiques associées :

– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Autonomie professionnelle
– Consentement éclairé
– Continuité de l’action professionnelle /d’un traitement psychologique
– Information sur la démarche professionnelle (Explicitation de la démarche aux usagers /clients ou patients (avant ou/ et en cours d’intervention), Information et accord sur les honoraires)
– Évaluation (Droit à contre-évaluation, Relativité des évaluations)
– Responsabilité professionnelle
– Transmission de données psychologiques (Compte rendu à l’intéressé, Compte rendu aux parents)

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Modalités et conditions d’exercice d’un psychologue exerçant en libéral : respect des personnes et responsabilités

Modalités et conditions d’exercice d’un psychologue exerçant en libéral : respect des personnes et responsabilités

L’exercice d’un psychologue en libéral doit répondre à un certain nombre d’obligations qui engagent sa responsabilité comme le Principe 1 du code de déontologie le stipule :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

S’il fixe librement ses honoraires, comme le rappelle l’article 28, aucune obligation déontologique ne lui impose de formaliser un contrat écrit avec ses patients :

Article 28 : « Le psychologue exerçant en libéral fixe librement ses honoraires, informe ses clients de leur montant dès le premier entretien et s’assure de leur accord. »

Le psychologue est néanmoins invité à expliciter son mode d’intervention, en fixer les modalités financières, et obtenir le consentement des intéressés, comme l’indique l’article 9 :

Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Dans la situation présente, et selon les documents transmis à la Commission, la psychologue semble avoir posé son cadre d’intervention auprès de cette famille en réservant aux parents un premier temps de consultation. Sollicitée pour « sa visibilité et sa disponibilité expresse » sur la durée restreinte des congés scolaires de fin d’année civile, il semble que celle-ci a veillé à apporter une réponse à la demande des parents.

C’est par ailleurs en toute autonomie que le psychologue choisit et applique ses méthodes et techniques, comme le pose le Principe 3 :      

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

La passation d’une batterie de tests sur toute une journée est apparue contraignante aux yeux des parents, même si, indiquent-ils, une pause méridienne a été respectée. Bien que la psychologue leur ait assuré de la bonne coopération de l’enfant pendant les épreuves, la prise en compte de sa fatigabilité aurait été souhaitable et en accord avec le respect de la dimension psychique qui figure au frontispice du Code et dans le Principe 4.

Frontispice

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Principe 4 : Rigueur

« Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »

La Commission note que la dégradation de la communication entre cette famille et la psychologue résulte de la grande frustration de n’avoir pu obtenir de restitution orale du bilan le jour prévu.

À ce sujet, le code de déontologie prend soin de rappeler l’importance de restituer de façon claire et respectueuse les résultats des investigations. Les articles 16 et 25 du Code sont à ce titre explicites :

Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés. »

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Dans le cas présent, la psychologue a choisi d’envoyer ses conclusions par courrier faute d’avoir pu rencontrer les parents lors d’un rendez-vous de restitution orale et suite à leur courrier de mise en demeure de restituer les honoraires perçus. Sur ce point, les éléments d’informations contradictoires apportés de part et d’autre, ne permettent pas de trancher sur l’existence de manquements déontologiques flagrants. Néanmoins, la Commission s’est interrogée sur le choix de l’envoi du compte-rendu écrit avec, semble-t-il, des résultats aux tests et leur analyse dont la lecture est apparue incompréhensible aux parents, alors même que ces derniers ont exprimé le souhait d’interrompre le processus de bilan.

Sachant que les parents ont refusé de revoir cette psychologue et que ces résultats n’ont pu, de ce fait, être suivis d’une explicitation orale, comme cela est d’usage dans le cadre d’un bilan, il apparait que la psychologue s’est trouvée contrainte à ne pas accompagner ses conclusions écrites, ce qui a provoqué la réaction de ces parents.

Dans une telle situation conflictuelle, la psychologue aurait pu s’appuyer sur les articles 22 et 14 du Code, en actant la rupture de confiance de ses clients, tout en leur suggérant la possibilité de réaliser une contre évaluation :

Article 22 : « Dans le cas où le psychologue est empêché ou prévoit d’interrompre son activité, il prend, avec l’accord des personnes concernées, les mesures appropriées pour que la continuité de son action professionnelle puisse être assurée. »

Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation. »

En conclusion, la Commission tient à souligner l’importance de veiller à respecter toutes les étapes d’un bilan, des premiers entretiens à la restitution des résultats, dans l’intérêt supérieur de l’intéressé.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-17

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Rapport d’enquête

Questions déontologiques associées :

– Code de déontologie (Finalité)
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Responsabilité professionnelle
– Respect du but assigné

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  1. Réalisation d’enquêtes sociales et déontologie du psychologue
  2. Le respect de la déontologie dans le cadre de la rédaction d’un écrit

Avant-propos

S’il n’est en rien l’apanage des psychologues au regard de leur formation principale, l’exercice de l’enquête sociale ne leur est pas non plus interdit. Cependant, cela requiert que les missions du psychologue engagé dans un tel dispositif soient clairement définies. C’est donc à ce titre que la Commission peut statuer sur le rapport à la déontologie d’un psychologue par rapport à sa profession, mais engagé dans un environnement qui ne lui est pas propre.

  1. Réalisation d’enquêtes sociales et déontologie du psychologue

L’exercice de l’enquête sociale nous invite à développer quelques points liminaires quant au lien qu’il entretient avec les règles de déontologie auxquelles se réfère le psychologue, comme l’indique le Préambule du Code :

Préambule

« Le présent Code de déontologie est destiné à servir de règle aux personnes titulaires du titre de psychologue, quels que soient leur mode et leur cadre d’exercice (…) »

Le psychologue peut être amené à œuvrer dans des contextes différents, à remplir des missions qui peuvent être très diversifiées. Ceci s’entend en conformité avec le Principe 2 du Code :

Principe 2 : Compétence

« […] Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. »

Un des outils possibles pour éclairer les décisions du JAF, l’enquête sociale nécessite des compétences dans le domaine social ou psychologique. Elle vise à explorer l’environnement d’un enfant et les impacts du premier sur le second. Néanmoins, la possibilité pour un psychologue d’œuvrer à la réalisation d’une procédure dont il n’a pas l’exclusivité nécessite au préalable qu’il ait défini le cadre de son intervention. Le Principe 3 du Code rappelle qu’il doit s’attacher à « distinguer et faire distinguer ses missions ». L’Article 9 précise quant à lui le fait qu’il se doit d’informer les personnes des limites de son intervention et qu’il s’assure de leur consentement éclairé :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« […] Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Article 9 : « […] Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

La méthodologie de l’enquête sociale impliquant la tenue d’entretiens avec les différents acteurs impliqués dans le processus d’évaluation, le psychologue aura pour sa part à tenir compte de l’article 2 du code de déontologie :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Dans la situation présente, la psychologue désignée avait donc toute légitimité pour procéder à l’exercice de l’enquête sociale demandée par le JAF et ce, en étant en conformité avec les règles de déontologie posées par la profession de psychologue.

  1. Le respect de la déontologie dans le cadre de la rédaction d’un écrit

Le psychologue est responsable de ses écrits, ceux-ci ayant un impact sur les personnes concernées. Les mots ont un poids et une importance qui ne peuvent lui échapper. Un écrit constituant un document qui fait trace, il est nécessaire en conséquence que le psychologue se pose la question de savoir quel est le but de cet écrit, à qui il s’adresse, à qui il est destiné. Le Principe 6 synthétise cette démarche.

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Le motif de l’intervention de la psychologue était de renseigner une enquête sociale à partir de questions précises émises par le JAF. A la lecture du contenu destiné au Juge, la Commission a eu à s’interroger sur la pertinence de la démarche rédactionnelle proposée par la psychologue. En effet, loin de se limiter au seul exercice de transmission de conclusions argumentées, cette professionnelle a reproduit sur vingt-neuf pages les dires, quasiment mot à mot, de ses interlocuteurs.

La Commission s’est demandée dans quelle mesure l’accumulation des feuillets a pu parasiter la compréhension des réponses aux questions formulées par le Juge. La psychologue aurait dû limiter son rapport à la conclusion figurant dans les dix dernières lignes, celles-ci résumant précisément l’état des lieux et faisant une analyse assez claire de la situation de cette famille.

Par ailleurs, le père de l‘enfant conteste la méthode employée par la psychologue pour mener son « enquête ». Or, cette dernière semble avoir choisi « ses outils » en toute autonomie, ce que lui accorde le Principe 3 du Code.

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix, des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. … »

A la lecture des documents joints, le père n’a semble-t-il pas pu entendre la psychologue expliquer le sens, les objectifs de sa mission et les moyens mis en œuvre. En cela, elle semble avoir manqué de prudence, ce qui l’expose au reproche du père quant à une possible partialité. Le Principe 2 déjà évoqué plus haut rappelle la vigilance dont le psychologue doit faire preuve dans de telles situations.

Principe 2 : Compétence

« …Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Le demandeur fait également état de sa surprise sur la façon dont la psychologue retranscrit les propos tenus sur la vie du couple et sur d’autres sujets personnels sans prendre en compte la présence de l’enfant. La Commission rappelle le contexte de l’exercice de la psychologue : celle de répondre aux questions du juge et à elles seules. La psychologue avait ainsi à rapporter dans ses conclusions ce qu’elle jugeait essentiel de transmettre et se devait de mentionner le fait que la présence de l’enfant était requise par le juge, fin de rester en adéquation avec l’Article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaires. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Avant de conclure, une remarque de fond est à émettre dans la mesure où c’est une psychologue qui a été mandatée pour répondre aux questions dans le cadre d’une enquête sociale. Rien ne l’oblige à signer son rapport sous la qualité de psychologue. Elle aurait donc pu ne retenir que sa qualité d’enquêtrice, et choisir de signer son écrit sous cette seule identité professionnelle. Cependant, la spécificité de son approche en tant que psychologue, peut constituer un atout dans l’analyse de contextes conflictuels.

 

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-24

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Impartialité
– Responsabilité professionnelle
– Consentement éclairé
– Respect du but assigné
– Secret professionnel (Obligation du respect du secret professionnel)

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des deux points suivants :

  • But assigné, secret professionnel et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale.
  • Autonomie et responsabilités du psychologue dans la conduite de son dispositif d’intervention.

 1- But assigné, secret professionnel et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale.

Dans un contexte de séparation parentale, l’intervention d’un psychologue auprès d’un mineur dont les parents se disputent les droits de visite et d’hébergement est particulièrement délicate. Elle implique une relation respectueuse avec l’enfant, mais aussi la reconnaissance de la place des deux parents, comme le Préambule du Code le mentionne :

Préambule :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues ».

En ce qui concerne les mineurs, ces aspects sont renforcés par la préconisation du recueil de l’accord des deux parents, inclus dans l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux ».

Outre le consentement des deux parents, l’article 11 vise au traitement équitable des deux parents. La non-observance de cette recommandation fait courir au psychologue le risque d’être pris dans des conflits parentaux et de ne pas en protéger l’enfant qu’il reçoit. Or, dans la situation présente, le psychologue a mis quelques mois avant de répondre aux sollicitations du père, tout en recevant la mère.

Par ailleurs, le psychologue doit respecter la vie privée, comme l’indique le Principe 1. Il ne peut transmettre des informations recueillies dans un cadre confidentiel que dans des circonstances particulières définies dans la loi. D’une manière générale, le respect du secret professionnel, rappelé dans l’article 7 du Code, s’impose, à l’exception des situations prévues par la loi et relevant de la protection des personnes.

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par la législation nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. […] Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. […] »

Article 7 : « Les obligations concernant le secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice ».

Dans la situation présente, le psychologue a décidé de rédiger un compte rendu du suivi psychologique de l’enfant. Deux documents sont transmis aux parents de son patient le même jour : le compte-rendu puis un complément écrit à la demande du père « se sentant lésé » par l’omission d’éléments dans le premier document. Pour aucun des deux écrits n’est précisé le (les) destinataire(s). L’objectif du psychologue, énoncé dès les premières lignes du compte rendu est de « rectifier » une erreur commise dans un écrit antérieur à celui-ci. Il relate ensuite très précisément les différentes étapes de son cheminement avec l’enfant. Il rapporte également une entrevue entre le fils et le père qu’il a organisé par « visio-conférence » et son souci d’extraire l’enfant des conflits et des procédures.

Au vu de l’exploitation judiciaire qui s’en est suivie, la Commission a interrogé le positionnement de ce psychologue quant au respect du secret professionnel, dont l’objectif est de distinguer les espaces de parole de chacun. La référence au Principe 2 aurait pu l’inciter à plus de prudence :

Principe 2 : Compétence

[…] « Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il (le psychologue) fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ».

Par ailleurs, il convient de rappeler que le psychologue est tenu de respecter la cohérence entre le dispositif qu’il met en place et le motif initial de sa mission. Le Principe 6 précise que le psychologue ne saurait modifier son cadre d’intervention à d’autres fins que celles pour lesquelles il a été mis en place :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

Dans le cas présent, le motif initial des séances, tel que décrit dans le compte rendu, semble être l’accompagnement du jeune patient dans un contexte de divorce conflictuel.

 

2- Autonomie et responsabilités du psychologue dans la conduite de son dispositif d’intervention.

Après avoir évalué l’objectif de son intervention et délimité sa place et sa fonction dans un dispositif, le psychologue a toute latitude pour choisir ses méthodes, comme le définit l’article 3 qui s’inscrit dans le prolongement du Principe 3 :

            Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. »

S’agissant d’un mineur, l’article 9 est un repère pour délimiter le cadre de travail d’un psychologue et tenir compte des droits des parents :

  Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. »

Dans la situation présente, le psychologue s’est clairement positionné dans sa fonction de psychothérapeute d’un garçon, reconnu « en souffrance » par les deux parents. Il a donc mis en place des entretiens individuels avec son jeune patient.

Après plusieurs séances, et devant les multiples sollicitations du père, le psychologue a proposé une modalité de contact par « visioconférence » avec le père, au moment d’un entretien entre le psychologue et son jeune patient. Ce dispositif, rarement utilisé dans ces situations mais envisageable comme le mentionne l’article 27, a eu lieu quelques jours avant la rédaction du compte rendu.

Article 27 : « Le psychologue privilégie la rencontre effective sur toute autre forme de communication à distance et ce quelle que soit la technologie de communication employée. Le psychologue utilisant différents moyens télématiques (téléphone, ordinateur, messagerie instantanée, cybercaméra) et du fait de la nature virtuelle de la communication, explique la nature et les conditions de ses interventions, sa spécificité de psychologue et ses limites. »

La responsabilité du psychologue dans la décision de porter par écrit son évaluation reste alors pleine et entière.

À la lecture du compte rendu et des pièces jointes, la Commission a relevé que la mise en perspective des interprétations, évoquée à l’article 23, aurait tiré bénéfice de la prise en compte de l’article 25 qui invite à tenir compte des processus évolutifs des personnes.

Article 23 : « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques. »

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Ainsi, recevoir ce père dès le début de la consultation, dans le but de s’accorder avec lui sur les objectifs de la psychothérapie et lui en expliciter le mode d’intervention, aurait sans doute permis de prévenir les malentendus de part et d’autre, et ce, dans l’intérêt supérieur de l’enfant reçu en entretien.

Enfin, la Commission rappelle que le psychologue doit également chercher à discerner son implication personnelle dans les situations qu’il traite comme l’indique le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence : (…) de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Dans le cas présent, la Commission n’a relevé aucun élément majeur permettant de mettre en doute les compétences de ce praticien.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-23

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Rapport d’expertise judiciaire

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Impartialité
– Respect de la personne
– Respect du but assigné

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

La Commission se propose de traiter le point suivant :

  • Intervention du psychologue dans un cadre de contrainte : but assigné, prudence et discernement

Intervention du psychologue dans un cadre de contrainte : but assigné, prudence et discernement

Le psychologue peut être amené à intervenir dans divers domaines et avoir différentes missions. Quel que soit le cadre de la demande, le psychologue accepte les missions compatibles avec ses compétences.

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec sa fonction et ses compétences. »

La Commission a pu constater dans l’écrit rédigé par la psychologue que ses missions étaient clairement définies par le Juge et compatibles avec les compétences de tout psychologue.

Dans le cas d’une intervention ordonnée par un Juge, il s’agit d’un cadre de contrainte auquel les personnes entendues ne peuvent se soustraire. S’agissant du Code, l’article 12 éclaire le psychologue sur la conduite à tenir dans un tel contexte d’intervention :

Article 12 : Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet.

Lorsqu’il accepte de réaliser une d’intervention dans ce cadre, le psychologue se doit de réunir les conditions nécessaires d’une rencontre respectueuse de chacun, mais également de respecter le but assigné à sa mission, comme le précise le Principe 6 du Code :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par la psychologue répondent aux motifs de ses interventions et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans le cas présent, la psychologue indique au début de son rapport les missions énoncées par le Juge. Le but assigné semble non équivoque puisqu’il s’agit de réaliser un examen psychologique de l’enfant de quatre ans. Les questions du Juge portant sur l’enfant et la situation de révélation d’abus sexuels, la psychologue devait alors formuler ses conclusions au regard de cette demande et ne pas procéder à une évaluation de la mère.

Par ailleurs, quel que soit le cadre, le psychologue engage sa responsabilité dans le choix de la méthode d’intervention, comme le précise le Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. »

Pour réaliser ses missions, le psychologue peut utiliser une diversité de méthodes. L’article 3 fait état des différentes pratiques des psychologues et le Principe 2 des fondements nécessaires à l’évaluation des personnes. Ainsi, du fait de leurs compétences, les psychologues disposent d’une diversité d’outils qu’ils définissent selon le cadre et l’objectif de leur intervention.

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. »

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence :

– de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par la loi relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ;

– de la réactualisation régulière de ses connaissances ;

– de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. »

Dans le cas présent, alors que toute latitude était donnée à la psychologue dans le choix de ses outils pour mener cette mission (par exemple, usage de tests de personnalité adaptés aux enfants), et sachant que son écrit s’intitule « examen psychologique de [l’enfant] », la psychologue n’en utilise aucun pour fonder ses observations et conclusions. Il apparait plutôt à la lecture de la pièce jointe par la demandeuse, que la psychologue donne seulement son ressenti en réponse aux questions du Juge, quant à l’impact des éventuels abus sexuels sur la personnalité de l’enfant, son équilibre psychique et « son degré de connaissance et de maturité en matière sexuelle ». La Commission regrette que la psychologue, dans son écrit, ait fondé son argumentation sur une série de réponses banalisées sans s’appuyer sur des fondements théoriques ou scientifiques qui auraient pu étayer la compréhension. La psychologue, par le manque d’étayage de son évaluation et d’analyse de la situation, s’expose à livrer un écrit pouvant avoir une incidence préjudiciable à l’enfant.

Par ailleurs, comme l’indiquent les articles 23 et 25, outre la réflexion sur le choix de sa méthode et des outils, le psychologue se doit de mener une réflexion critique quant aux techniques et aux conclusions qu’il formule. Ceci lui permet de prendre le recul nécessaire à la compréhension de chaque situation.

Article 23 : La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques.

Article 25 : Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes.

À la lecture du rapport, la Commission constate que la psychologue affirme l’ensemble de ses conclusions sans les mettre en perspective. Dès le début de son écrit, celle-ci indique un diagnostic de pathologie mentale concernant la mère sans évoquer les éléments qui l’ont conduit à le réaliser. Le diagnostic semble des plus hâtifs et réducteurs. Bien que cela ne soit pas le but de la rencontre, si la psychologue estimait nécessaire de mentionner des éléments concernant la mère, dans l’intérêt de l’enfant, elle aurait dû les expliciter davantage et les rendre plus compréhensibles aux lecteurs du rapport, comme l’article 16 l’indique.

Article 16 : Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés.

En outre, la psychologue aurait pu faire preuve d’une plus grande prudence et impartialité dans la rédaction de son rapport comme l’y invite le Principe 2 et l’article 17 du Code.

Principe 2 : Compétence

 « Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Dans ce contexte de conflit parental, la psychologue manque donc particulièrement de prudence lorsqu’elle mentionne, sans prendre de recul, son opinion quant au mode de résidence le plus favorable à l’enfant et son diagnostic concernant la mère. En plus du manque de prudence, ceci l’expose au reproche de partialité et de manque de traitement équitable des parties.

Ainsi, la Commission note que l’argumentaire essentiel de la psychologue induit, délibérément et sans nuance, une décision en faveur d’une résidence chez le père sans tenir compte de l’objet de la demande du Juge. Elle va alors à l’encontre du Principe 1 du Code.

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes…sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. …Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même.

Pour conclure, la Commission, attentive à la reconnaissance de la profession, s’attache à favoriser l’appropriation du code de déontologie aux fins de protéger le public des mésusages de la psychologie. Prenant en compte la complexité de chaque situation qui peut leur être soumise, elle encourage alors les psychologues à participer à des groupes de supervision ou de réflexion sur leurs pratiques.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-25

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Code de déontologie
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle du psychologue)
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Impartialité
– Respect du but assigné

AVIS 

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Nature des écrits rédigés par les psychologues 
  • But assigné et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale
  • Nature des écrits rédigés par les psychologues

Le psychologue peut être amené à rédiger divers documents tels que ceux dénommés « attestations », « comptes rendus », « courriers » ou bien encore « expertises ». Quel que soit son cadre d’exercice, ces écrits engagent sa responsabilité professionnelle, comme l’indique le Principe 3 du code de déontologie :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Une attestation a pour but de certifier qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Ce type de document est toujours remis en main propre à la personne qui le demande et porte généralement la mention  « pour faire valoir ce que de droit ». Quelle qu’en soit la dénomination, l’écrit d’un psychologue doit par ailleurs répondre à quelques règles énoncées dans l’article 20.

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »

Dans un divorce, quand un psychologue reçoit un des membres du couple et qu’il accepte de rédiger un écrit à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction et prendre en considération la diffusion potentielle de son texte, comme le rappelle l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ».

Après lecture du document dénommé « attestation », la Commission relève le fait que le document est globalement conforme à ce type d’écrit. La psychologue indique le motif initial des consultations formulé par sa patiente. Elle ne tire pas, dans son écrit, de conclusions hâtives sur le demandeur ou sa patiente, fait état des contacts téléphoniques qu’elle aurait eu avec le demandeur pendant le suivi de son ex-épouse.

Par ailleurs, le demandeur conteste le fait qu’il soit produit à des fins judiciaires, puisque la justice n’avait pas saisi la psychologue. Le Principe 3, déjà cité, indique que le psychologue a toute latitude pour formuler un avis sur une situation qu’il a pu examiner. La psychologue pouvait donc réaliser le document suite à la demande de sa patiente, les psychologues n’observant pas les mêmes règles que les médecins et n’ayant pas d’Ordre pour réguler la profession.

  • But assigné et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale

Toute personne accueillie par un psychologue doit pouvoir espérer l’être dans le cadre d’une relation respectueuse. Cela suppose alors de se conformer à ce qu’inscrit le Code dans son Préambule :

      Préambule :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues ».

Cela vaut aussi bien dans le cadre d’une rencontre individuelle que dans celui d’une consultation avec un couple. La non-observance de ce principe ferait courir au psychologue le risque d’être pris dans des conflits dont il ne saurait complètement se défaire.

Dans la situation présente, rien ne permet de savoir précisément si la psychologue a été ou non défaillante en la matière, l’attestation produite respectant les principes déontologiques. Le demandeur n’a pas porté à la connaissance de la Commission des éléments spécifiques permettant de discuter cette question.

Par ailleurs, tout psychologue doit observer un devoir de prudence lors de toute transmission, orale ou manuscrite, comme indiqué dans le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Selon le demandeur, un diagnostic psychopathologique a été formulé par téléphone, à son endroit, après une unique consultation. La Commission n’est pas en mesure d’émettre un avis sur ce point précis, puisque le document écrit ne fait pas état d’un diagnostic et ne peut donc que rappeler que la prudence et l’impartialité doivent être observées quel que soit le mode de communication établi avec le psychologue.

Il relève également de la responsabilité du psychologue de savoir délimiter son cadre d’intervention et choisir ses méthodes comme le rappelle l’article 3 :

Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien ».

Le psychologue se doit aussi d’adapter ses méthodes à ses objectifs, en cohérence avec le but assigné à sa mission, ceci en conformité avec le Principe 6 :

  Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

La Commission s’est donc interrogée quant au fait que la psychologue ait pu proposer d’assurer en même temps le suivi individuel du demandeur et celui de sa femme, en parallèle d’un accompagnement du couple, risquant alors d’introduire une confusion des espaces propres à chacun et des doutes quant à la confidentialité des propos. Néanmoins, ce risque a, de fait, été écarté par le refus du demandeur de poursuivre les entretiens avec cette psychologue. La psychologue a alors, semble-t-il, poursuivi les séances avec l’ex-épouse du demandeur tout en garantissant la confidentialité des propos tenus par sa patiente. Rien alors dans le dossier ne peut alerter la Commission sur un non-respect de la déontologie de nature à remettre en question la pratique de cette psychologue.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.