Avis CNCDP 2021-37

Année de la demande : 2021

Demandeur :
Particulier (Tiers)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Discernement
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Impartialité
– Secret professionnel

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure prudhommale.

 

Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure prudhommale.

La complexité des circonstances particulières des conflits au travail ne peut qu’inciter le psychologue à une grande prudence, mesure et impartialité comme l’indique le Principe 4 :

Principe 4 : Compétence

« La·le psychologue tient sa compétence :

– de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par l’article 44 de la loi du 25 juillet 1985 modifiée, relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ;

– de l’actualisation régulière de ses connaissances ;

– de sa formation à discerner son implication personnelle dans l’approche et la compréhension d’autrui.

Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Elle·il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité déontologique de refuser toute intervention lorsqu’elle·il sait ne pas avoir les compétences requises. Quels que soient le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, elle·il agit avec prudence, mesure, discernement et impartialité. »

 

Par ailleurs, dans le cadre de sa pratique, le psychologue peut être amené à rédiger des documents de diverses natures, de sa propre initiative ou à la demande d’un tiers. Chaque écrit qu’il produit relève d’un acte professionnel qui engage sa responsabilité comme le précise le Principe 5 :

Principe 5 : Responsabilité et autonomie professionnelle

« Dans le cadre de sa compétence professionnelle et de la nature de ses fonctions, la·le psychologue est responsable, en toute autonomie, du choix et de l’application de ses modes d’intervention, des méthodes ou techniques qu’elle·il conçoit et met en œuvre, ainsi que des avis qu’elle·il formule.

Elle·il défend la nécessité de cette autonomie professionnelle inhérente à l’exercice de sa profession notamment auprès des usagers, employeurs ou donneurs d’ordre. Au préalable et jusqu’au terme de la réalisation de ses missions, elle·il est attentif·ve à l’adéquation entre celles-ci et ses compétences professionnelles. Elle·il peut exercer différentes missions et fonctions. Il est de sa responsabilité de les distinguer et de faire distinguer leur cadre respectif. »

 

L’écrit transmis à la Commission, contient la plupart des éléments recommandés par l’Article 18 :

Article 18 : « Les documents émanant d’un·e psychologue sont datés, portent son identité, son titre, son numéro d’inscription sur les registres légaux en vigueur, ses coordonnées professionnelles, sa signature ainsi que la·le destinataire et l’objet de son écrit. Seul la·le psychologue auteur·e de ces documents est habilité·e à les signer, les modifier, ou les annuler. Elle·il fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

 

Ce document n’indique pas d’objet mais est défini comme une « attestation ». Il y figure la mention « remis à … pour valoir ce que de droit » indiquant que l’écrit peut être remis à un tiers et vaut comme mention de destinataire.

Cette « attestation » s’apparente à une expertise destinée à établir l’existence d’un lien entre l’état actuel de la personne suivie par la psychologue et ce qui serait survenu dans son contexte professionnel.

La rédaction au présent narratif de ce document apporte une dimension factuelle et donne des informations très précises sur, d’une part le contexte de travail et d’autre part la symptomatologie présentée par la patiente avant et pendant la prise en charge. Cependant, le lien de causalité qui est suggéré puis clairement énoncé entre la dégradation de l’état psychologique de la salariée et les évolutions du contexte de travail pourrait être amené avec davantage de mesure. Cela aurait gagné en clarté en indiquant que toutes les informations dont la psychologue fait état ne reposaient que sur les dires de la patiente. La professionnelle aurait ainsi pu s’adosser à l’Article 13 qui enjoint de faire preuve de plus de réserve quand il s’agit de situations sur lesquelles on ne peut porter qu’un avis :

Article 13 : « L’évaluation relative aux personnes ne peut se réaliser que si la·le psychologue les a elle·lui-même rencontrées. La·le psychologue peut s’autoriser à donner un avis prudent et circonstancié dans certaines situations, sans que celui-ci ait valeur d’évaluation.»

 

Quelle que soit la cohérence possible des symptômes présentés par la personne avec les faits qui sont supposés en être à l’origine, la Commission rappelle la prudence nécessaire que recommande le Principe 4 précité, et sur laquelle le Principe 3 et l’article 15 insistent, notamment pour les conclusions transmises à un tiers :

Principe 3 : Intégrité et probité

« En toutes circonstances, la·le psychologue respecte les principes éthiques, les valeurs d’intégrité et de probité inhérents à l’exercice de sa profession. Elle·il a pour obligation de ne pas exploiter une relation professionnelle à des fins personnelles, religieuses, sectaires, politiques, ou en vue de tout autre intérêt idéologique. Elle·il prend en considération les utilisations qui pourraient être faites de ses interventions et de ses écrits par des tiers. »

 

Article 15 : « La·le psychologue présente ses conclusions de façon claire et adaptée à la personne concernée. Celles-ci répondent avec prudence et discernement à la demande ou à la question posée. Lorsque ces conclusions sont transmises à un tiers, elles ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. L’assentiment de la personne concernée ou son information préalable est requis. »

 

À la différence des affirmations sur les effets « délétères » du contexte de travail sur la salariée, les hypothèses émises par la psychologue à la fin du document sur le travail possible de réhabilitation de sa patiente respectent pleinement l’Article 22 :

Article 22 : « La·le psychologue est averti·e du caractère relatif de ses évaluations et interprétations et elle·il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Elle·il émet des conclusions contextualisées et non réductrices concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

 

Ici, la psychologue a estimé que son engagement dans une mission de soutien psychothérapique au long cours était compatible avec une mission d’évaluation des effets du contexte de travail sur sa patiente. La Commission rappelle l’utilité de s’appuyer sur l’article 5 du Code pour orienter un patient ou faire appel à d’autres professionnels si nécessaire.

Article 5 : « En toutes circonstances, la·le psychologue fait preuve de mesure, de discernement et d’impartialité. La·le psychologue accepte les missions qu’elle·il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences dans le respect du présent Code. Si elle·il l’estime utile, elle·il peut orienter les personnes ou faire appel à d’autres professionnels.»

 

Pour la CNCDP

 Le Président,

Antony CHAUFTON

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2015-17

Année de la demande : 2015

Demandeur :
Particulier (Usager / Client)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
– Évaluation (Droit à contre-évaluation)
– Transmission de données psychologiques (Compte rendu à l’intéressé)

Au vu de la situation exposée et des différentes questions posées, la Commission se propose de traiter les points suivants :

1. Missions du psychologue et autonomie technique,

2. Les aspects déontologiques relatifs aux écrits psychologiques destinés à être transmis.

1. Missions du psychologue et autonomie technique.

            Une demande d’évaluation psychologique dans le cadre d’une expertise médicale s’effectue à la demande du médecin expert. Ici, l’évaluation a eu lieu au sein de la structure hospitalière où le médecin et le psychologue exercent leur activité professionnelle. Ceci n’empêche cependant pas que le psychologue conserve son autonomie et sa responsabilité car s’il est lié professionnellement au médecin demandeur, il ne l’est pas dans un lien de subordination. 

Article 4 : Qu’il travaille seul ou en équipe, le psychologue fait respecter la spécificité de sa démarche et de ses méthodes. Il respecte celles des autres professionnels.

Principe 3 : […] Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule.

            Cette autonomie et cette responsabilité sont des garanties de sa liberté dans la rédaction de ses écrits mais aussi dans le choix d’acceptation de ses missions. Avant de s’engager dans une demande d’expertise, le psychologue doit s’informer du cadre de son intervention et du devenir de son écrit. Cela conditionne les précautions qu’il sera amené à prendre dans la rédaction et la transmission de ses écrits.

Principe 6 : […] En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations possibles qui pourraient en être faites par des tiers.

Principe 2 : […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité.

Article 5 : Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences.

La confidentialité des données et des échanges est une des règles essentielles à laquelle doit veiller le psychologue. Ce qui lui est dit est de l’ordre de l’intime, et comme l’y invite l’article 21, il doit prendre toutes les précautions pour réunir les conditions nécessaires au respect de la confidentialité de ce qui lui est confié. Ces conditions passent notamment par un environnement matériel satisfaisant.

Article 21 : Le psychologue doit pouvoir disposer sur le lieu de son exercice professionnel d’une installation convenable, de locaux adéquats pour préserver la confidentialité, de moyens techniques suffisants en rapport avec la nature de ses actes professionnels et des personnes qui le consultent.

Dans la situation présentée, l’évaluation a semble-t-il été réalisée sur le lieu d’exercice professionnel du psychologue, et si celui-ci est dans le même centre hospitalier que le médecin expert demandeur, rien ne dit que ce lieu n’était pas propice à la garantie de la confidentialité.

2. Les aspects déontologiques relatifs aux écrits psychologiques destinés à être transmis.

Dans l’exercice de son activité, le psychologue peut être amené à produire des écrits. Afin de bien en identifier la nature, la provenance et l’objet, il doit faire mention d’un certain nombre d’indications comme en fait état l’article 20 :

Article 20 : Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature.

Rappelons que le numéro ADELI (Automatisation Des Listes) permet aux usagers, clients ou patients de vérifier la qualification professionnelle du psychologue. L’hôpital, en tant qu’employeur en est garant.

Il arrive qu’un écrit soit remis à la personne qui consulte, mais aussi transmis à des tiers. Dans ce cas, la transmission se fait sinon avec l’accord de l’intéressé du moins en l’informant comme l’indique le Principe 6 déjà cité et l’article 17.

Article 17 : La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci.

            Par ailleurs, la demandeuse s’interroge sur la modification de l’évaluation psychologique par les experts. Effectivement, seul le psychologue peut modifier son document comme l’explicite l’article 20 :

Article 20 : […] Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique.

            Cependant, les écrits doivent, à l’instar de tout dispositif méthodologique mis en place par le psychologue, répondre aux objectifs définis dans le cadre de l’intervention. Il s’agit alors du respect du but assigné comme le préconise le Principe 6 du Code :

Principe 6 : Respect du but assigné

Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement.

Dans cette situation, l’expertise doit venir, à partir de questions précises, éclairer une instance dans le cadre d’une procédure afin de prendre une décision. Ici, l’évaluation psychologique a été sollicitée à des fins complémentaires dans le cadre d’une expertise médicale. Les dispositions en vigueur permettent donc à l’expert de décider ou non de l’utiliser. Le psychologue doit néanmoins s’attacher à rendre ses écrits les plus clairs et précis possibles. Ce rapport d’expertise fait mention d’examens complémentaires sans qu’il ne soit mentionné précisément lesquels.

En tout état de cause, la personne a droit à une contre évaluation.

Article 14 : Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation.

                                                                                                           

Pour la CNCDP

La Présidente

Catherine Martin

Avis CNCDP 2008-21

Année de la demande : 2008

Demandeur :
Psychologue (Secteur non précisé)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))
– Responsabilité professionnelle
– Secret professionnel (Compte rendu, écrit professionnel)
– Respect du but assigné

Dans la lettre du demandeur, il convient de distinguer les éléments qui relèvent du Code de Déontologie des Psychologues, de ceux qui relèvent de la procédure judiciaire.
Deux questions peuvent être ici traitées :
A)      Quelle forme doivent prendre les attestations produites par les psychologues ?
B)     Qu’en est-il du secret dans les écrits destinés à une procédure judiciaire ?

A)   La forme que doivent prendre les attestations produites par les psychologues

Tout professionnel peut établir une attestation à la demande d’une personne qui le consulte, attestation qui fait état d’une constatation établie dans le cadre de son exercice professionnel. L’article 14 du code précise : "Les documents émanant d’un psychologue (attestation, bilan, certificat, courrier, rapport, etc.) portent son nom, l’identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire. (…)"
Quant au contenu de cette attestation l’article 12 rappelle que : "le psychologue est seul responsable de ses conclusions."
Dans ce type d’attestation, le psychologue engage sa responsabilité professionnelle et sa probité. Ce type d’attestation porte généralement la mention « attestation remise à l’intéressé pour dire et faire valoir ce que de droit.

B) Qu’en est-il du secret dans les écrits communiqués lors d’une procédure judiciaire ?

Le code de déontologie dans son article 12 nous donne des indications quant à la façon dont un psychologue doit gérer ses comptes rendus notamment sur le plan de la confidentialité des données. La Commission estime que cet article s’applique à tous les écrits des psychologues, a fortiori aux attestations.
Article 12 : Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde, et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel. (…) Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire.

Enfin, le Titre 1/6 souligne à quel point le psychologue doit rester vigilant quant à l’utilisation qui peut être faite de ses écrits et ceci d’autant plus qu’il ne peut pas maîtriser cette utilisation : « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions et à eux seulement. Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers. »

 

Avis rendu le 10 janvier 2009
Pour la CNCDP
La Présidente
Anne Andronikof

 

Articles du code cités dans l’avis : articles 12, 14, Titre I,6.

Avis CNCDP 2012-14

Année de la demande : 2012

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Rapport d’expertise judiciaire

Questions déontologiques associées :

– Compétence professionnelle (Elaboration des données , mise en perspective théorique)
– Consentement éclairé
– Discernement
– Évaluation (Droit à contre-évaluation)
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Information sur la démarche professionnelle
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Respect de la loi commune
– Respect de la personne
– Responsabilité professionnelle
– Transmission de données psychologiques (Compte rendu à l’intéressé)

Comme il est expliqué dans l’avertissement ci-dessus, la CNCDP a pour mission de rendre des avis consultatifs sur des situations décrites par des demandeurs, à la lumière du code de déontologie des psychologues. De ce fait, elle n’a pas pour vocation d’apprécier la qualité des écrits d’un psychologue, ou de ses conclusions.

La Commission se propose d’aborder les points suivants :

  • Le cadre de la rencontre avec un psychologue lors d’une expertise psychologique et les règles déontologiques encadrant la rédaction du rapport

  • Le « droit » et le code de déontologie,

  • La possibilité d’une contre évaluation.

    1. 1. Le cadre de la rencontre avec un psychologue lors d’une expertise psychologique et les règles déontologiques encadrant la rédaction du rapport

Dans le cadre d’une expertise psychologique ordonnée par le juge, le psychologue est mandaté pour donner un éclairage au magistrat en vue de sa prise de décision, et ce principalement dans l’intérêt de l’enfant. L’expertise psychologique pose de facto des questions éthiques et déontologiques, du fait de son objectif, du contexte de la rencontre entre la personne et le psychologue, de ses contraintes et de son caractère imposé. Même dans ce contexte particulier, où la demande n’émane pas de la personne qui consulte, mais d’un tiers (en l’occurrence le JAF), le psychologue s’efforce d’établir une relation qui soit respectueuse de la dimension psychique de la personne. Le psychologue expert ne peut donc pas se soustraire à un questionnement déontologique.

Article 2 : La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. […]

L’intervention du psychologue expert est orientée de manière à réunir des éléments permettant de répondre aux questions posées par le magistrat. Toutefois, tout en tenant compte de cet impératif, il conduit son expertise en appliquant les recommandations de l’article 12 et du premier Principe du Code

:

Article 12: Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte (…) le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet.

Principe 1 : […] Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même.

Concernant ce premier Principe du Code, il ne s’agit pas forcément d’un préambule à donner de vive voix à la personne qui vient consulter un psychologue, mais d’une manière de procéder qui soit respectueuse de ce Principe.

Le psychologue doit préalablement définir le cadre de son intervention et expliquer de manière précise et explicite aux personnes qui le consultent les objectifs, les modalités, les limites de son intervention. Le psychologue mentionne aussi le fait qu’il soit requis pour un rapport d’expertise destiné au juge, et précise les modalités de rédaction et de restitution. Cela permet ensuite aux personnes de consentir ou non à l’entretien proposé par le psychologue, en toute connaissance de ce qui peut être fait de sa parole. C’est ce qu’indique l’article 9 du Code :

Article 9 : Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions.

De même, la fin de l’article 17 précise:

Article 17: […] La transmission [des conclusions du psychologue] à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci.

La rédaction d’un rapport d’expertise psychologique est une tâche délicate, dans le sens où le rapport tente de traduire des éléments subjectifs et intimes (la parole du sujet, son intimité psychique, ses relations avec des tiers (enfant, conjoint…) en un écrit qui se veut objectif et qui a vocation à être transmis à un représentant de la justice. Il convient donc pour le psychologue de faire preuve de prudence.

Principe 4: Rigueur: Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail.

Le psychologue a conscience de la relativité de ses évaluations et interprétations. Il doit donc être prudent dans l’élaboration de ses conclusions, et ce, d’autant plus que le rapport d’expertise psychologique est destiné à des personnes non spécialistes (en l’occurrence, le JAF). Ainsi le psychologue doit être clair et compréhensible dans ses propos, attentif aux termes techniques et aux formules utilisés. Ses limites tiennent autant aux outils utilisés pour l’évaluation, qu’au caractère variable et évolutif du comportement humain. Il ne doit donc pas émettre des conclusions qui soient à la fois réductrices de la complexité et de la singularité de la personne, et définitive concernant ses possibilités d’évolution.

Article 25: Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes.

Cette nécessaire prudence n’exclut pas la possibilité d’émettre un avis qui soit clair, argumenté et respectueux des personnes.

Enfin, l’article 17 du Code précise que lorsqu’un psychologue rédige un écrit qui est ensuite transmis à un tiers, comme en l’occurrence un rapport d’expertise psychologique transmis à un JAF, il convient de répondre aux questions posées par ce dernier, et de n’amener des éléments d’ordre psychologique, que si nécessaire.

Article 17: Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent des éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. […]

2. Le « droit » et le code de déontologie

La question de l’articulation entre les éléments réglementaires ou législatifs des pratiques professionnelles des psychologues et ceux du Code est souvent posée. Il convient ici de rappeler que la CNCDP est une instance consultative qui émet des avis et, en conséquence, ne se prononce pas au regard de la loi qui s’impose aux citoyens. Eu égard aux questions que soulève la demandeuse en termes de « droit  à… », la Commission ne peut que les traduire par référence au Code. Cependant, celui-ci fait état et rappelle les principes de droit qui organisent notamment la profession et l’exercice de psychologue, comme dans les principes 1 et 3 et l’article 24 :

Principe 1 : Respect des droits de la personne : Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection […].

Principe 3 : Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle […].

Article 24 : Le psychologue recueille, traite, classe, archive, conserve les informations et les données afférentes à son activité selon les dispositions légales et réglementaires en vigueur […].

Il n’appartient donc pas à la Commission d’établir des arbitrages ou des jugements sur les situations amenées. Indépendamment, toute personne peut saisir la juridiction de son choix afin de faire reconnaître ce qu’elle estime être un préjudice, une infraction envers elle-même ou à des fins de protection des intérêts des individus en société.

  1. La possibilité d’une contre évaluation

Les éléments de l’expertise psychologique notés par la demandeuse tendent à montrer qu’elle en conteste les fondements psychologiques et les modalités de rédaction. S’il appartient au psychologue de choisir les modes d’intervention répondant aux motifs de ses interventions, conformément au principe de rigueur (principe 4), il lui incombe d’informer les personnes de leur droit à demander une contre évaluation. Il appartiendra ensuite à la personne concernée de la verser ou non à son dossier juridique.

Article 14 : Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation.

Pour la CNCDP

La Présidente

Claire SILVESTRE-TOUSSAINT

Avis CNCDP 1998-11

Année de la demande : 1998

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie

Questions déontologiques associées :

– Usage abusif de la psychologie
– Abus de pouvoir (Abus de position)
– Code de déontologie (Statut du Code, finalité, légalisation, limites)
– Responsabilité professionnelle
– Respect de la personne

1. La Commission ne peut se prononcer sur des pratiques professionnelles que si celles ci émanent de personnes qui peuvent réellement se prévaloir du titre de psychologue, (cf. préambule au présent avis). Dans le cas présenté, le demandeur devrait s’assurer que Madame R. est bien psychologue. Il peut, pour ce faire, poser la question au SNP à qui il s’est d’abord adressé dans cette affaire.
2. Quant à la relation de la psychologue avec madame D.
Les agissements de la psychologue, tels que décrits par Madame D., font apparaître une volonté d’influencer, de convaincre et un abus d’autorité sur autrui en contradiction avec les principes du Code de Déontologie énoncés dans le
Préambule « Le respect de la personne humaine dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues ».
Titre I-1. Sur le respect des droits de la personne : « (…) (Le psychologue) n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernée ».
Titre I-4. A propos de probité : « Le psychologue a un devoir de probité dans toutes ses relations professionnelles ; ce devoir fonde l’observance des règles déontologiques (…) »
Article 9 « Avant toute intervention, le psychologue informe (les personnes qui le consultent ) des modalités, des objectifs et des limites de son intervention ».
La conduite de Madame R. paraît en outre bien légère et irresponsable, dans les conseils donnés à Madame D. et à son fils et fort éloignée des recommandations de l’article suivant Article 19 « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence directe sur leur existence ».
3. Quant à la prescription et vente du produit dénommé « Fleurs de Bach »
Le psychologue qui n’est pas médecin, ne peut en aucun cas, se substituer à celui-ci en faisant une quelconque prescription. En tant que psychologue, il ne doit vendre aucun produit. En effet, le Code stipule dans son Article 5 « Le psychologue exerce dans les domaines liés à sa qualification (…). Il détermine l’indication et procède à la réalisation d’actes qui relèvent de sa compétence ».
On ne peut en aucune manière, assimiler la vente d’un produit à un acte psychologique.
4. Quant aux devoirs des psychologues Le terme « thérapie de l’esprit » ne renvoie à aucune pratique connue en psychologie, les termes « explication de l’aura », « thème astral » font référence à l’astrologie. Le recours à de telles pratiques est en complète contradiction avec le Code dans son
Titre I-5 « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explication raisonnée de leur fondement théorique et de leur construction ».
L’incitation à participer aux cours d’astrologie et aux réunions organisées par le mari de la psychologue contrevient aussi gravement au Code qui dit dans son
Article 11 « le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui ».
5. En matière de protection du public La Commission rappelle avec force la volonté des professionnels de protéger le public, cf. le Code dans son
Préambule « La finalité (du présent Code) est avant tout de protéger le public (…) contre les mésusages de la Psychologie et contre l’usage de méthodes et techniques se réclamant abusivement de la Psychologie ».
La Commission rappelle également que la responsabilité du psychologue est pleinement engagée dans tous ses actes professionnels : cf. le Code dans son Préambule « Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences de ses actions et avis professionnels ».

Conclusion

La conduite de Madame R. à l’égard de Madame D. et de son fils contrevient gravement aux règles les plus essentielles de la déontologie des psychologues. En aucun cas, en effet, l’action de Madame R. ne reconnaît le droit inaliénable de chacun au respect de sa personne.
Monsieur et Madame D., à travers les nombreuses démarches qu’ils ont entreprises, participent à la protection du public, et défendent le droit des usagers à des prestations de qualité, rigoureuses et respectueuses de la personne.

Fait à Paris, le 12 septembre 1998. Pour la CNCDP,
Claude NAVELET, Présidente

Avis CNCDP 1998-02

Année de la demande : 1998

Demandeur :
Psychologue (Secteur non précisé)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie

Questions déontologiques associées :

– Titre de psychologue
– Code de déontologie (Statut du Code, finalité, légalisation, limites)
– Abus de pouvoir (Abus de position)
– Compétence professionnelle (Qualité scientifique des actes psychologiques)
– Responsabilité professionnelle
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)

A. Quant à la question d’intervenir auprès de la psychologue
Rappelons que le Code de Déontologie s’adresse aux seuls psychologues porteurs du titre de psychologue tel qu’il est défini par la loi n°85 772 du 25 juillet 1985, publiée au JO du 26 juillet 1985.
Article 1 « Sont psychologues les personnes qui remplissent les conditions de qualification requises dans cette loi ».
L’association est donc en droit et même en devoir de s’assurer que la psychologue-psychothérapeute incriminée répond bien aux conditions de titre. Dans le cas contraire, elle serait dans la situation de déposer une plainte, car : article 1 « Toute forme d’usurpation du titre est passible de poursuites ».
La CNCDP rappelle d’autre part, qu’il est fait exigence aux signataires du présent Code de le faire respecter. Elle confirme au demandeur sa capacité à faire connaître la déontologie de la profession car Préambule « Les organisations professionnelles, signataires du présent Code, s’emploient à le faire connaître et respecter « . En effet « la finalité (du présent Code) est avant tout de protéger le public et les psychologues contre les mésusages de la psychologie et contre l’usage de méthodes et techniques se réclamant abusivement de la psychologie ».
L’association paraît en outre fondée à s’adresser à la psychologue incriminée en se référant à l’article 22 qui fait devoir au psychologue de « respecter les conceptions et les pratiques de ses collègues pour autant qu’elles ne contreviennent pas aux principes généraux du Code ; (ce qui) n’exclut pas la critique fondée ». L’association peut aussi faire référence aux Principes généraux du Code qui précisent Titre I pt. 5 « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée de leurs fondements théoriques et de leur construction. Toute évaluation ou tout résultat doit pouvoir faire l’objet d’un débat contradictoire des professionnels entre eux. »
C’est à la lumière de ces articles que la responsabilité de la psychologue en question peut et doit être interrogée car tout psychologue répond, bien sur,
Titre I pt. 3 « personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels ».
B. La psychologue a-t-elle respecté le code de déontologie ?
1. Dans le cas où les pratiques évoquées seraient avérées, nous pouvons dire qu’elles révèlent une méconnaissance de l’obligation faite au psychologue, dans les Principes Généraux du Code, de respecter le Titre I pt. 1 « droits fondamentaux des personnes et spécialement leur dignité et leur liberté« .
Il y a, par exemple, manquement au respect dû aux personnes quand la psychologue intervient directement dans la vie du patient, alors même que le Code nous rappelle que Article 11 « Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui« .
et que
Article 19 « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et de ses interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence directe sur leur existence« .
2. Les documents produits font état plus spécifiquement de pratiques qui ont à voir avec le secret professionnel, tel qu’énoncé dans l’article suivant Article 12 « Le psychologue présente ses conclusions de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel ».
Organiser des confrontations entre plusieurs personnes dont chacune serait son patient, donner à des tiers des informations sur le contenu des séances ou l’état de ses patients, intervenir directement dans la vie de ses patients, peuvent représenter autant de manquements à ce principe fondamental qui dit que « tout psychologue doit préserver la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel » (Titre I ), ce qui ne paraît pas le cas dans la situation présente.

Conclusion

L’association interpellée est une association professionnelle de psychologues. Sa responsabilité est de veiller à ce que les professionnels respectent le Code de Déontologie et de participer à la protection du public.
L’association à laquelle s’adresse la requérante est donc fondée à interroger les pratiques de la psychologue en cause au regard du respect dû aux personnes et du respect du secret professionnel.

Fait à Paris, le 3 juin 1998. Pour la CNCDP,
Claude NAVELET, Présidente

Avis CNCDP 1999-22

Année de la demande : 1999

Demandeur :
Psychologue (Secteur Médico-Social)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Procédure d’agrément

Questions déontologiques associées :

– Respect de la personne
– Responsabilité professionnelle
– Respect du but assigné
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Spécificité professionnelle
– Secret professionnel (Compte rendu, écrit professionnel)
– Mission (Distinction des missions)

Préalablement, la Commission rappelle qu’elle a pour mission de formuler, à la demande du public ou des professionnels concernés, un avis sur la conformité au Code de Déontologie des pratiques et des actes des psychologues légalement titrés, et tels qu’ils lui sont décrits.
En conséquence, les questions 1, 3, et 5 ne relèvent pas de la compétence de la commission.
La commission réfère les questions 2, 4 et 6 de la requérante à trois des principes généraux du code – Respect des droits de la personne :« Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le secret professionnel, y compris entre collègues ».
– Le principe de responsabilité : « Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Il s’attache à ce que ses interventions se conforment aux règles du présent code […] Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels ».
– Le respect du but assigné : « Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers ».
Dans la conclusion de son rapport, le psychologue assume ses responsabilités en formulant un avis motivé tout en restant dans son domaine de compétence car « Son activité porte sur la composante psychique des individus, considérés isolément ou collectivement » (extrait de l’article 3).
Son rapport n’est, en aucun cas, un rapport médical et aucun diagnostic n’apparaît dans ce rapport. La qualification, la compétence et la spécificité du psychologue sont garantis par la loi (loi n°85-772 du 25 juillet 1985 publiée au Journal officiel du 26 juillet 1985) et il appartient au psychologue de faire « respecter la spécificité de son exercice et de son autonomie technique » comme il se doit de respecter « celles des autres professionnels » (article 6 du code).
En ce qui concerne le rapport lui-même, la CNCDP n’a pas compétence à l’expertiser mais elle a pour objet d’émettre un avis sur sa conformité aux dispositions du Code.
Concernant « les écrits et le risque d’écrire », la Commission rappelle à la requérante les recommandations de l’article 12 qui précise que « Le psychologue est seul responsable de ses conclusions » mais qu’il « les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs de manière à préserver le secret professionnel » et « Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ».
La commission ne peut qu’insister sur la nécessaire prudence en cette matière. D’autre part, l’article 14 précise les conditions formelles de rédaction des documents émanant d’un psychologue.
En ce qui concerne l’avis de renouvellement d’agrément, la CNCDP, au regard de l’article 4 qui précise que le psychologue « peut remplir différentes missions qu’il distingue et fait distinguer », s’interroge sur la compatibilité entre les deux missions (suivi et évaluation) fixées par l’employeur, au psychologue, auprès d’une même personne.

Fait à Paris le 15 janvier 2000. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

Avis CNCDP 1999-14

Année de la demande : 1999

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie de groupe

Questions déontologiques associées :

– Consentement éclairé
– Respect de la loi commune
– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
– Respect du but assigné
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Abus de pouvoir (Abus de position)

Comme le rappelle le Préambule au présent avis, la CNCDP ne peut se prononcer que si la personne incriminée est effectivement psychologue. L’avis de la Commission ne peut donc être pris en considération que sous la réserve expresse que la psychothérapeute, qui se dit psychologue, le soit réellement.
1. Y a-t-il, dans la démarche exposée et dans le contrat proposé aux clients-patients, le respect de la personne et la garantie du libre arbitre de chacun ?
Un psychologue qui aurait de tels agissements (obliger tout client à payer d’avance et à s’engager, pour un an au minimum ; faire pression pour surseoir à l’arrêt demandé d’une thérapie, etc.) contreviendrait gravement à l’article 9 du Code qui préconise que « avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il les informe des modalités, des objectifs et des limites de son intervention « .
et au Titre I-1. qui précise que « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées ».
2. Le secret professionnel est-il sauvegardé et garanti à chacun dans le groupe ?
Une psychologue qui transmettrait à des tiers, des diagnostics concernant une autre personne serait en opposition avec le respect du secret professionnel tel que défini dans le Titre I-1. : « Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même ».
Le Code encourage, par ailleurs, dans le Titre I-6., le psychologue à se méfier de l’utilisation possible de ses dires par des tiers. : « Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers ».
Enfin, selon l’article 3 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur la composante psychique des individus, considérés isolément ou collectivement ». En révélant à un groupe, fut-il de thérapie, son évaluation sur une des personnes du groupe, la psychologue est en complète contradiction avec le Code.
3. Y a-t-il abus de pouvoir sur autrui ?
La Commission rappelle l’obligation qui est faite aux psychologues de ne pas user de leur position en terme d’abus de pouvoir. Les écrits de la thérapeute qui s’adresse à sa patiente avec des manifestations très affectives, sont, là encore, en contradiction avec le Code, cf. l’article 11 « Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui ».
4. La requérante peut-elle être poursuivie en justice parce qu’elle a eu recours à la CNCDP ?
La Commission rappelle qu’elle est une voie de recours consultatif possible. Le Code indique, en effet, dans son Préambule, que « sa finalité est avant tout de protéger le public et les psychologues contre les mésusages de la psychologie et contre l’usage abusif de méthodes et techniques se réclamant de la psychologie« . La requérante est donc totalement en accord avec ce texte en ayant sollicité la Commission.

Conclusion

La Commission dénonce de tels agissements comme contraires aux prescriptions du Code dans la mesure où ils constituent des entraves à la liberté individuelle et à l’autodétermination. Elle réaffirme le droit de chacun à avoir recours aux avis de la CNCDP.

Fait à Paris, le 13 novembre 1999. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

Avis CNCDP 2000-24

Année de la demande : 2000

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Diffusion de la psychologie
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Probité
– Titre de psychologue
– Compétence professionnelle (Formation (formation initiale, continue, spécialisation))
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Responsabilité professionnelle
– Respect du but assigné
– Abus de pouvoir (Abus de position)

La Commission ne donnera pas d’avis sur les deux premiers points d’ordre technique qui ne relèvent pas de sa compétence, même s’il s’agit de pratiques de personnes qui peuvent faire usage du titre de psychologue.
La question des modalités de paiement et celle des aspects éventuellement mensongers des promesses faites relèvent de la protection juridique des consommateurs et non de la Commission.
Par contre, les trois derniers points posent des interrogations d’ordre déontologique car des personnes, se prévalant du titre de psychologue, ont fait usage de ces documents dans un cadre dit « psychothérapique ».
1. Les exigences du « contrat thérapeutique »
Les règles de fonctionnement, précisées dans ces contrats qui sont soumis à l’avis de la Commission, vont à l’encontre du Titre I-4 , qui définit le principe de probité etfait devoir au psychologue « d’un effort continu pour préciser ses méthodes et définir ses buts ». Le Titre I-5 rappelle également l’exigence de qualité scientifique faite au psychologue : « les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explication raisonnée de leurs fondements théoriques et de leur construction ».
En assimilant tout arrêt de contrat thérapeutique aux conduites de dépendance à l’alcool, à la drogue, aux excitants, aux conduites de violence et d’incitation à la violence contre soi et les autres et aux abus sexuels, le psychologue contrevient à l’article 19 qui précise que « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence directe sur leur existence ».
2. La responsabilité de chaque usager vis à vis des autres participants aux groupes
C’est la responsabilité du psychologue que d’assumer les conséquences possibles des actes et des paroles qui émergent dans les groupes qu’il anime.
Ainsi, le Titre I-3 portant sur le principe de la responsabilitéprofessionnelle du psychologue indique que « Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle (…). Il répond personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels ».
Le Titre I-6 précise qu’il a le devoir « tout en construisant ses interventions dans le respect du but assigné » (…) de prendre en considération les utilisations possibles qui pourraient être faites par des tiers. ».
3. Recevoir simultanément ou successivement des personnes en suivi individuel et en thérapie de groupe
La filière établie entre thérapie individuelle et thérapie de groupe pourrait ouvrir la possibilité de pressions exercées par un psychologue qui, en situation de psychothérapie, abuserait de son pouvoir, ce qui serait en contradiction avec l’article 11 du Code qui stipule que « Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui (…) ».

Conclusion

Le contenu des documents fournis et les pratiques décrites par cette ex-patiente de psychologues font apparaître des manquements nombreux au Code de Déontologie. Il y a notamment non-respect des devoirs de probité et de qualité scientifique par des psychologues qui ne tiennent pas compte de leur responsabilité professionnelle, définie par le Code.
La Commission recommande plus que jamais aux psychologues qui proposeraient des thérapies de groupe ou des formations à des patients reçus auparavant dans des thérapies individuelles de bien différencier leurs missions et de veiller au respect des droits fondamentaux des personnes, leur dignité, leur liberté et leur consentement libre et éclairé.

Fait à Paris, le 18 novembre 2000. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

Avis CNCDP 2005-21

Année de la demande : 2005

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie

Questions déontologiques associées :

– Confidentialité (Confidentialité du contenu des entretiens/ des échanges)
– Responsabilité professionnelle
– Information sur la démarche professionnelle
– Respect de la personne

Concernant l’exercice professionnel des psychologues, la Commission retiendra les points suivants :
– Le respect du secret professionnel et ses conditions
– La responsabilité professionnelle du psychologue
– L’explicitation de la démarche professionnelle

1- Le respect du secret professionnel et ses conditions
Le Code rappelle l’obligation, pour un psychologue, d’assurer la confidentialité des échanges avec les personnes qu’il reçoit, que ce soit dans le cadre de son exercice professionnel ou dans des communications externes.
Titre I-1 « (…) Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel (…) » 
Article 15 « Le psychologue dispose sur le lieu de son exercice professionnel d’une installation convenable, de locaux adéquats pour permettre le respect du secret professionnel. »

2- La responsabilité professionnelle du psychologue
Titre I-3 : « Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Il s’attache à ce que ses interventions se conforment aux règles du présent Code. Dans le cadre de ses compétences professionnelles, le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu’il conçoit et met en œuvre. Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels. »
Ce qu’évoque la patiente comme une trop grande disponibilité du psychologue peut renvoyer éventuellement à un dispositif délibéré dans la pratique professionnelle. La Commission n’est pas en mesure de donner un avis sur sa pertinence dans le cas évoqué.
Il peut toutefois être de la responsabilité du psychologue d’analyser l’écart qui peut exister entre sa pratique et la compréhension qui en est faite par les patients, et d’expliciter le cadre thérapeutique qu’il propose.

3- L’explicitation de la démarche professionnelle
Selon la demandeuse, le psychologue n’a pas répondu à ses demandes d’expliciter la démarche qui le guidait, après les premiers incidents.
Le titre I-5 rappelle : « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée de leurs fondements théoriques et de leur construction. »
Article 12: « Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde, et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel. Les intéressés ont le droit d’obtenir un compte rendu compréhensible des évaluations les concernant. »

 

Fait à PARIS, le 24 février 2007
Pour la CNCDP
la Présidente
Anne Andronikof

 

Articles cités : Titre I-1, Titre I-3, Titre I-5, article 12, 15.