Avis CNCDP 2020-28

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Professionnel Non Pyschologue (Autre)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Impartialité
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter le point suivant :

  • Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire faisant suite à un conflit professionnel.

Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire faisant suite à un conflit professionnel.

Toute production d’écrit émanant d’un psychologue est censée répondre aux exigences du code de déontologie dans le but d’en éviter un possible mésusage. Il s’agit d’une tâche qui requiert la plus haute vigilance de sa part, tel que le stipule le Principe 2 :

Principe 2 : Compétence

« Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Dans ses fonctions, en vertu de ses champs de compétence, le psychologue peut émettre des avis sur des situations qui lui sont rapportées, comme l’article 13 le précise :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. »

A ce titre, la psychologue mise en cause pouvait s’autoriser à porter un avis sur la situation professionnelle de sa patiente. Dans les attestations soumises à la Commission, elle précise à plusieurs reprises transmettre ce que sa patiente « décrit », « signale », « met en relief ». Concernant le caractère relatif de ces écrits, on peut donc penser qu’elle s’est conformée à l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

Le psychologue est ainsi autonome et responsable des avis qu’il formule comme indiqué par le Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Dans les documents examinés par la Commission, certaines affirmations établissent un lien de cause(s) à effet(s) entre les conditions de travail largement décrites par la patiente et les symptômes de celle-ci. La psychologue se positionne donc en faveur d’une hypothèse de harcèlement. Sa décision de porter par écrit cette analyse, si elle peut s’interpréter comme un mouvement d’empathie envers la souffrance de la personne, ne constitue cependant pas, au regard de la Commission, une faute déontologique. Elle interroge le but que s’est assignée la psychologue, comme le décline le Principe 6, en acceptant alors d’intervenir dans le dossier soumis aux Prud’hommes :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

En ce sens, sur le plan formel, tout en respectant l’article 20, ces écrits auraient mérité plus de précisions quant à leur objet intitulé « Attestation d’accompagnement » :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

Une attestation ne comporte en effet que des éléments factuels, précisant quand et à quel rythme une personne a consulté. Elle précise éventuellement le professionnel ou l’organisme qui a adressé le patient.

Un compte-rendu d’accompagnement, ou une « note clinique d’observation » peuvent apporter des éléments diagnostiques, des hypothèses voire des interprétations. Ce type de document est remis dans le respect du secret professionnel, au sens du Principe 1 et de l’article 7, après avoir transmis le contenu au patient et éclairé son usage voire son destinataire :

Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

Ici, la psychologue a pris soin de souligner qu’elle intervient pour un « trouble anxiodépressif réactionnel diagnostiqué par le médecin ». Elle précisera dans sa seconde attestation qu’il s’agit d’un « épisode dépressif majeur réactionnel à la souffrance au travail diagnostiqué par son psychiatre ». Ceci laisse supposer que cette psychologue n’est pas à l’origine de l’hypothèse étiologique qui étaye son analyse.

Un « certificat » ou un « rapport d’expertise », quant à eux, sont des documents qui ont vocation à être exploités dans un cadre judiciaire et, à ce titre, ont à répondre strictement aux questions du commanditaire et à elles seules, dans le respect de l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. »

Ainsi l’usage que la patiente allait faire des deux attestations de sa psychologue ne pouvait être ignoré, comme la formule « pour faire valoir ce que de droit » l’atteste.

La Commission invite les psychologues à être plus rigoureux sur la forme, le contenu et les conséquences des écrits qu’ils acceptent de rédiger.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2020-10

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Professionnel Non Pyschologue (Avocat)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

– Discernement
– Évaluation (Relativité des évaluations)
– Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Aspects déontologiques relatifs à la rédaction d’une « attestation » produite dans le cadre d’une procédure judiciaire.

Aspects déontologiques relatifs à la rédaction d’une « attestation » produite dans le cadre d’une procédure judiciaire.

 

En préambule, la Commission tient à rappeler que les psychologues ne sont pas des professionnels para-médicaux. En ce sens, ils ne sont pas soumis aux principes posés par l’Ordre des médecins et ne peuvent donc être sanctionnés par ce dernier. Par ailleurs, si la profession de psychologue a été intégrée au Code de santé publique depuis 2016, ceci ne concerne que les psychologues qui exercent dans le cadre hospitalier et ce, à propos de certains aspects de leur pratique seulement. La Commission s’est néanmoins saisie de la demande en regard des règles déontologiques adoptées par la profession en mars 1996, actualisées en février 2012.

Toute intervention du psychologue comme la production d’un document écrit, doit faire preuve de prudence et de discernement tels que posés par le Principe 2 du Code :

Principe 2 : Compétence

 

« Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Ceci se complète, dans l’exercice de sa fonction, du fait de répondre personnellement de ses choix et actes engagés à titre professionnel, tel que le précise le Principe 3 :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

 

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Face à la demande de produire un écrit, se pose toujours la question de savoir non seulement de la part de qui provient cette demande, mais aussi l’objectif explicite voire implicite qui est visé. Dans le cas présent, la psychologue a été sollicitée par une personne pour une difficulté psychologique. La professionnelle a rédigé un document dont l’objet est mentionné comme suit : « attestation de prise en charge – facture acquittée ».

Une attestation a généralement pour but de certifier qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Il est d’usage que ce type de document soit remis en main propre à l’intéressé accompagné de la mention « pour faire valoir ce que de droit ». Un tel document doit également être établi en conformité avec ce que préconise l’article 20 :

Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »

Dans le cas présent, l’écrit de la psychologue, qui comporte le recensement de quatorze séances de « thérapie verbale », est rédigé à la date du dernier rendez-vous réalisé. Il ne souffre d’aucun défaut de respect des normes évoquées ci-dessus.

En revanche, même pour un document aussi formel qu’une attestation, qui plus est lorsqu’il a connaissance d’une procédure judiciaire, le psychologue, comme le rappelle le Principe 2, déjà cité, est invité à observer une démarche prudente et mesurée.

Dans son écrit, la psychologue a mis en avant que les entretiens « se situaient dans un contexte d’épuisement professionnel », notant par ailleurs qu’« après un arrêt cette démarche a été réitérée […] du fait d’un contexte professionnel à nouveau délétère pour » son patient. Ce sont des propos assumés, rendant compte du contexte présenté par son patient et de l’observation de son état psychique. Ces éléments semblent effectivement bien établis sur la base du discours de celui-ci, recueilli en séance, à partir duquel la psychologue a fondé son avis et son évaluation. En cela, ils respectent ce qu’édicte l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »

Néanmoins, la parole d’une personne reçue au cours de séances de psychothérapie doit s’entendre comme une construction subjective. Elle renvoie à ce que le patient pense de son état et de l’origine qu’il donne à son mal-être. Ceci doit être distingué de la réalité des faits relatés. Le psychologue doit pouvoir considérer les aspects subjectifs d’une situation tout en estimant, leur caractère relatif au vu du contexte présenté, en accord avec ce que propose l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Dans la situation présente, la psychologue a reçu à plusieurs reprises un homme qui, selon elle, était dans une souffrance qu’elle a jugée en lien avec ses conditions de travail. Si elle pouvait légitimement formuler cette idée, cela aurait pu rester au stade d’une hypothèse.

La Commission estime que cette psychologue aurait pu redoubler de prudence au moment de la rédaction de son écrit, en précisant le fait que le contexte décrit était basé sur les propos de son patient. Elle pouvait parallèlement rendre compte de sa propre conviction quant à la véracité des faits décrits sans toutefois les attester.

Plus généralement, la prudence rédactionnelle permet au psychologue de se prémunir du risque de mésusage de ses écrits quelle qu’en soit leur nature.

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2018-05

Année de la demande : 2018

Demandeur :
Professionnel Non Pyschologue (Autre)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :

Questions déontologiques associées :

– Respect du but assigné
– Respect de la personne
– Responsabilité professionnelle
– Autonomie professionnelle
– Impartialité

AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné.

Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.

 

La Commission se propose de traiter des points suivants :

  • Missions du psychologue, respects de la personne et du but assigné dans un contexte de souffrance au travail.
  • Prudence et impartialité du psychologue dans la rédaction d’un écrit

1- Missions du psychologue, respects de la personne et du but assigné dans un contexte de souffrance au travail

Le psychologue qui reçoit une personne, adressée par son médecin traitant, dans le cadre d’une consultation spécialisée dans le traitement de la souffrance au travail, doit adapter son intervention en reconnaissant pleinement cette personne dans sa dimension psychique, comme le lui enjoint le frontispice du code de déontologie :

« Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa   reconnaissance fonde l’action des psychologues »

Il doit respecter les fondements de cette mission en tenant compte du contexte de la demande et choisir ses méthodes en adéquation avec ses compétences comme le rappellent les articles 2 et 5 du Code :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. »

Il construit alors son intervention en ayant circonscrit le but assigné à sa mission comme le précise le Principe 6 :

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ».

Lorsque le psychologue reçoit une personne, il a nécessairement connaissance d’éléments relatifs à son intimité psychique, à sa vie privée et professionnelle. Les propos d’un patient sont constitués à la fois des évènements de vie et de leur retentissement subjectif. A partir de l’ensemble de ces éléments, le psychologue va émettre des hypothèses sur les liens qui peuvent être faits entre eux.

Dans le cas présent, la psychologue était fondée à recevoir cette personne dans le cadre de sa consultation spécialisée et à se former un avis comme l’y autorise l’article 13 du Code partiellement invoqué par le demandeur :

  Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. »

Le psychologue doit cependant veiller à ce que son évaluation ne conduise pas à des conclusions réductrices ou potentiellement définitives, il prend en compte les capacités d’évolution des personnes et doit être conscient, des incidences que ses conclusions peuvent éventuellement avoir sur les personnes elles-mêmes comme le précise l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

 2- Prudence et impartialité dans la rédaction d’un écrit

Il arrive que des patients demandent à leur psychologue de rédiger une attestation. Ces attestations se distinguent d’une expertise en ce qu’elles sont rédigées le plus souvent à la demande du patient et visent à rendre compte d’une situation ou d’une souffrance dans le but que celle-ci soit reconnue. En acceptant d’accéder à cette demande le psychologue doit spécifier dans sa rédaction si elle émane de sa propre analyse ou s’il s’agit de propos tenus par la personne qui le consulte, il engage ainsi sa responsabilité comme le formule le principe 3 du Code :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Comme il est précisé dans l’article 20 du Code, le psychologue doit également respecter certaines règles formelles en mentionnant dans son écrit  des éléments d’identification comme son appartenance institutionnelle, ses coordonnées professionnelles et son numéro ADELI :

Article 20 : «  Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature.(…) »

Dans le cas présent, le « certificat » comporte bien le nom, la fonction, les coordonnées professionnelles, l’objet de l’écrit et la signature de son auteur, mais ne comporte pas le n° ADELI de la psychologue qui l’a rédigé.

Dans l’éventualité d’une transmission de son écrit à des tiers, voire de son exploitation dans un cadre judiciaire, le psychologue doit observer la plus grande prudence dans sa rédaction, comme le rappelle l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. […] ».

Il doit faire preuve de rigueur et d’impartialité en préservant la vie privée et l’intimité des personnes qu’il reçoit comme rappelé dans le principe 1 du Code :

            Principe 1 : Respect des droits de la personne

«…Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

Dans la situation présente, le document soumis à la Commission est intitulé « certificat ». En l’espèce, la psychologue s’autorise à y inscrire des éléments cliniques et diagnostiques. Elle apporte des informations factuelles à partir des dires de sa patiente. Elle formule également des préconisations sur la poursuite de l’activité professionnelle de cette dernière dans l’ensemble de la société. En s’appuyant sur son contenu, le Conseil des Prud’hommes a, par la suite, présumé une situation de harcèlement moral.

La Commission a considéré que cet écrit relève davantage d’une « note d’observation ou d’orientation » ou à une prémisse d’expertise. Si sa teneur dénote une certaine empathie vis-à-vis de la jeune femme, son contenu a manqué de rigueur.

Un « certificat » ou une « attestation » sont des documents qui contiennent essentiellement des informations factuelles, succinctes et circonstanciées. La psychologue aurait pu se contenter de constater la concomitance entre la dégradation de la santé psychique de la patiente, son état de grossesse et l’évocation de conflits professionnels. L’hypothèse d’un rapport entre des évènements vécus et les symptômes décrits et/ou constatés aurait mérité plus de prudence voire une investigation plus approfondie en prenant en compte la temporalité de la situation. 

En conclusion, la Commission invite les psychologues qui acceptent de rédiger un document à la demande d’un patient, à être particulièrement vigilants sur la forme, le contenu et les conséquences des écrits produits.

Pour la CNCDP

La Présidente

Mélanie GAUCHÉ

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

Avis CNCDP 2008-10

Année de la demande : 2008

Demandeur :
Psychologue (Secteur Santé)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Organisation de l’exercice professionnel
Précisions :
Fonctions du psychologue/ Fiche de poste

Questions déontologiques associées :

– Abus de pouvoir (Abus de position)
– Spécificité professionnelle
– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
– Code de déontologie (Statut du Code, finalité, légalisation, limites)
– Autonomie professionnelle
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Responsabilité professionnelle
– Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
– Confidentialité (Confidentialité des locaux)
– Évaluation (Évaluation de personnes liées au psychologue (personnellement ou professionnellement))
– Consentement éclairé

La Commission ne peut être saisie que de questions portant sur la déontologie des psychologues, celles relevant du droit du travail devant être traitées par d’autres instances. La différenciation de ces deux plans, dont la demandeuse a conscience, n’est pas toujours aisée pour les psychologues en situation conflictuelle avec leur hiérarchie.
En réponse aux questions posées, la commission traitera des points suivants

  1. La validité légale du Code de déontologie des psychologues
  2. Les missions et les conditions d’exercice des psychologues
  3. Le positionnement d’un psychologue lors d’une action  en justice

 

 

  1. La validité  légale du Code de déontologie des psychologues

Le Code de déontologie des psychologues a été adopté en 1996 par la grande majorité des organisations de psychologues. Comme le précise son préambule :
Préambule – « (…) Le présent code de déontologie est destiné à servir de règle professionnelle aux hommes et aux femmes qui ont le titre de psychologue, quels que soient leur mode d’exercice et leur cadre professionnel. Sa finalité est avant tout de protéger le public et les psychologues contre les mésusages de la psychologie. Les organisations professionnelles signataires du présent Code s’emploient à le faire connaître et respecter. Elles apportent dans cette perspective, soutien et assistance à leurs membres (…) »

L’article 8 du Code demande à chaque psychologue  de faire explicitement état du Code de déontologie dans l’établissement de ses contrats et de ses relations professionnelles.
Article 8. « Le fait pour un psychologue d’être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à toute entreprise privée ou tout organisme public, ne modifie pas ses devoirs professionnels, et en particulier ses obligations concernant le secret professionnel et l’indépendance du choix de ses méthodes. Il fait état du Code de déontologie dans l’établissement de ses contrats et s’y réfère dans ses liens professionnels »

Il est donc tout à fait légitime et nécessaire qu’un psychologue fasse référence à son Code de déontologie dans l’exercice de ses fonctions
Le Code de déontologie des psychologues n’a pas encore de reconnaissance légale, toutefois il fait référence depuis maintenant douze ans au sein de la profession et  commence à faire jurisprudence au sein des tribunaux.

 

 

 

  1. Les missions et les conditions d’exercice des psychologues

Les psychologues ont une formation universitaire et professionnelle spécifique. Leur statut professionnel n’est pas celui d’auxiliaires médicaux, mais celui de cadres techniques dans les différents services où ils exercent. Ce sont des professionnels autonomes et responsables.
Article 5 : « Le  psychologue exerce dans les domaines liés à sa qualification, laquelle s’apprécie notamment par sa formation universitaire fondamentale et appliquée de haut niveau en psychologie, par des formations spécifiques, par son expérience pratique et ses travaux de recherche. Il détermine l’indication et procède à la réalisation d’actes qui relèvent de  sa compétence »

De nombreux articles du Code précisent les missions et les conditions d’exercice de leur profession. En référence à la lettre de la demandeuse, nous citerons en particulier :
– La mission fondamentale des psychologues
Article 3 : « la mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur la composante psychique des individus considérés isolément ou collectivement »
Au sein d’une équipe de soins pluridisciplinaire, la mission du psychologue est  donc de soutenir et de faire reconnaître la personne  qui se trouve derrière le patient, quels que soient les problématiques ou les handicaps dont il souffre.
L’autonomie et la responsabilité professionnelle des psychologues
Lorsqu’un  psychologue estime que son autonomie professionnelle n’est pas suffisamment reconnue par sa hiérarchie, il doit faire la part de ce qui relève de l’organisation du service (les dates de réunion, les plannings, par exemple…) et de ce qui relève du contenu spécifique de son travail  et de sa fiche de poste (groupes de parole, courrier, contenu des entretiens…). Le Code précise en effet :
Titre I-3 : « Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Il s’attache à ce que ses interventions se conforment aux règles du présent Code. Dans le cadre de ses compétences professionnelles, le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu’il conçoit et met en œuvre. Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels »
Si un psychologue se trouve dans la situation où ses indications thérapeutiques ne sont pas prises en compte dans les projets de soin des malades, il faut qu’il en fasse clairement état lors des réunions de service en prévenant des risques encourus par les patients, afin que la direction prenne ses responsabilités en tout état de cause.
Face au risque de rupture du contrat de travail, le Code précise, dans le titre I-7, que «  Le psychologue ne peut aliéner l’indépendance nécessaire à l’exercice de sa profession sous quelque forme que ce soit ».

– La spécificité du travail des psychologues
Article 6 : « Le psychologue fait respecter la spécificité de son exercice et son autonomie technique. Il respecte celle des autres professionnels »
Article 7 : «  Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatible  avec ses compétences, sa technique, ses fonctions … »

Le remplacement de certains professionnels d’une institution en faisant appel au psychologue  peut se justifier dans certains cas, mais il doit être précisé par la direction que c’est à titre dérogatoire et non permanent, et sur justification (par exemple pour assurer la sécurité des patients).
Du point de vue du psychologue, la distinction entre son rôle spécifique et la participation à la vie de l’institution doit faire l’objet d’une réflexion. Assurer ponctuellement des tâches utiles à la collectivité (surveillance du ménage ou organisation de la tournée du minibus) n’a pas la même incidence sur l’accompagnement des patients que  remplacer les AMP auprès d’eux, avec la confusion des rôles qui peut en résulter. C’est à chaque psychologue d’analyser la situation, d’une part en tenant compte des obligations de son contrat  de travail et des relations professionnelles qu’il implique, et d’autre part en faisant respecter sa fonction  sans se désolidariser de la vie de l’institution.
Autrement dit, le psychologue apporte à un service des compétences spécifiques  qu’il met en œuvre en toute autonomie dans le cadre du projet d’établissement et en collaboration avec les autres professionnels.

– Les conditions de travail qui permettent au psychologue de respecter et faire respecter le secret professionnel
Le Code est très clair sur la nécessité pour un psychologue de disposer d’un bureau où il puisse recevoir les personnes en toute confidentialité et entreposer  des documents de travail qui sont sous sa responsabilité personnelle et relèvent du secret professionnel ( notes personnelles, protocoles de tests non élaborés, etc.)
Article 15 : «  Le psychologue dispose sur le lieu de son exercice professionnel d’une installation convenable, de locaux adéquats pour permettre le respect du secret professionnel, et de moyens techniques suffisants en rapport avec la nature de ses actes professionnels et des personnes qui le consultent »

3- Le positionnement d’un psychologue lors d’une action en justice
La commission traitera la question qui lui est posée par la demandeuse au sujet de ce qu’elle peut dire ou écrire sur la directrice de l’établissement lors du procès aux  prud’hommes sous deux angles : a) La différenciation des places  lors d’une action en justice et b) Les règles concernant les évaluations faites par un psychologue

a) La différenciation des places  lors d’une action en justice
Se jugeant victime de préjudices du fait de son employeur, un psychologue, en tant que salarié,  peut porter plainte et témoigner devant un tribunal des faits qu’il reproche à son employeur.
Il ne peut, dans le même temps, se positionner dans un  rôle de psychologue qui lui permettrait  d’émettre un diagnostic d’ordre professionnel, ce qu’il peut faire dans des attestations professionnelles lorsqu’il est sollicité par des tiers ou mandaté comme expert par un tribunal.
Le début de l’article 11, d’application plus générale, peut cependant servir de guide à propos de cette question : «  Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles (…) »

b) Les règles concernant les évaluations faites par un psychologue

Le psychologue ne peut évaluer une personne à laquelle il serait personnellement lié. La fin de l’article 11 précise en effet : « Le psychologue n’engage pas d’évaluation ou de traitement impliquant des personnes auxquelles il serait déjà personnellement lié. »
En l’occurrence, le lien entre la demandeuse et la directrice de l’établissement est d’ordre professionnel et non privé, mais tout lien personnel d’un psychologue avec la personne qu’il évalue est susceptible de biaiser l’évaluation.
En tout état de cause, le psychologue doit toujours s’assurer du consentement de la personne évaluée  :
Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation… Il les informe des modalités, des objectifs et des limites de son intervention (…) »

Un psychologue, engagé à titre personnel dans une action auprès d’un tribunal, peut  donc s’exprimer librement à titre privé, mais ne peut en aucun cas faire état d’une évaluation  psychologique diagnostique de la personne à laquelle il est opposé, que ce soit par écrit ou oralement.

Avis rendu le 6 septembre 2008
Pour la CNCDP
La Présidente
Anne Andronikof

Articles du code cités dans l’avis : Préambule du Code, Titre I-3, I-7, articles 3, 5, 6, 7, 8 9, 11, 15

Avis CNCDP 2006-18

Année de la demande : 2006

Demandeur :
Psychologue (Secteur Médico-Social)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Recherche

Questions déontologiques associées :

– Mission (Distinction des missions)
– Respect de la personne

La Commission rappelle qu’elle n’a pas qualité pour se prononcer sur la matérialité des faits et sur le bien-fondé ou non du licenciement. C’est le rôle du Conseil des Prud’hommes.

Dans le cas présent, le rôle de la Commission est de souligner les risques qu’implique au regard de la déontologie de la profession une confusion de deux cadres différents d’exercice En effet, le cadre institutionnel  –où la mission de la psychologue était clairement définie– a été utilisé pour l’exécution d’un contrat extérieur à l’institution et relevant d’une mission différente. Cette situation interroge deux exigences du Code de déontologie :

– la distinction des missions
– le respect des droits de la personne

  • Le psychologue distingue et fait distinguer clairement ses missions comme le stipule l’article 4  « … Il peut remplir différentes missions, qu’il distingue et fait distinguer….. Ces missions peuvent s’exercer dans divers secteurs ». Certes la demandeuse a précisé aux deux personnes concernées , salariées de l’institution,  le contexte particulier de sa démarche, il semble cependant  que ces précautions aient été insuffisantes puisque les intéressées, prises  elles-mêmes dans une confusion  ont pu croire à «  un exercice sauvage de la psychologie de l’établissement à leur encontre ».
  • Le psychologue respecte les droits de la personne. D’une part le consentement des personnes paraît ne pas avoir été  un consentement suffisamment  « libre et éclairé », d’autre part la psychologue  doit anticiper les réactions éventuelles des intéressées  lorsqu’elles se retrouveront seules face aux interrogations d’un questionnaire de personnalité. L’une des salariées en particulier qui n’y  « connaissait rien en psychologie » a pu  se sentir menacée par l’ intrusion personnelle qu’induit toute réponse à un questionnaire de personnalité .Le Titre I 1rappelle en effet  «   le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoique ce soit sur lui-même »  et l’obligation d’un consentement libre et éclairé de tout interlocuteur :  « Il (le psychologue) n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées ».

En conclusion, la CNCDP insiste sur la nécessité impérative pour tout psychologue de faire preuve d’une grande rigueur dans la définition du cadre dans lequel il intervient et des missions qui sont les siennes  pour protéger ainsi le public d’une confusion regrettable pour la crédibilité de la profession.

 

Avis rendu le 26  Mars 2007
Pour la CNCDP
La Présidente
Anne Andronikof

 

Articles du code cités dans l’avis : Titre I 1, articles 4

Avis CNCDP 2007-04

Année de la demande : 2007

Demandeur :
Psychologue (Secteur Santé)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Organisation de l’exercice professionnel
Précisions :
Dispositif institutionnel

Questions déontologiques associées :

– Continuité de l’action professionnelle /d’un traitement psychologique
– Confraternité entre psychologues

L’article 16 du Code stipule en effet : « Dans les cas où le psychologue est empêché de poursuivre son intervention, il prend les mesures appropriées pour que la continuité de son action professionnelle soit assurée par un collègue avec l’accord des personnes concernées, et sous réserve que cette nouvelle intervention soit fondée et déontologiquement possible ».

La Commission distinguera  deux cas :
Lorsque l’interruption d’activité est prévisible, il est de la responsabilité du psychologue d’anticiper la continuité de la prise en charge des personnes dont il assure habituellement le suivi.
Lorsque l’interruption d’activité n’est pas prévisible, la continuité de la prise en charge peut s’appuyer sur l’activité antérieure du professionnel, soit qu’elle ait été consignée dans un certain nombre de documents – dossiers des patients tenus à jour par exemple -, soit qu’il y ait eu partage d’un certain nombre d’informations- réunions d’équipe ou de synthèse par exemple-, dans le respect des règles définies par le Code de déontologie.

La commission tient à rappeler par ailleurs qu’il n’appartient pas au psychologue de revendiquer l’exclusivité du soin des patients qui lui sont confiés. En cas d’absence prolongée d’un psychologue, ceux-ci peuvent, avec leur consentement, être suivis par un collègue dont la pratique doit être respectée, comme le souligne l’article 22 :
«  Le psychologue respecte les conceptions et les pratiques de ses collègues pour autant qu’elles ne contreviennent pas aux principes généraux du présent Code ; ceci n’exclut pas la critique fondée. »

Avis rendu le 26/06/07
Pour la Commission
La Présidente
Anne Andronikof

Articles du code cités dans l’avis : articles 16 et 22

Avis CNCDP 2004-26

Année de la demande : 2004

Demandeur :
Psychologue (Secteur Social)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Signalement

Questions déontologiques associées :

– Signalement
– Responsabilité professionnelle
– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
– Secret professionnel (Notes cliniques personnelles)
– Respect de la personne
– Continuité de l’action professionnelle /d’un traitement psychologique
– Titre de psychologue

Le dossier de la requérante comporte certains aspects relatifs au conflit  employeur/employé qui ne  sont pas du ressort de la CNCDP.
Dans sa réponse à la question de la requérante, la Commission  traitera les points suivants

  1. les notes  professionnelles de la psychologue
  2. le respect des droits fondamentaux des personnes, le respect du secret professionnel
  3. l’impossibilité de la continuité de son action professionnelle

1- Les notes professionnelles à caractère confidentiel de la psychologue sont des documents personnels Ces  notes  ne sont ni exigibles  par des tiers, ni transmissibles, elles sont prises en vue d’étayer son examen critique, son élaboration et ses conclusions. Ces notes donnent lieu à la rédaction de comptes rendus communicables.  L’article 17  précise cette approche d’appréciation personnelle: <<La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques qu’il met en œuvre. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques>>.
La psychologue assume sa responsabilité professionnelle  quand elle fournit à l’institution des rapports sur chacune des personnes accueillies dans le centre. En transmettant ses conclusions, la psychologue respecte strictement l’article 12 du code de déontologie des psychologues << le psychologue est seul responsable de ses conclusions….. Il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel. Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent des éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire>>.

2- Le souhait de la psychologue  de vouloir reprendre ses notes confidentielles est tout à fait conforme aux exigences du code de déontologie des psychologues. << Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection>>  titre I-1 . Le fait que l’institution détienne les notes professionnelles de la psychologue va à l’encontre de son  obligation de préserver la vie privée des personnes <<Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même>>  .  Titre I-1.
Donner dans la lettre de licenciement  au juge des Prud’hommes les noms en toutes lettres des mères hébergées au centre bafoue le  respect du secret professionnel, l ‘anonymat n’est plus préservé <<Le psychologue connaît les dispositions légales et réglementaires issues de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. En conséquence, il recueille, traite classe, archive et conserve les informations  et données afférentes à son activité selon les dispositions en vigueur. Lorsque ces données sont utilisées   à des fins d’enseignement, de recherche, de publication ou de communication, elles sont impérativement traitées dans le respect absolu de l’anonymat, par la suppression de tout élément permettant l’identification directe ou indirecte des personnes concernées…..>>.  Article 20.

3- Le licenciement mis en  œuvre pendant son absence place la psychologue dans une position difficile vis à vis des personnes qu’elle a accueillies. Elle n’a  pas pu satisfaire aux obligations que lui fait le Code dans son article 16 << Dans la cas où le psychologue est empêché de poursuivre son intervention, il prend des mesures appropriées pour que la continuité de son action professionnelle soit assurée par un collègue avec l’accord des personnes concernées…. >>. Dans le cas où, l’institution, ferait fonctionner « l’espace rencontres », initialement agréé avec un poste de psychologue, en remplaçant celui-ci dans ses fonctions et responsabilités professionnelles par  une personne qui ne peut se prévaloir du titre professionnel correspondant,   elle mettrait  cette personne en position d’usurpation du titre  de psychologue <<L’usage du titre de psychologue est défini par la loi n° 85-772 du 25 juillet publiée au JO du 26 juillet. Sont psychologues les personnes qui remplissent les conditions du qualification requises dans cette loi. Toute  forme d’usurpation du titre est passible de poursuites >>.  Article  1.

 

PARIS, le 12 mars 2005
pour la CNCDP
Jean CAMUS
Président

Avis CNCDP 2006-01

Année de la demande : 2006

Demandeur :
Professionnel Non Pyschologue (Directeur d’établissement, Président Association, Insp. E.N.)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie

Questions déontologiques associées :

– Abus de pouvoir (Relations sexuelles avec un patient)
– Continuité de l’action professionnelle /d’un traitement psychologique
– Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle)

La situation soumise à la CNCDP renvoie à deux articles du code de déontologie, les articles 11 et 16.
Article 11 – Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui. Il ne répond pas à la demande d’un tiers qui recherche un avantage illicite ou immoral, ou qui fait acte d’autorité abusive dans le recours à ses services. Le psychologue n’engage pas d’évaluation ou de traitement impliquant des personnes auxquelles il serait déjà personnellement lié.
La première phrase de cet article rappelle que la relation établie entre un psychologue et son patient est asymétrique. Cette relation renvoie à des places différenciées, des rôles et fonctions définis et déterminés dès l’amorce de la relation et dont le psychologue est garant.
Il est fréquent d’observer qu’un transfert de pensées, de sentiments, de désirs du patient sur le psychologue s’instaure pendant la durée de la relation thérapeutique. Il incombe au psychologue d’être conscient de ce phénomène, de l’analyser et de le contrôler dans l’intérêt du patient, de garantir en quelque sorte son patient de toute dérive et abus que ce type de relation pourrait faciliter.

Lorsqu’un psychologue n’est plus à même de maintenir ou de rétablir le cadre fondateur de cette relation, il est de son devoir d’avoir recours à d’autres moyens (supervision, conseils auprès d’autres collègues) ou bien d’interrompre le traitement.

La dernière phrase de l’article 11 stipule que, pour un psychologue, l’existence d’une relation autre que professionnelle avec son client ou son patient (personnelle, ou hiérarchique entre autres) rend incompatible la prise en charge thérapeutique de cette personne.

Article 16 – Dans le cas où le psychologue est empêché de poursuivre son intervention. il prend les mesures appropriées pour que la continuité de son action professionnelle soit assurée par un collègue, avec l’accord des personnes concernées, et sous réserve que cette nouvelle intervention soit fondée et déontologiquement possible.
Il est du devoir du psychologue de référer son patient à un collègue s’il se trouve dans l’impossibilité technique ou éthique d’entreprendre ou de poursuivre une intervention. En effet, par le fait même qu’il accepte de suivre un patient, le psychologue pose une indication, il affirme que cette personne nécessite un suivi et il prend la responsabilité de ce suivi non pas pour lui-même mais bien dans l’intérêt du patient. Si lui-même, quelles qu’en soient les raisons, ne peut assurer le traitement, il doit faire le nécessaire pour assurer la continuité du suivi.

Avis rendu le 05/05/07
Pour la CNCDP
La Présidente
Anne Andronikof

Articles du code cités dans l’avis : 11 et 16.

Avis CNCDP 2004-12

Année de la demande : 2004

Demandeur :
Psychologue (Secteur Éducation)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Organisation de l’exercice professionnel
Précisions :
Fonctions du psychologue/ Fiche de poste

Questions déontologiques associées :

– Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
– Autonomie professionnelle
– Responsabilité professionnelle
– Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))

La Commission retiendra les points suivants tous relatifs aux conditions d’exercice de la   profession :

1. Le secret professionnel
2. L’indépendance professionnelle et la responsabilité professionnelle
3. Les documents émanant du psychologue

1. Le secret professionnel

En demandant l’autorisation de la  « Direction Pédagogique avant de rentrer en contact , y compris téléphonique, avec les parents d’élèves ou d’anciens élèves même s’il s’agit d’une demande de leur part », la psychologue ne se retrouve plus dans des conditions qui lui permettent de pouvoir respecter le secret professionnel comme lui recommande l’Article 8 du Code de Déontologie des Psychologues : «  le fait pour un psychologue d’être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à toute entreprise privée ou tout organisme public, ne modifie pas ses devoirs professionnels, et en particulier ses  obligations concernant le secret professionnel et l’indépendance du choix de ses méthodes et de ses décisions ». Ces conditions de contact ne prennent pas en considération le respect  des droits de la personne tel qu’il est signifié dans le Titre I.1 : le psychologue « n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Réciproquement, toute personne doit pouvoir s’adresser directement et librement à un psychologue ».

2. L’indépendance professionnelle et la responsabilité professionnelle

Ces mêmes conditions de pratique ignorent l’indépendance professionnelle de la psychologue en lui imposant des rendez vous avec les adolescents, lui fixant une durée, une fréquence et un horaire d’entretien, or, comme l’indique le Titre I.7 du Code « Le psychologue ne peut aliéner l’indépendance nécessaire à l’exercice de sa profession sous quelque forme que ce                  soit ». Si dans un travail d’équipe, le psychologue peut accepter un cadre hiérarchique, il lui faut veiller à ce que ce cadre ne fasse pas obstacle à une mission indépendante de la hiérarchie, comme la mise en place d’entretiens.

D’autre part, la lettre du directeur, dans son ensemble, donne un cadre d’exercice très détaillé de la profession de la psychologue ne permettant pas à cette dernière de s’inscrire dans sa responsabilité professionnelle. Ainsi « le suivi des élèves en difficulté psychologique » est présenté par la direction de telle sorte que la psychologue ne peut faire valoir ce qu’elle a estimé être leur besoin et leur demande qui ne sont pas forcément les mêmes d’un adolescent à l’autre. Accepter un tel contexte d’exercice serait contraire au Titre I. 3 du Code « dans le cadre de ses compétences professionnelles, le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu’il conçoit et met en œuvre. Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnel ».

Cette même responsabilité professionnelle est présente dans les conclusions du psychologue qui, quand elles «  sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire » (Article 12).La Commission rappelle, en outre, que le bilan psychologique individuel, fait partie d’un dossier, qu’il est la propriété de l’usager et qu’il est transmis à des tiers avec son consentement.

3. Les documents émanant du psychologue

Les bilans individuels doivent suivre l’Article 14 du Code«  Les documents émanant d’un psychologue (attestation, bilan, certificat, courrier, rapport…) portent son nom, l’identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire…Le psychologue n’accepte pas que ses comptes- rendus soient transmis sans son accord explicite, et il fait respecter la confidentialité de son courrier ».

CONCLUSION

Alors que l’établissement dépend de « la Convention collective des psychologues de l’enseignement privé, qui dans ses annexes fait explicitement référence au Code de déontologie des psychologues, du 22 mars 1996 », il apparaît que la direction attend de la requérante des pratiques qui la mettent en difficulté avec la déontologie, notamment dans le non respect du secret, de l’indépendance et de la responsabilité professionnels.

Au-delà de cette contradiction, la requérante doit pouvoir faire état de ce qui, dans le respect du Code, est compatible ou non avec le projet de la direction.

 

 

Fait à Paris, le 28 novembre 2004
Pour la Commission,

 Le Président, Vincent Rogard,

 

Avis CNCDP 1998-19

Année de la demande : 1998

Demandeur :
Psychologue (Secteur non précisé)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie d’un enfant

Questions déontologiques associées :

– Autonomie professionnelle
– Responsabilité professionnelle
– Compétence professionnelle (Formation (formation initiale, continue, spécialisation))
– Respect du but assigné
– Secret professionnel (Contenu des entretiens / des séances de groupe)
– Discernement

La commission examinera successivement les deux questions posées : l’attitude interventionniste, et le secret.
Concernant le premier point Si l’on peut comprendre qu’un psychologue n’adopte pas un rôle d’intervention normative, tout psychologue, soucieux de respecter le Code de Déontologie se doit de définir un cadre clair avant tonte intervention, en agissant avec prudence pour éviter les mauvaises surprises. Il peut faire référence aux principes généraux du titre I, et en particulier aux principes 3/ (responsabilité), 5/ (qualité scientifique) et 6/ (respect du but assigné).
3/ : [..] « le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu ‘il conçoit et met en oeuvre. Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels. »
5/ : « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explication raisonnée de leurs fondements théoriques et de leur construction […]. »
6/ : « […] Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné le psychologue doit prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers. »
A propos du secret L’article 1 du titre I est sans ambiguïté sur ce point : « […] le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. »
Et l’article 12 duchapitre 2 titre II ajoute : « Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel […]. »

Conclusion

Le psychologue dispose d’une grande liberté dans le choix et l’application des méthodes et techniques qu’il met en oeuvre, mais en contrepartie, il porte une grande responsabilité et il répond personnellement de ses choix et des conséquences de ses actions. Tout psychologue se doit donc de mesurer les risques éventuels encourus, ce qui doit le conduire à faire preuve de prudence et de rigueur dans sa conduite professionnelle. Concernant le secret, tout psychologue doit s’attacher à respecter et à faire respecter le secret professionnel en apportant les précisions permettant à tous les personnels impliqués dans un processus thérapeutique ou éducatif de comprendre l’absolue nécessité de préserver ce secret.

Fait à Paris le 28 novembre 1998. Pour la CNCDP,
Claude NAVELET, Présidente