Avis CNCDP 2019-23
Année de la demande : 2019 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Discernement |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Les écrits du psychologue dans une situation susceptible de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’une personne. Les écrits du psychologue sont de différentes natures et engagent sa responsabilité, comme le prévoit le Principe 3 du code de déontologie : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. […] » Selon l’article 20 de ce même Code, le document doit, sur un plan formel, respecter un certain nombre de caractéristiques qui permettent d’identifier les coordonnées de son signataire et l’objet de l’écrit : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique ». Dans le « compte rendu psychologique » joint à la demande, ces caractéristiques sont bien présentes. Il est cependant noté que le sigle ADELI est orthographié « Adélie » et que les coordonnées professionnelles de la psychologue se résument à un numéro de téléphone et une adresse e-mail. La Commission s’est par ailleurs interrogée sur ce que recouvre un rectangle noir qui figure en haut et à gauche de la copie. En l’état, aucune indication ne permet de saisir l’objectif de cet écrit, ni son destinataire. Il n’est pas précisé si la psychologue a donné un accord explicite pour qu’il soit transmis à la justice. De plus, le demandeur signale en post-scriptum que la psychologue aurait fait une erreur d’une année. Selon lui, cet écrit serait donc postérieur au classement sans suite d’une première affaire le concernant. Le texte débute par une « présentation » qui situe le diagnostic posé sur l’ex-épouse du demandeur comme « conséquent du comportement de son mari », qualifié ensuite de « violent, agressif, querelleur, tyrannique, addicté aux jeux, manipulateur, voleur et pervers ». La Commission observe que l’accumulation de ces qualificatifs s’appuie uniquement sur les déclarations de la patiente, ce qui réduit leur fiabilité au sens de l’article 13 et peut également les discréditer. Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner ». L’« histoire du cas » qui suit cette « présentation » décrit de manière très détaillée la vie conjugale du couple, les violences physiques et psychologiques exercées par le demandeur sur son ex-épouse et la possible existence d’attouchements du père sur sa fille. La psychologue ne prend pas soin de préciser que son récit est uniquement basé sur les dires de sa patiente, ce qui manque singulièrement de la prudence, de la mesure et de la rigueur préconisées au Principe 2. Principe 2 : Compétence « […] Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Au-delà d’une rédaction et d’une orthographe pour le moins approximatives, la structure du texte pourrait s’apparenter à une expertise psychologique, concernant une femme potentiellement victime de violences conjugales, voire une enfant pouvant avoir subi des attouchements, alors que la psychologue n’a aucunement été mandatée pour réaliser une telle investigation. La Commission a estimé que le diagnostic et les préconisations formulées auraient eu avantage à s’appuyer sur l’article 17 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci ». Le TGI a classé sans suite une première affaire concernant le demandeur pour « absence d’infraction ». Le document transmis étant incomplet, la Commission n’a pas pu identifier l’origine de la « dénonciation » et le type d’« infraction » qui avait alors été invoqué. A la lecture du contexte décrit par la psychologue, la Commission s’est interrogée sur la raison pour laquelle elle n’a pas signalé aux autorités administratives ou judiciaires une situation pouvant être considérée comme portant atteinte à l’intégrité psychique et physique de cette mère et de ses enfants en suivant ainsi les recommandations de l’article 19 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ». Le contenu d’un signalement, élaboré par un psychologue, doit toutefois rester conforme aux Principes 6 et 4 du Code : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Principe 4 : Rigueur « […] Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » La décision de saisir une autorité administrative ou judiciaire appelle à observer rigueur et discernement dans les faits invoqués. Les allégations doivent être rapportées avec soin et entre guillemets afin de laisser place aux investigations ultérieures (évaluations, expertises, enquêtes voire auditions contradictoires). Le respect de ces dispositifs permet au psychologue de rester dans un positionnement respectueux des droits des personnes au sens du Principe 1 et de l’article 25 : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Enfin, si le but assigné à cet écrit était de « mettre en place des mesures de protection » pour la mère et ses enfants, comme la conclusion de la psychologue le laisse entendre, une saisine de la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) aurait pu déclencher l’intervention des services sociaux à même d’accompagner et de soutenir leur mise à l’abri.
Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ
La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.
Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-01
Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Discernement |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Écrits du psychologue dans un contexte de séparation parentale Au préalable, la Commission tient à rappeler que les psychologues ne sont pas médecins. En cela, leur exercice n’est régi que par le seul code de déontologie des psychologues, donc en rien celui des médecins. L’exercice professionnel du psychologue peut l’amener à produire des écrits relatifs à des personnes ou bien des situations auxquelles il n’a pas eu un accès direct. Ceci est confirmé par l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » Ces interventions peuvent conduire le psychologue à rédiger des écrits sa responsabilité au sens du Principe 3 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » L’écrit doit alors être rédigé de manière réfléchie, à la mesure de ce que le Code préconise en termes de rigueur et d’impartialité, comme l’indique l’article 25 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Dans le cadre d’une séparation ou d’un divorce, lorsqu’un psychologue reçoit l’un des membres du couple et accepte de rédiger un document, il doit veiller à conserver la plus grande prudence, comme le veut le Principe 2 : Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Par ailleurs, finaliser un document écrit requiert d’observer quelques règles formelles telles que celles réunies dans l’article 20 du Code : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » La pièce jointe au dossier adressé à la Commission ne fait aucunement défaut quant aux mentions relatives à l’identité professionnelle (nom, prénom, numéro ADELI, fonction, coordonnées et signature) de la psychologue qui a accepté de la rédiger. En revanche, se pose plus volontiers la question de sa nature. Il s’agit, en effet, moins de savoir si des règles formelles ont été oubliées que de savoir si la psychologue a outrepassé sa fonction au travers dudit document. Intitulé « Attestation », il précise qu’il a été établi à la demande de la patiente et n’indique aucun objet clairement défini. Se succèdent ensuite, sur deux pages, des éléments relatifs à la psychothérapie de cette patiente, des observations concernant le comportement supposé de son ex-compagnon et enfin des hypothèses mettant en lien les éléments cités et la situation des enfants du couple. La Commission s’est interrogée sur le respect du Principe 1 relatif au respect des droits des personnes qui incite les psychologues à préserver la vie privée et l’intimité des personnes qui le consultent en garantissant le respect du secret professionnel. Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue [… ] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » La Commission rappelle ici qu’une « attestation » a pour objectif de mentionner qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Elle est toujours remise en main propre à la personne qui la demande et porte généralement la mention : « pour faire valoir ce que de droit ». Un « compte rendu » relate pour sa part une intervention, par exemple une consultation psychologique, un bilan ou aussi une expertise. Il renseigne les résultats d’une investigation et peut contenir des hypothèses ou des diagnostics psychologiques voire même des préconisations. En l’état, la psychologue était habilitée à rédiger, à la demande de sa patiente, un document intitulé « Attestation » mais aurait dû s’en tenir à ce qui est habituellement attendu pour ce type de production, au contraire de ce qu’elle a proposé. Ceci est en adéquation avec le Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » En cela, si son initiative ne peut être condamnée au regard de la déontologie des psychologues, elle mérite au moins d’être discutée quant au risque de confusion entre différents types d’interventions et d’écrits. La Commission réitère l’importance de respecter la rigueur et la prudence face à la demande d’un patient, autre manière d’assurer à chaque personne le respect de son intimité comme le Frontispice du même Code le laisse entendre : Frontispice « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »
Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI
La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-02
Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Discernement |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Rédaction d’écrits par un psychologue dans le cadre d’un conflit entre un salarié et son employeur. Au préalable, afin de répondre aux interrogations du demandeur, la Commission rappelle que les psychologues sont invités à suivre les recommandations du code de déontologie des psychologues. En l’état actuel, la Commission n’a pas de compétences comparables à celles de l’ordre des médecins. Il arrive que des patients demandent à leur psychologue de rédiger des attestations de suivi psychologique. Ces attestations se distinguent d’une expertise psychologique en ce qu’elles sont rédigées, le plus souvent, à la demande du patient, et non à la demande d’un tiers. Elles visent à rendre compte d’une situation, de la fréquence d’un suivi que celui continue ou pas dans le but que celles-ci soient reconnues. En ce sens, la rédaction d’attestations requiert la prudence du psychologue qui doit veiller à maintenir la confidentialité des consultations et le respect du secret professionnel, comme précisé dans l’article 7 du Code : Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » Ainsi, les intitulés des écrits du psychologue doivent pouvoir être clairement identifiables, comme stipulé à l’article 20 du Code : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Ici, le contenu des documents portés à l’appréciation de la Commission, intitulés « Attestation sur l’état psychique de Monsieur XX », porte à confusion sur la nature de l’écrit. Il se présente comme une attestation de suivi psychologique tout en consignant des éléments qui le rapprochent d’un « compte-rendu » voire d’une expertise psychologique. En acceptant de rédiger une attestation à la demande d’un patient, le psychologue engage sa responsabilité professionnelle comme précisé dans le Principe 3. Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Il doit prendre en considération le devenir de cet écrit, et notamment qu’il puisse être transmis à un tiers. En ce sens, il veille à répondre à la demande du patient, en ne révélant que les éléments psychologiques strictement nécessaires, comme le rappellent le Principe 6 et l’article 17 du Code : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Article 17: « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. » En effet, lorsque le psychologue est conduit à recevoir une personne dans le cadre d’une psychothérapie individuelle, il a nécessairement connaissance d’éléments relatifs à l’intimité psychique, à la vie privée et professionnelle de cette dernière. Les propos de celle-ci sont constitués à la fois d’évènements de sa vie et aussi de leur retentissement subjectif. À partir de l’ensemble de ces éléments, le psychologue émet des hypothèses sur le fonctionnement psychologique de son patient. Par conséquent, lorsque ce dernier lui demande de rédiger un écrit, le psychologue doit spécifier si cela émane de sa propre analyse ou des propos tenus par son patient, comme l’y invite l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » Le psychologue est par ailleurs conscient des incidences que ses conclusions peuvent éventuellement avoir sur la personne elle-même, et aussi, du fait que ses conclusions demeurent relatives, comme le souligne l’article 25 du Code: Article 25: « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Dans les attestations mises en cause ici par le demandeur, la psychologue affirme un lien de causalité entre l’état de santé de son patient et les difficultés vécues sur son lieu de travail. En s’appuyant, pour formuler son avis, sur les propos tenus par lui dans le cadre de la psychothérapie, elle pouvait émettre un avis sur l’origine des symptômes qu’elle a constatés. En observant la concomitance entre la dégradation de la santé psychique de son patient et la possible existence de conflits professionnels au sein de l’entreprise, elle ne pouvait cependant établir un lien direct de causalité. Néanmoins, il était de sa responsabilité de faire preuve de prudence et de discernement dans le contenu de son évaluation, comme le souligne le Principe 2. Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il [le psychologue] fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Par ailleurs, dans de telles situations, le psychologue peut se référer à l’avis de collègues expérimentés, en particulier quand les propos tenus par la personne qui le consulte peuvent alarmer sur son état psychique ou sur son éventuelle mise en danger, comme le rappelle l’article 19 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. » Pour la CNCDP La Présidente La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-03
Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Interventions du psychologue dans un contexte judiciaire entre parents Recevoir en consultation psychologique un enfant, à la demande d’un seul de ses parents, implique de définir clairement l’objectif et les limites de l’intervention, en se fondant sur l’article 9 du code de déontologie des psychologues : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Concernant l’accueil des mineurs, le Code préconise de rechercher l’accord des détenteurs de l’autorité parentale avant même d’engager une évaluation ou une psychothérapie, en s’appuyant sur les articles 10 et 11. Lorsque les parents sont séparés ou divorcés, cette recommandation est particulièrement importante afin de prévenir une possible instrumentalisation du psychologue dans le conflit parental. Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. » Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Dans la situation présente, il semble que les parents ont, chacun de leur côté, consulté des psychologues sans que ces recommandations aient été prises en compte. La demandeuse signale par contre que la psychologue qui reçoit l’aîné des garçons aurait cherché à joindre sa « consœur », ce que l’article 31 peut autoriser, mais sans y parvenir : Article 31 : « Lorsque plusieurs psychologues interviennent dans un même lieu professionnel ou auprès de la même personne, ils se concertent pour préciser le cadre et l’articulation de leurs interventions. » Or, il est aisé de saisir, à la lecture des documents fournis, le caractère particulièrement conflictuel de la situation. Une procédure auprès du Juge aux Affaires Familiales (JAF) est évoquée, ainsi que différentes plaintes devant l’autorité judiciaire. Dans ce contexte, l’attestation fournie à la mère, qui est établie « pour faire valoir ce que de droit », indique que la psychologue semblait consciente de l’usage qui pouvait être fait de son écrit, au sens du Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » La Commission a donc examiné le document et tout d’abord constaté, que, du point de vue formel, il respecte les attendus contenus dans l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature.» Par contre, elle s’est interrogée sur l’adéquation entre son intitulé et son contenu. Une « attestation » suppose de consigner qu’une consultation a bien eu lieu et précise éventuellement les suites envisagées. Or, l’écrit examiné contient des éléments d’observation pendant cette consultation ; des informations portant sur la situation familiale, basées uniquement sur les dires de la mère et des enfants ; des appréciations sur l’attitude du père, jamais rencontré, et aussi des préconisations relatives aux droits des parents. Ces éléments juxtaposés, constituant un « témoignage » lisible en faveur de cette mère, ont semblé manquer du recul et de la prudence attendus par le Principe 2 : Principe 2 : Compétence « …Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » D’autre part, si le psychologue peut donner un avis sur une situation qui lui est décrite, cela ne peut être assimilé à une évaluation circonstanciée et approfondie, comme le précise l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner » En ce sens, cette « attestation » présente un tableau figé et sans perspectives de changement, sans suivre l’avertissement de l’article 25 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Dans le cas présent, un document intitulé « attestation » aurait pu venir compléter les certificats médicaux d’ITT délivrés par l’hôpital et le témoignage reçu par le commissariat dont il est fait mention dans le texte. Enfin, affirmer que des enfants « ne sont pas en sécurité » chez un parent et qu’ils « souffrent de maltraitance psychologique et affective », doit conduire le psychologue à s’interroger sur l’opportunité de prendre conseil pour décider la levée du secret professionnel, en rédigeant dans ce cas un « signalement », comme indiqué par l’article 19 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».
Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI
La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.
Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2018-11
Année de la demande : 2018 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale |
AVIS AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné. Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.
La Commission se propose de traiter des points suivants :
Le psychologue qui accepte de prendre en charge un patient engage sa responsabilité professionnelle rappelée dans le Principe 3 du code de déontologie. Il détermine le choix de ses méthodes d’intervention. Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer ». Dans le cas présent, le psychologue a rencontré le jeune garçon à la demande de sa mère plusieurs semaines consécutives pour, précise-t-il dans son compte-rendu, « une forte anxiété vis-à-vis de l’école ». Il indique par ailleurs ne pas avoir de « nouvelles du père » alors qu’il aurait donné ses coordonnées à la mère pour qu’il le contacte. Trois questions relatives aux modalités d’intervention du psychologue sont ainsi soulevées : celle de l’autorisation parentale de prise en charge en cas de séparation, celle du consentement et enfin, celle du but assigné. Lorsque l’autorité parentale est exercée en commun et que le psychologue reçoit l’enfant avec un seul parent, il est considéré comme un tiers de bonne foi s’il n’a pas connaissance d’une éventuelle opposition de l’autre parent. Comme l’article 11 du Code de déontologie y invite, il est cependant souhaitable que le psychologue ait un contact avec l’autre parent afin de l’intégrer au processus de la consultation. Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Le psychologue veille également à fonder son intervention selon les principes mentionnés dans le Principe 1 et l’article 9 du Code. Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées ». Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Dans le cas présent, le demandeur indique que le psychologue n’a pas pris contact avec lui. Pourtant, la prise de contact avec ce père aurait peut-être permis aux différents interlocuteurs de s’entendre sur leur demande. Cela aurait également permis au psychologue d’ajuster son intervention en déterminant le but assigné à la prise en charge de l’enfant comme l’indique le Principe 6. Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » En effet, dans les documents transmis à la Commission, il apparaît que l’évaluation de la précocité intellectuelle du jeune garçon, mise en avant par le père comme justifiant au départ les interventions du psychologue, n’est pas reprise par ce dernier dans son compte-rendu. Il y est davantage question des difficultés exprimées par l’enfant dans le contexte du divorce : séparation d’avec la mère lors des visites chez le père ou à la reprise des cours, qualité de la relation avec le père. S’agissant d’une séparation potentiellement conflictuelle, recevoir l’autre parent permet au psychologue d’associer celui-ci à la prise en charge de son enfant, de prendre la mesure du conflit et ainsi cerner au mieux la dynamique familiale dans son ensemble.
Tout psychologue peut être amené à rédiger un document dans le cadre de son exercice professionnel, rédaction qui engage sa responsabilité professionnelle. Avant de réaliser un écrit, il mène une réflexion sur le bien-fondé d’une telle production tout en déterminant sa forme et son contenu. Il cherche à préserver dans sa rédaction les principes d’impartialité et de prudence, qui sont énoncés dans le Principe 2 du Code. En adoptant une démarche mesurée, il est conscient de l’usage qui pourrait être fait de ces documents par des tiers, en particulier lorsqu’il intervient dans un contexte de séparation parentale. Il veille aussi à observer une grande prudence lorsqu’il formule ses conclusions et ce, dans l’intérêt de son patient. Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ». En outre, le psychologue respecte les règles formelles rappelées dans l’article 20 du Code lui permettant de mieux circonscrire le cadre de la diffusion de son écrit. Il informe éventuellement ses destinataires que celui-ci ne pourra être transmis à un tiers qu’avec son accord explicite. Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Dans le document transmis à la Commission, le psychologue rend compte du contenu des séances réalisées auprès de l’enfant. La mention des personnes destinataires est absente. De plus, ce compte-rendu a selon toute vraisemblance été rédigé à la demande de la mère. Il aurait été judicieux de mentionner ce point voire d’en permettre une diffusion aux deux parents afin de ne pas écarter le père de la prise en charge. Par ailleurs, tout psychologue réalise son intervention dans la continuité de sa mission fondamentale, celle de respecter la personne dans sa dimension psychique comme précisé dès le frontispice du Code puis dans l’article 2. Frontispice : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. » Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Lorsqu’il rédige un document à destination d’un tiers, il veille à situer ses observations dans un contexte donné et s’assure de ne rendre compte que des éléments qui sont strictement nécessaires à sa mission comme cela est mentionné dans l’article 17. Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci ». Le psychologue rédige son écrit en ayant conscience des limites de son travail au sens du Principe 4 et tient compte du caractère relatif de ses évaluations et de l’aspect évolutif des situations et des personnes, comme l’y invite l’article 25. Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Dans le document joint, le psychologue rend compte des difficultés exprimées en séance par l’enfant à propos de la relation avec son père. Il partage ses observations notamment celle d’une diminution des manifestations anxieuses et des difficultés scolaires de l’enfant lorsque ce dernier ne voit pas son père. Le psychologue conclut en formulant des réserves quant aux bénéfices pour l’enfant des visites chez celui-ci. Un psychologue conscient de la complexité des situations et de l’aspect évolutif des personnes aurait pu observer le recul et le discernement nécessaires lorsqu’il est amené à formuler un avis. Le fait de ne pas avoir rencontré le père l’expose au reproche de manque de discernement et d’impartialité eu égard à la situation parentale conflictuelle concernant les modalités de visite de l’enfant chez son père. Enfin, si un psychologue consigne des éléments émanant du discours d’un patient, il doit distinguer rigoureusement ses propres appréciations de ce qui relève de propos entendus ou rapportés par son patient, comme l’y invite l’article 13. Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » En conclusion, la Commission souligne l’extrême vigilance et la rigueur que doit observer le psychologue dans la rédaction d’un écrit afin de chercher à prévenir toute incompréhension ou tout mésusage.
Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2019-05
Année de la demande : 2019 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter le point suivant :
Les écrits du psychologue : responsabilité, rigueur, impartialité, prudence Lorsqu’un psychologue décide de transmettre un écrit, il veille aux potentiels effets et conséquences auprès des personnes concernées et à son possible usage par des tiers. En cela, il s’inscrit dans l’esprit du Principe 6 du Code : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Dans la présente situation, les documents dont le demandeur conteste la qualité et le contenu, sont une lettre et une attestation de témoin rédigées par la psychologue de son ex-compagne. La Commission a pu constater que le premier document comporte les indications attendues selon l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… » Concernant le formulaire « attestation de témoin », dans la mesure où la psychologue se présente en faisant état son lien professionnel avec l’ex-compagne du demandeur, elle rédige ce document en sa qualité de psychologue. De fait, le document devait comporter le numéro ADELI. Par ailleurs, l’objet de la lettre rédigée par la psychologue et redirigée par l’avocate cite le nom et le prénom de la patiente mais ne mentionne pas de destinataire. S’agissant d’un écrit que l’intéressé peut transmettre à de plusieurs personnes s’il le souhaite, la Commission souligne l’importance de cette mention. Ainsi, sans le sceau apposé par l’avocat, la Commission n’aurait pu identifier que ce document a été produit dans le cadre d’un dossier judiciaire. Par ailleurs, si le psychologue a la faculté de choisir ses outils d’intervention en toute autonomie, il engage aussi sa responsabilité dans les avis qu’il formule, notamment par écrit, comme le Principe 3 du Code le rappelle : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « […] Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule […] » Il est alors essentiel de faire preuve de la plus grande rigueur, comme rappelé par le Principe 4, et ce dans toutes les circonstances : Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » A la lecture du contenu du document, il apparaît qu’il se rapproche davantage d’une note clinique rédigée sous la forme de courrier que d’une attestation. Il y a là une certaine ambiguïté quant à sa nature, ceci ayant pour conséquence d’affaiblir sa possible portée. A cet égard, l’article 25 invite le psychologue à rester prudent dans ses conclusions : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Dans le cas soumis par le demandeur, la lecture de cet écrit peut orienter celui-ci dans le sens d’une production à charge contre lui. Si la Commission n’a pas à statuer sur le bien-fondé des avis de la psychologue, elle ne peut que rappeler la nécessité pour chaque psychologue de se préserver du risque de partialité, comme l’énonce le Principe 2 : Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ». Cette même attente de prudence est réitérée dans les articles 17 et 16 du code de déontologie qui invitent le psychologue à pondérer et rendre son propos accessible : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés. » Si le psychologue peut être amené à se positionner à propos d’une situation dont il n’a pas directement la charge, l’article 13 stipule aussi le fait qu’il ne peut rendre compte de ce qu’il n’aura pu constater par lui-même : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » La Commission rappelle l’importance de préserver au mieux l’espace psychique de chacun en s’appuyant sur les principes de rigueur et prudence, et en en délimitant le plus précisément possible son champ d’intervention et la nature de ses écrits. Pour la CNCDP, La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2019-06
Année de la demande : 2019 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter le point suivant : – Rédaction d’un rapport ordonné par un Juge et démarche d’analyse et d’investigation du psychologue.
Rédaction d’un rapport ordonné par un Juge et démarche d’analyse et d’investigation du psychologue. Un psychologue peut être amené à rédiger des documents à la demande d’un patient ou d’un tiers, notamment d’une autorité judiciaire. Quel que soit son cadre d’exercice, ses écrits engagent sa responsabilité et son indépendance professionnelles dans le respect du but assigné à son intervention, comme l’indiquent les Principes 3 et 6 du code de déontologie : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». Pour tout type d’intervention, le psychologue doit s’assurer de la rigueur de celle-ci, en veillant à répondre dans son écrit aux questions posées avec prudence et impartialité comme le rappellent le Principe 2 et l’article 17. Ceci vaut également dans le cadre d’un mandat formulé par un Juge pour assurer une démarche d’évaluation et/ou d’investigation familiale. Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». Dans le cadre d’une évaluation psychologique auprès de plusieurs membres d’une même famille, qui plus est dans un contexte de séparation parentale conflictuelle et lorsque celle-ci a pour finalité d’orienter une décision judiciaire, le psychologue tient compte aussi des recommandations énoncées dans les articles 12 et 14 : Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet ». Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation ». Le psychologue s’assure ainsi d’agir dans le respect des droits de ceux qui le consultent et de leur dimension psychique, en cohérence avec le Principe 1 et l’article 2 du Code : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. […] Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même ». Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Dans la situation présente, il est demandé au psychologue de procéder à l’examen psychologique des parents et des deux enfants afin de donner son avis sur les mesures à prendre dans l’intérêt de ces derniers (résidence habituelle, modalités d’hébergement, relations avec les parents). Au regard de ses compétences et du mandat qui lui a été confié, il apparaît que cette psychologue avait toute légitimité pour mener cette évaluation et porter un avis sur le fonctionnement psychologique des parents. Elle se devait également de transmettre ses préconisations sur les modalités de résidence et d’hébergement des enfants, dans l’intérêt supérieur de ces derniers et ce, quels que soient les motifs qui opposent les parents. En outre, comme cela est précisé dans le Principe 4, un psychologue répond du choix de ses méthodes et de ses outils en lien avec la spécificité et les limites propres à son intervention, tout en y apportant un regard critique. Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ». S’il est amené à rédiger un rapport dans un contexte de litige parental, il ne peut ignorer les nécessaires limites de son travail en adoptant autant que faire se peut une approche pondérée et mesurée dans la rédaction et la transmission de ses avis et conclusions, comme l’y invitent les articles 23 et 25 : Article 23 : « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques ». Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Le psychologue veille alors à transmettre ses conclusions de façon intelligible au commanditaire mais aussi aux intéressés en se référant notamment à l’article 16 du code de déontologie. Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés ». Dans le rapport porté à la connaissance de la Commission, la psychologue introduit les questions du Juge qui précisent clairement le cadre de sa mission. Sur la base des entretiens menés, de ses observations et de son analyse, elle choisit de rendre compte de la dynamique individuelle, relationnelle et familiale. A ceci s’ajoute un avis en faveur du maintien des modalités de résidence et d’hébergement alternées chez les deux parents. Si la conclusion de cette psychologue corrobore pour l’essentiel celle proposée dans le rapport d’enquête sociale et si son écrit est avant tout destiné à éclairer une décision judiciaire, elle ne pouvait ignorer le caractère relatif de ses observations, l’effet de ses conclusions écrites sur les intéressés et les risques de s’exposer au reproche de partialité. La Commission s’est interrogée sur la possibilité, dans le cadre de cette procédure, que la psychologue puisse informer directement les parents de ses conclusions avant la transmission de son rapport au Juge. Ceci aurait notamment permis à cette professionnelle d’étayer ses observations et de répondre directement aux interrogations de chacun des parents tout en leur rappelant la possibilité de demander une contre-évaluation, comme le propose l’article 14 du Code. Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation ». Enfin, le code de déontologie précise que la rédaction d’un document par un psychologue doit tenir compte des règles énoncées dans l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… » Dans la situation présente, le rapport est signé par le directeur du service qui emploie la psychologue. Le nom de la psychologue figure bien en fin de document (ce qui laisse supposer qu’elle en est bien l’auteur) mais il n’est accompagné d’aucune signature manuscrite, ni de son numéro ADELI. Or, la Commission souligne que le psychologue doit être garant du contenu qu’il décide de transmettre, en signant lui-même ses écrits. Il n’accepte alors aucune transmission d’un document dont il est l’auteur sans apporter ces éléments. Le demandeur soulève enfin la question de l’absence d’enregistrement de la psychologue au répertoire ADELI géré par l’ARS. La Commission rappelle à cet égard le Préambule du Code et les obligations du psychologue en la matière : Préambule : « L’usage professionnel du titre de psychologue est défini par l’article 44 de la loi n°85-772 du 25 juillet 1985 complété par l’article 57 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 qui fait obligation aux psychologues de s’inscrire sur les listes ADELI. » Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2018-14
Année de la demande : 2018 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Code de déontologie (Finalité) |
AVIS AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné. Les avis sont rendus par l’ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière.
La Commission se propose de traiter des points suivants :
1- Nature des écrits rédigés par les psychologues, respect de la dimension psychique et confidentialité. Le psychologue peut être amené à rédiger divers textes tels que des « attestations », des « comptes rendus », des « courriers » voire des « expertises ». Quel que soit le cadre d’exercice, ces écrits engagent sa responsabilité professionnelle comme l’indique le Principe 3 du code de déontologie : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle ». Dans un contexte de divorce conflictuel, quand un psychologue reçoit un des membres du couple et qu’il accepte de rédiger un document à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction et prendre en considération la diffusion potentielle de son texte comme le rappelle l’article 17 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». La Commission, après examen des documents joints par la demandeuse, constate que la psychologue ne précise pas leur nature. Elle « certifie » qu’elle voit les enfants dans le cadre d’une thérapie et rapporte les conclusions d’une « passation de tests projectifs ». Par ailleurs, deux « certificats », qui ne mentionnent aucun destinataire, ont été produits dans le cadre de la procédure judiciaire, tandis qu’un autre est adressé directement au JAF et reprend le même type de contenu. Ce dernier document rapporte essentiellement les propos tenus par les deux garçons, soit seuls, soit en présence de leur père, soit dans le cadre d’un bilan de personnalité, mais dans tous les cas en l’absence de leur mère que la psychologue n’a, semble-t-il, jamais rencontrée. Le courrier adressé au JAF se conclut par « l’inquiétude » de la psychologue vis-à-vis des deux garçons. Un autre des courriers produits dans le cadre de la procédure judiciaire a pour objet « signalement d’une situation préoccupante » sans mention de destinataire et s’achève par l’évocation d’une « maltraitance psychique du côté maternel ». Ces écrits semblent explicitement motivés par la volonté de rapporter le verbatim des enfants directement au Juge. Selon toute vraisemblance, en l’absence d’objet pour l’un et de destinataire pour l’autre, ces écrits n’ont pas le caractère d’une expertise, même si le contenu pourrait pourtant s’en rapprocher. Tout ceci contrevient à l’article 20 du code de déontologie qui énonce nettement la nécessité de caractériser l’objet de tout écrit produit dans le cadre professionnel : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature […] ». Si ces documents peuvent s’apparenter à une attestation de propos rapportés, ces écrits ne peuvent pas non plus avoir le statut d’une « évaluation » qui serait professionnellement et méthodologiquement fondée, comme indiqué dans l’article 13 du code de déontologie : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même ». Par ailleurs, si le suivi est effectué au motif d’un travail thérapeutique auprès des mineurs, le psychologue doit respecter la vie privée des deux parents, ainsi que celle des enfants. D’une manière générale, les propos tenus lors des entretiens relèvent de la confidentialité comme le précisent le Principe 1 et l’article 7 du Code, à l’exception d’informations qui pourraient relever de la protection des personnes. Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. […] Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. […] » Article 7 : « Les obligations concernant le secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice ». Transmettre des propos entendus lors d’entretiens psychothérapeutiques à un tiers extérieur, quand bien même il s’agit de mineurs, remet en cause le secret professionnel qui est une obligation déontologique à laquelle tout psychologue est tenu. Le fait que ces entretiens aient donné lieu à un compte rendu de la situation familiale, avec des recommandations transmises à la justice les détourne donc de leur vocation confidentielle. Cela témoigne d’un certain manque de prudence et de discernement de la part de la psychologue et contrevient au Principe 2. Principe 2 : Compétence […] « Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il (le psychologue) fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ». Il convient cependant de rappeler que le psychologue est parfois confronté à la possibilité voire à l’obligation de lever le secret professionnel dans des cas précis énoncés dans la loi commune. Ainsi, si le psychologue recueille des informations qu’il estime préoccupantes concernant la situation des enfants dans l’un ou l’autre des foyers, il n’a pas pour mission de vérifier les faits mais doit évaluer avec discernement s’il est nécessaire de transmettre ces informations aux autorités compétentes. Pour cela, il se réfère au Principe 1 – déjà cité – et à l’article 19 du Code, qui traitent spécifiquement de la protection des personnes : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteintes à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril ». Dans ces situations, les signalements sont adressés aux autorités compétentes qui peuvent mandater les services à même d’instruire une évaluation voire une expertise. Par ailleurs, le psychologue doit veiller à instaurer une relation respectueuse avec les enfants reçus en consultation. L’expérience de cette relation doit concerner à la fois la vie psychique et la reconnaissance des besoins de l’enfant, mais aussi la manière dont est considéré chacun des parents par le psychologue. Ceci est rappelé dès le Préambule du Code ainsi que dans le Principe 1 et l’article 7 déjà cités. Préambule : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues ». La non-observance de ces principes fait courir au psychologue le risque d’être pris dans des conflits parentaux et de ne pas en protéger les enfants qu’il reçoit. L’article 9 du code de déontologie est dans ce cas un point d’appui. En effet, c’est au préalable que le psychologue doit expliciter les limites de ses interventions aux personnes qu’il reçoit, dont leurs objectifs et leur finalité. Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions». Enfin, la question de l’accord parental s’agissant de mineurs est d’abord déterminée par la loi, en particulier dans le cadre de l’autorité parentale partagée. Le psychologue qui effectue un suivi thérapeutique avec des enfants doit s’assurer de l’accord de l’un et l’autre des parents. Le code de déontologie est précis à ce sujet en particulier dans l’article 11 : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux ». 2- Respect du but assigné et traitement équitable des parties dans un contexte de séparation parentale. L’ambiguïté concernant la nature des écrits interroge la Commission quant à la position occupée par la psychologue. Selon le contexte évoqué, elle exercerait une fonction de psychothérapeute ce qui est en effet conforme à l’un des choix d’interventions du psychologue comme le rappelle l’article 3 du Code : Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien ». Cependant selon le Principe 3, déjà cité, le psychologue se doit d’adapter ses méthodes à ses objectifs, ce qui lui demande de bien délimiter le but qu’il assigne à sa mission. Il y a lieu, dans cet exercice, de ne pas confondre les objectifs d’une psychothérapie et les fonctions auxquelles le patient tente d’assigner le psychologue. Principe 3 : Responsabilité et autonomie […] [Le psychologue] « peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer ». Le cadre posé par un psychologue pour une thérapie n’est pas le même que pour des entretiens visant à la production d’un écrit contenant des préconisations. Il en est de même pour les méthodes utilisées qui diffèrent selon l’objectif de la mission. Dans cette situation, la psychologue semble avoir utilisé une méthode d’entretiens psychothérapeutiques alors qu’elle aurait pu proposer une méthode d’entretiens à visée d’évaluation, en informant l’ensemble des protagonistes concernés y compris la mère. En outre, il convient de rappeler que le psychologue est tenu de respecter la cohérence entre le dispositif mis en place et le motif initial de sa mission. Le Principe 6 du Code précise que le psychologue ne saurait détourner un cadre d’intervention à d’autres fins que celles pour lesquelles il a été mis en place : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». La demandeuse s’est vue écartée de toute rencontre avec la psychologue, sans aucune communication malgré ses différents courriers et prises de contact. Au regard du Principe 4 du code de déontologie, il était souhaitable et certainement possible de la recevoir pour lui expliquer la spécificité du cadre de la thérapie en cours : Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ». Enfin, la mère est directement concernée par l’écrit de la psychologue puisqu’il y est question de ses relations avec ses enfants. Elle doit par conséquent être informée par la psychologue du devenir de ce document, tel que cela est précisé dans l’article 16 et dans l’article 17, déjà cité : Article 16 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et compréhensible aux intéressés ». En conclusion, la Commission recommande aux psychologues de faire usage de rigueur, prudence et impartialité dans la rédaction de leurs écrits. Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2019-07
Année de la demande : 2019 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale |
La Commission se propose de traiter des points suivants :
Le psychologue est autonome pour concevoir le cadre de son intervention, au regard de ses compétences, afin de répondre à la demande qui lui a été adressée. Le dispositif instituant une relation entre lui et la personne accueillie, se fonde sur plusieurs principes et articles du Code. Il a le choix des méthodes et des outils qui seront utilisés et engage sa responsabilité professionnelle dans la manière dont il répond à la sollicitation d’un patient ou d’un parent, ceci en conformité avec le Principe 3 du Code : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Le psychologue adapte ainsi ses méthodes à ses objectifs, tout en déterminant le but qu’il assigne à son intervention, ceci en conformité avec le Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». Dans la présente situation, la première psychologue indique avoir reçu l’adolescent « en consultation simple » et elle précise que c’est à la demande de ce dernier. Elle mentionne l’avoir déjà vu avec ses parents deux ans auparavant « pour un bilan psychologique ». Le second document fait état d’un « examen psychologique » du garçon mais, faute des première(s) page(s) et de l’en-tête, la Commission n’a pu identifier ni le demandeur ni la méthode. Or, un psychologue qui reçoit un mineur dans un contexte de séparation parentale doit être particulièrement vigilant quant aux demandes qui lui sont adressées par un seul des parents. Il doit être attentif à la façon dont les enfants perçoivent cette intervention, surtout lorsque la relation entre les parents est conflictuelle. L’analyse d’une situation familiale ne peut s’appuyer sur une seule entrevue et sur les déclarations d’un seul protagoniste. Elle nécessite et suppose de la part du psychologue rigueur et discernement comme indiqué dans le Principe 2 du Code. Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité ». De plus, l’examen d’un mineur requiert de tenir compte des recommandations contenues dans les articles 10 et 11 du Code : Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. » Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Si la première psychologue était fondée à s’appuyer sur l’article 10 pour recevoir en entretien individuel l’adolescent, la Commission s’est interrogée sur sa décision de transmettre au Juge aux Affaires Familiales un document reprenant des éléments recueillis lors de cette entrevue, sans proposer ses conclusions de façon plus étayée. Quant à la seconde psychologue, il est difficile de se représenter, à travers la qualité de la pièce jointe, « les méthodes rigoureuses » qui, selon elle, lui ont permis de considérer que le garçon « n’est ni manipulé, ni fabulateur ou mythomane ». L’absence d’information et de consentement de la mère concernant cette deuxième intervention est également à souligner. La Commission s’est aussi interrogée sur le recours au verbatim du garçon, par les deux praticiennes, pour étayer la présentation qui est faite de la mère et sur leur prise en compte des obligations liées au secret professionnel telles que rappelées au Principe 1 et à l’article 7 du Code : Principe 1 : Respect des droits de la personne « (…) Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » Enfin, la demandeuse invoquant la possibilité de demander une contre évaluation, il est rappelé combien cette démarche est légitime, comme l’article 14 du Code le prévoit : Article 14 : « Dans toutes les situations d’évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue informe les personnes concernées de leur droit à demander une contre évaluation.
Les documents rédigés par le psychologue sont généralement dénommés « attestations », « comptes rendus », « courriers » ou bien encore « expertises ». Si une attestation a pour objectif de mentionner qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non, un compte rendu, quant à lui, consiste à expliciter une intervention, par exemple d’une consultation dans un objectif précis. L’exercice est rendu particulièrement délicat quand le document est produit en justice comme c’est le cas dans la situation présente. Cela doit inviter le psychologue en charge d’une telle responsabilité à observer la plus grande prudence, comme indiqué dans le Principe 2 déjà mentionné. Afin de prendre en compte leur possible diffusion, le psychologue prend soin, dans sa rédaction, d’être mesuré et réfléchi, ceci à la lumière des articles 25 et 17 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. » Dans la situation étudiée, la Commission a été sensible au fait que le premier document va au-delà de la simple restitution d’événements ; quant au second, il s’apparente à des prises de notes personnelles. Seule la première pièce jointe est dénommée « compte rendu », elle porte aussi une indication explicite quant à son destinataire. Le second document, est nettement moins identifiable que le premier, hormis le fait qu’il comporte une signature. L’absence de première(s) page(s) incluant un en-tête, sa présentation sous forme manuscrite laisse supposer une écriture au brouillon. La Commission s’est interrogée sur la manière dont la demandeuse a pu se procurer cet écrit. Elle rappelle à ce titre que les notes personnelles prises par le psychologue au cours de son intervention n’ont pas à être diffusées. La Commission tient à réaffirmer la nécessité pour le psychologue de respecter et de faire respecter, les dimensions de rigueur et d’impartialité dans toutes ses interventions, comme le Principe 4 l’indique. Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » De fait et quelle qu’en soit la dénomination, l’écrit d’un psychologue doit répondre aux règles formelles énoncées dans l’article 20. Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… » La Commission n’a pu se prononcer directement sur ce point du fait d’un défaut de reproduction dans les pièces jointes. Elle a pu seulement supposer fondée l’affirmation de la demandeuse qui mentionne n’avoir trouvé aucun numéro ADELI pour la première psychologue alors qu’elle fournit celui de la seconde. Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2019-08
Année de la demande : 2019 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Assistance à personne en péril (Protection) |
Après lecture du courrier du demandeur et des pièces jointes associées, la Commission se propose de traiter des points suivants :
Qu’elle que soit la forme de son intervention, le psychologue veille à prendre en compte le contexte dans lequel une demande lui est adressée, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’intervenir auprès d’un enfant et lorsque cela s’inscrit dans le contexte d’une séparation parentale. Le psychologue explicite aux intéressés le cadre et les limites de son intervention, tel que l’indique l’article 9 du Code : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions.». Dans la situation présente, le psychologue exerçant en libéral a été sollicité par la mère pour un « suivi psychologique » de son fils. Il avait connaissance que cette demande s’inscrivait dans un contexte de « séparation parentale récente » et ne pouvait donc ignorer les enjeux potentiels de cette situation. Ceci devait l’encourager à redoubler de prudence et de discernement, selon le Principe 2 : Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence : […] – de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Lorsque la demande est portée par un seul parent, il est recommandé de s’assurer du consentement de l’autre parent, comme rappelé dans l’article 11 du code de déontologie : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Le psychologue oriente ses décisions selon l’article 2 du Code, en agissant dans l’intérêt de son patient, notamment dans des situations où ce dernier peut être l’enjeu de conflits parentaux : Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Dans le cas présent, le demandeur indique n’avoir jamais rencontré le psychologue qui a reçu son fils. A la lecture des pièces jointes, il apparait qu’une « séance préliminaire », exclusivement avec la mère a été suivie de quatre « entretiens mère-enfant ». Dans l’intérêt de la prise en charge menée auprès de l’enfant, la Commission a estimé que le psychologue aurait pu prendre en compte le contexte familial, en rencontrant le père.
Lorsqu’un psychologue décide de rédiger un document, qu’il s’agisse d’une attestation ou d’un compte rendu psychologique, cet acte professionnel engage sa responsabilité, comme l’indique le Principe 3 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie
« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Cela suppose aussi que, dans la continuité de son intervention, cet écrit puisse répondre à une finalité précise, en cohérence avec le but assigné à la mission du psychologue, comme le rappelle le Principe 6. Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». Le psychologue est par ailleurs attentif au cadre de diffusion de ses écrits. La transmission d’un document à un tiers ne se fait qu’avec son accord explicite, selon les recommandations de l’article 20 : Article 20 : « […]. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » A l’examen du document joint par le demandeur, intitulé « bilan psychologique », la Commission n’a pas pu identifier de destinataire. Seule l’ordonnance de jugement jointe par le demandeur confirme la production en justice de celui-ci par la mère. Ainsi, la Commission s’est interrogée sur l’objectif premier du document et du cadre de diffusion préalablement défini par le psychologue. Par ailleurs, répondre à une demande d’écrit, nécessite de circonscrire les éléments à communiquer avec mesure et discernement, comme le précise le Principe 2, déjà cité. Le psychologue, averti des conséquences que peuvent induire ses écrits professionnels, observe ainsi, selon l’article 17 du code de déontologie, une grande prudence lorsqu’il formule ses conclusions, tout en respectant le principe lié au secret professionnel auquel il est tenu, en référence à l’article 7 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. » Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice ». Dans la présente situation, le psychologue a choisi de rédiger un compte rendu intitulé « bilan psychologique » cinq mois après l’ordonnance d’une expertise médico-psychologique par le JAF. Dans cet écrit très fourni, il rend compte d’observations des séances avec l’enfant, en proposant plusieurs interprétations issues de scènes de jeu. Il y indique des « observations préoccupantes » en s’appuyant sur une scène qualifiée « d’incestuelle » lors d’une visite chez son père. La concomitance entre la production de cet écrit et la mise en œuvre d’une expertise médico-psychologique portant sur la famille a pu interroger la Commission. En effet, ceci peut questionner sur la capacité du psychologue à prendre en compte, d’une part, le contexte dans lequel l’enfant et sa famille évoluaient et, d’autre part, le caractère relatif de ses interprétations et avis, tel que ceci est précisé dans les articles 25 et 13 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » Si le psychologue avait par ailleurs estimé que l’intégrité de son patient était potentiellement en jeu, au sens de l’article 19, il devait alors apprécier la nécessité de transmettre ces observations préoccupantes aux services compétents, selon l’article 6 du Code, afin que ces derniers puissent mener une investigation. Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. » Article 6 : « Quand des demandes ne relèvent pas de sa compétence, il oriente les personnes vers les professionnels susceptibles de répondre aux questions ou aux situations qui lui ont été soumises. » Dans le cas présent, le fait que cet écrit ait été produit en justice en préconisant une « mesure de protection avec des visites médiatisées » avec le père, tout en s’appuyant sur des « observations préoccupantes », rend sa portée ambigüe, voire va au-delà de ce qu’un document intitulé « bilan psychologique » aurait dû viser. La Commission a pu d’ailleurs noter que l’ordonnance judiciaire soulève ce point : en ayant rencontré exclusivement la mère et agi dans un cadre libéral et non en qualité d’expert mandaté, ce psychologue n’avait « aucune qualité pour intervenir dans la procédure judiciaire ». Enfin, la Commission tient à rappeler que rédiger un document nécessite de la part du psychologue prudence et mesure, qui plus est lorsque son intervention et son écrit s’inscrivent dans un contexte de procédure de divorce en cours. Pour la CNCDP La Présidente Mélanie GAUCHÉ La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |