Avis CNCDP 2020-14
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale |
La Commission propose de traiter les points suivants :
Les psychologues sollicités dans le contexte particulier d’une séparation parentale sont confrontés à des situations complexes. Le prérequis à tout suivi psychologique d’un mineur est notamment la recherche de consentement des parents, comme de l’enfant, tel que mentionné dans l’article 11 :
Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Il est dès lors fondamental que le psychologue précise auprès des deux parents et à l’enfant la nature de son intervention. Ces derniers doivent, notamment, comprendre les objectifs et les limites de ce travail, comme précisé dans l’article 9. Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent […]. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » D’une façon générale, lorsqu’un psychologue reçoit un enfant en consultation, la Commission estime que le consentement des deux parents n’est pas nécessaire. Néanmoins, si le premier entretien conduit à un suivi régulier, elle préconise, en se référant à l’article 11 du Code cité ci-dessus, que les deux parents en soient informés et qu’ils aient formulé leur accord. Cela est d’autant plus nécessaire quand les parents sont séparés. Cette disposition permet aux deux parents de s’impliquer dans le suivi psychologique de leur enfant. Le consentement libre et éclairé de toutes les personnes concernées est le garant d’un travail compréhensible et porteur de sens. Une seule exception peut cependant être retenue, lorsque le mineur s’oppose catégoriquement à ce que son ou ses parents soient informés de sa démarche vers un psychologue. Dans ce cas, l’article 10 du Code peut être invoqué :
Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. » Dans la situation où le psychologue est informé d’un contexte conflictuel suite à une séparation parentale, il doit faire preuve de discernement en réfléchissant aux enjeux de la demande qui lui est adressée. Il veille à avoir le recul nécessaire, comme le mentionne la deuxième partie du Principe 2 :
Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Dans le cas présent, la psychologue qui a reçu les enfants, à la demande de la mère, semble avoir choisi de ne pas rencontrer le père au début de son intervention et de ne pas l’avoir informé de la mise en place des suivis psychologiques pour ses trois enfants, tout en produisant deux comptes rendus. Or, le Principe 4 indique que le psychologue doit être en mesure d’expliciter ses décisions et de donner des arguments sur ses choix d’intervention.
Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » De plus, conscient de la complexité des enjeux existant entre deux parents séparés, le psychologue veille à prendre en compte la vulnérabilité psychique particulière de ou des enfants. Il s’attache à intervenir dans le respect de la dimension psychique et dans un traitement équitable de tous les protagonistes impliqués, comme l’y invitent le Principe 1 et l’article 2 du Code :
Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. […]. » Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. » Dans la situation présente, la psychologue ne semble pas avoir informé le père du premier compte-rendu, pourtant remis à la mère avant leur rencontre. Elle n’aurait pas non plus répondu à ses messages et appels ultérieurs, y compris lorsque ce dernier s’est opposé à la poursuite de ce suivi. Or, le respect de la dimension psychique de toutes les personnes impliquées, enfants et parents, est fondamental. La psychologue aurait dû davantage tenir compte du Principe 3, qui rappelle que le psychologue a le choix de ses méthodes, mais qu’il engage aussi sa responsabilité professionnelle dans ses interventions :
Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule […]. » Dans le contexte tel que présenté, le but assigné à la psychologue était d’accompagner psychiquement des enfants dans une situation de conflit parental. Leur intérêt supérieur de l’enfant aurait dû la guider dans son intervention comme dans ses écrits, tel que précisé au Principe 6 :
Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »
Le psychologue peut rédiger, à son initiative ou à la demande d’un tiers, des documents de diverses natures. Ceux-ci relèvent d’un acte professionnel, engageant sa responsabilité au sens du Principe 3, déjà cité. Quel qu’en soit l’objet ou encore le contexte dans lequel il est rédigé, l’écrit du psychologue, pouvant être communiqué à un tiers, nécessite de prendre en considération l’usage qui pourrait en être fait, comme le rappelle l’article 17 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». Dans le cas présent, la psychologue a rédigé, à six mois d’intervalle, deux écrits intitulés « comptes rendus de suivi psychologique » communs aux trois enfants, et dont les contenus restent sensiblement les mêmes. Ils semblent avoir été tous deux transmis uniquement à la mère. Or, le fait d’avoir été sollicitée par un seul des parents devait l’inviter à davantage de prudence et d’impartialité afin de ne pas risquer de renforcer le conflit parental, ou encore de cristalliser le conflit de loyauté dans lequel des enfants peuvent se trouver dans un tel contexte. Le Principe 2, déjà cité, qui fonde son action en termes de discernement et d’impartialité, guide le psychologue dans ses interventions donc aussi dans ses écrits. De plus, la psychologue ne semble pas non plus avoir tenu compte des recommandations de l’article 25 du Code. En effet, en prenant appui sur les éléments recueillis principalement auprès de la mère et des enfants, et du père lors d’une seule entrevue, elle ne pouvait avoir accès qu’à une lecture partielle de la dynamique familiale. Ceci aurait pu l’inciter, dans son écrit, à formuler son avis avec prudence et avec une mise en perspective critique de ses appréciations : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». En conclusion, au vu de la complexité des situations de séparation parentale, comme celle présentée ici, et de l’intervention d’un magistrat, la Commission insiste sur le fait que le psychologue doit s’efforcer de respecter équitablement les intérêts de l’enfant et ceux des parents. Il s’applique à ce que ce principe d’équité soit observé dans ses interventions et ses écrits. Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-15
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Discernement |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Dispositifs d’intervention du psychologue dans le cadre d’un conflit parental : prudence et impartialité
Il existe pour le psychologue différentes manières et divers contextes dans lesquels il exerce son activité. Ainsi, il n’y a pas qu’un seul dispositif lui permettant de légitimer son intervention. À ce titre, l’article 2 délimite sa mission centrale, et l’article 3 précise les champs d’application ainsi que le choix, libre et éclairé, des outils sollicités, dont le principal est l’entretien : Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. » La situation pour laquelle la Commission est ici sollicitée implique deux psychologues qui sont intervenues à différents moments de l’histoire familiale. En effet, pour l’une, il s’agit d’un mandat d’expertise psychologique, pour l’autre, de la psychothérapie d’un enfant. Néanmoins, pour chacune des deux, l’entretien a constitué l’outil principal de leurs investigations, comme en attestent les écrits produits. Quelles que soient les modalités d’exercice, le psychologue est responsable des méthodes qu’il emploie. Il est conscient des limites qu’elles imposent, mais aussi invité à les expliciter aux personnes qui le consultent, comme le rappellent les Principes 3 et 4 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. » En cela, il appartient au psychologue de savoir ce qui relève de ses prérogatives et de ses responsabilités, mais aussi de savoir s’en expliquer. Dans le cas présent, la Commission n’a pas été en mesure de se prononcer sur une possible erreur diagnostique concernant la mère ou sur un manque de discernement clinique de la part de la psychologue qui a reçu la fille du demandeur. Il apparaît cependant que le patronyme de l’enfant a été modifié, en rajoutant le nom de la mère à celui du père. Au vu du livret de famille, cette liberté n’est pas apparue conforme au respect de la personne qui figure au Frontispice du Code : Frontispice « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. » Concernant l’approbation des deux parents, à défaut d’avoir pu obtenir le consentement des deux détenteurs de l’autorité parentale, comme le veut l’article 11, la psychologue aurait pu accepter de recevoir le père, sauf si la fille y était expressément opposée : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » De fait, à la lecture des pièces transmises à la Commission, rien ne permet d’infirmer ou de confirmer que la psychologue n’ait pas recherché son assentiment au cours des six années de suivi. Le bénéfice du doute doit pouvoir lui être laissé à cet égard car un consentement implicite n’est pas de même nature qu’un accord formel. De surcroît, le Principe 2 rappelle le besoin pour le psychologue de savoir s’armer de certaines qualités, comme la prudence et le discernement, à l’épreuve de la réalité clinique qui s’offre à lui : Principe 2 : Compétence « […] Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Ces précautions doivent être accompagnées d’une certaine relativité, aussi bien dans les pratiques que dans les méthodes et les interprétations du psychologue, comme le précisent les articles 23 et 25 : Article 23 : « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques employées. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques. » Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Dans la situation présente, seules les deux psychologues seraient habilitées à répondre de leurs choix et de leurs conclusions respectifs. Concernant l’exercice de l’expertise, aucune normativité n’est, à ce jour, prescrite aux experts mandatés dans un cadre judiciaire, médico-légal ou médico-social. La Commission tient cependant à rappeler, par le biais de l’article 12, combien le respect de la dimension psychique doit prévaloir, même dans ce cadre de contrainte : Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte ou lorsque les capacités de discernement de la personne sont altérées, le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. » Un rapport d’expertise est un document rédigé par un psychologue et faisant suite à un mandat ordonné par une autorité judiciaire. Si le cadre judiciaire supprime la liberté de pouvoir s’opposer à sa diffusion, il faut néanmoins que la personne concernée soit informée de cela. Les éléments reportés dans le rapport doivent, par ailleurs, ne servir qu’à répondre aux questions pour lesquelles le Juge a souhaité avoir un éclairage précis. Tout ceci est inclus dans l’article 17 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. » Pour le demandeur, l’écrit présenté au JAF ne suivrait pas les règles de déontologie. Si la Commission a été sensible à cette observation, elle n’a cependant constaté aucun élément étayant une doléance précise à ce propos. Tout juste peut-elle préciser que le Code stipule qu’il est de la responsabilité du psychologue d’accepter des missions, notamment d’expertise, qui répondent à ses qualifications, comme l’indiquent les articles 3, déjà mentionné, et 5 : Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. » Il est ainsi de la responsabilité du psychologue d’informer au préalable les personnes concernées des modalités de transmission ou de restitution des conclusions de son travail, et d’obtenir leur consentement, comme préconisé à l’article 9 : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Un écrit peut, en effet, avoir des conséquences auprès des personnes mentionnées comme de ses destinataires. La question préalable consiste à cerner les raisons et l’objectif de celui-ci, ce que synthétisent le Principe 6 et l’article 17 déjà cité plus haut : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Dans la situation présente, les écrits rédigés par la seconde psychologue, dénommés « Attestation » par le demandeur, sont pour les uns intitulés « Bilan d’accompagnement psychologique » et, « Compte-rendu psychologique » pour d’autres. Quoiqu’il en soit, ils répondent bien aux caractéristiques préconisées par l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… »
Le demandeur a également transmis une « Attestation de témoin » de cette même psychologue. En l’état, il a été difficile pour la Commission de saisir exactement les raisons qui l’ont poussée à produire un tel document. Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-16
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
Forme et contenu des écrits du psychologue dans un contexte de séparation parentale : rigueur, prudence et impartialité. Au préalable, la Commission souhaite préciser qu’il ne lui appartient pas d’établir des arbitrages ou des jugements sur les situations qui lui sont présentées. Toute personne peut saisir la juridiction de son choix à des fins de protection des individus en société, pour faire reconnaître ce qu’elle estime être un préjudice, ou encore une infraction envers elle-même. Les interventions d’un psychologue sont encadrées par le respect fondamental des droits de la personne, comme le stipule le Principe 1. Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées […] Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu à révéler quoi que ce soit sur lui-même ». Les personnes qui consultent un psychologue, et leurs proches lorsqu’il s’agit de mineurs, ont notamment le droit d’être informées de manière éclairée du cadre qui leur est proposé, tel que l’énonce l’article 9 : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Dans le cadre d’une rencontre avec un enfant mineur, l’article 11 rappelle, d’une part la nécessité de recueillir l’accord de l’enfant, d’autre part le consentement des détenteurs de l’autorité parentale : Article 11 : « L’évaluation, l’observation, ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposées par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Dans la situation présente, le demandeur indique que l’une de ses filles a rencontré une psychologue à l’initiative de leur mère dont il est séparé. Cette dernière aurait vu l’enfant à trois reprises sans n’avoir jamais échangé avec le père, ni de visu ni par téléphone. Selon lui, elle ne souhaiterait pas s’entretenir au téléphone à ce sujet et lui aurait même « raccroché au nez » un jour où il tentait de la joindre. Ce père se dit donc « choqué par le manque flagrant de déontologie » de la psychologue. Même si les entretiens ont été, semble-t-il, à l’initiative de la mère, ce qui est parfaitement licite, la Commission recommande, par souci de rigueur et de discernement, de recevoir les deux détenteurs de l’autorité parentale pour expliquer la spécificité d’une consultation psychologique, comme le précisent l’article 11 déjà cité et le Principe 4 ci-après : Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ». À la suite de ses rencontres avec la mère et la fillette, la psychologue a fourni un écrit dans lequel elle donne des éléments sur ses observations. Elle y écrit qu’il « existerait une rivalité morbide entre la fillette et sa sœur », que la fillette a, semble-t-il donné des indications « de violences physiques et surtout verbales avec chantage affectif chez le père », et mentionne enfin « l’évocation par la fillette d’avoir assisté à des violences conjugales ». La psychologue conclut par « ainsi la fillette et sa sœur doivent être extraites de toute forme de violence, pression ou chantage affectif de la part du père ». Ces propos sont qualifiés par le demandeur comme étant « à charge contre lui ». Ce dernier exprime son étonnement et souhaite savoir dans quelle mesure les « conclusions accablantes » de l’écrit constitueraient « un manque à la déontologie ». Le Principe 3 rappelle qu’un psychologue peut utiliser des méthodes et donner des avis sur des situations auxquelles il a à faire, et ce, en toute autonomie : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Le psychologue peut donc rédiger divers documents tels que ceux dénommés « attestations », « comptes rendus », « courriers » ou bien encore « expertises ». Une attestation, par exemple, a pour but de certifier qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Un compte-rendu, rend compte du travail réalisé lors d’un bilan psychologique, par exemple, et a donc pour objectif de relater des éléments du travail psychologique entrepris. Ces documents, sont, en principe, remis en main propre à la personne qui les demande et portent généralement la mention « pour faire valoir ce que de droit ». Quelle qu’en soit la dénomination, l’écrit d’un psychologue doit répondre aux règles formelles énoncées dans l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… » Dans le cas présent, il apparaît que la psychologue n’a pas contrevenu aux attentes posées par cet article. Ici, apparaissent bien l’identité de la professionnelle, sa qualité de « psychologue clinicienne », l’adresse du lieu où elle exerce, son numéro ADELI, l’ensemble de ces informations encadrant un écrit daté et signé. Toutefois, le document proposé n’a pas de titre et ne mentionne pas d’objectifs spécifiques. La Commission a estimé qu’il était difficile de savoir avec précision à quelles fins répondait la production d’un tel écrit, contrairement à ce qui est stipulé dans le Principe 6 du Code : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». Ici, le contenu de l’écrit soumis à la Commission dépasse le simple cadre de ce qui s’apparenterait à une attestation, car les propos de la psychologue semblent manifestement vouloir faire état de certaines hypothèses et interprétations au sujet de l’enfant et de sa situation, en mettant en avant, notamment, une problématique autour de la relation paternelle. Ces propos faisant suite aux seules observations de la psychologue, et cette dernière n’ayant jamais rencontré le père de la fillette, la Commission considère qu’ils ne sont pas conformes aux recommandations de l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » Le psychologue a conscience de la relativité de ses évaluations et interprétations. Il doit être clair et conscient des limites de ses observations, ainsi que du caractère variable et évolutif du comportement humain. Il ne saurait donc émettre des conclusions qui soient à la fois réductrices de la complexité et de la singularité de la personne, et définitives concernant ses possibilités d’évolution, comme le rappelle l’article 25 :
Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Par ailleurs, le demandeur conteste le fait que cet écrit soit produit devant la justice et que la psychologue, en le rédigeant, « se pense manifestement au-dessus de ses obligations ». Or le Principe 3, déjà cité, indique qu’un psychologue a toute latitude pour formuler un avis sur une situation qu’il a pu examiner. La psychologue pouvait donc réaliser un tel document à la demande d’un des parents. Dans les cas de conflits, quand le psychologue reçoit un des membres du couple et qu’il accepte de rédiger un écrit à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction, en prenant en considération la diffusion potentielle de son texte, comme le rappelle l’article 17. Il se prémunit ainsi d’une quelconque accusation de partialité envers l’un des parents : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». Enfin, les propos avancés dans l’écrit questionnent le respect du secret professionnel rappelé dans l’article 7 : Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » En dépit de la nécessaire prudence dont doit faire preuve le psychologue lorsqu’il émet un avis, il convient de rappeler que ce dernier ne rapporte, dans ses écrits, des éléments d’ordre psychologique concernant son patient que si nécessaire. Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-17
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Intervention du psychologue auprès d’un enfant dans le contexte d’une séparation parentale.
Le document soumis pour avis à la Commission se présente sous la forme d’une « attestation » établie « à la demande de l’intéressée pour faire valoir ce que de droit ». Une certaine confusion sur sa nature est cependant introduite par le choix de la formule « je soussignée …certifie » qui le place entre une attestation et un certificat. Il présente dans son entête quelques-unes des caractéristiques mentionnées à l’article 20 mais souffre de l’absence d’objet et de signature manuscrite : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. (…)» Cette attestation ne précise pas si la « consultation » a été précédée d’autres rencontres avec l’enfant, ni si la mère s’est entretenue, une ou plusieurs fois, avec la psychologue et dans quel contexte. Elle rapporte une parole de l’enfant qui qualifie son père de « méchant » et une scène où il aurait mimé « des scènes de violence » qu’il « a » subies. L’emploi du présent et non du conditionnel indique là un certain manque de prudence qui invite à faire appel au Principe 2 et à l’article 13 : Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. » Le demandeur interroge la Commission sur la validité et sur la rigueur déontologique dudit « certificat », en précisant qu’il n’a pas donné son accord pour cette consultation. Il est très fréquent qu’un seul parent soit présent lors d’un premier entretien. L’autre parent est réputé avoir consenti, sauf s’il manifeste explicitement son désaccord. Si l’article 11 ne mentionne pas la nécessité d’un « accord explicite », il fait néanmoins référence au « consentement » dont le psychologue ne saurait pouvoir se passer : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Dans ces contextes, le psychologue recherche toujours le sens d’une opposition ou d’une absence de l’autre parent, afin d’évaluer la manière de le contacter pour l’intégrer, ou non, à la poursuite de son travail avec l’enfant. Ce préliminaire est particulièrement recommandé dans un contexte potentiellement conflictuel, comme c’est le cas ici. Le psychologue clarifie ainsi le but assigné à la demande qui lui est adressée, notamment quand le parent sollicite une attestation ou tout autre document comme l’évoque le Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Ici, la psychologue semble s’être hâtée de répondre à une demande dont elle ne pouvait ignorer les conséquences judiciaires. Si l’article 19 pouvait l’autoriser à agir de la sorte, au nom de la protection de l’enfance en danger, elle aurait pu user de discernement pour décider de la conduite à tenir et expliciter à l’enfant et à sa mère les conséquences possibles de la transmission de son écrit : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. » Quand le psychologue rédige un écrit, il doit être conscient qu’il engage sa compétence, sa crédibilité et sa responsabilité vis-à-vis du demandeur mais aussi vis-à-vis de tiers qui pourraient en faire usage. L’article 17 vient confirmer cet appel à la prudence : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. » Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-18
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Modalités d’intervention du psychologue dans le contexte d’un conflit conjugal.
Le demandeur n’ayant pas joint la copie du « compte rendu de suivi de trois pages » cité dans son courrier, la Commission n’a pu se prononcer sur l’aspect formel dudit écrit. Elle rappelle que le psychologue est responsable, en toute autonomie, des modalités de son intervention, en vertu du Principe 3 du Code et qu’elle n’est ni habilitée à juger du caractère légal de ce même écrit, ni à se prononcer sur le contexte disciplinaire lié au lieu d’exercice du professionnel « signalé » : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Dès lors, peu d’éléments d’informations sont accessibles, en dehors des déclarations du demandeur, pour accréditer du qualificatif de « contestables » des méthodes qui ont été employées pour entendre l’épouse du demandeur et accepter de lui délivrer un document écrit. Le psychologue construit son intervention en respectant les droits de la personne et en prenant soin de délimiter avec elle l’objectif du travail engagé comme les Principes 1 et 6 le stipulent : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Dans la situation présente, le demandeur cite un bref extrait du compte rendu dans lequel le psychologue aurait invité sa patiente à ne pas « contredire frontalement » son mari dans le but de ne pas « provoquer une exacerbation des symptômes, voire une décompensation ». Ces propos, vécus comme accusatoires par le demandeur, constituent une appréciation de son état psychique qui s’appuie probablement sur les dires de son épouse et, peut-être aussi sur ce que le psychologue avait pu antérieurement percevoir du demandeur. Ils ne constituent pas pour autant une évaluation de sa personnalité, qui n’aurait été recevable qu’après l’avoir entendu en personne. Si le psychologue a pris soin de « retranscrire » la parole de sa patiente pour étayer son avis sur sa relation conjugale, il est resté en accord avec l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. » Consigner les propos de l’épouse, avec son accord, ne constitue pas non plus une atteinte flagrante au secret professionnel, au sens du Principe 1 déjà cité, même si ce choix peut être questionné, eu égard à la manière dont ils ont été exploités dans la procédure. Par ailleurs le fait d’avoir déjà rencontré le couple antérieurement, ou l’avoir « croisé » dans un lieu de culte, n’oblige pas, pour autant, le psychologue à se récuser, car il ne s’agit pas là d’une relation suivie à titre personnel au sens de l’article 18 : Article 18 : « Le psychologue n’engage pas d’intervention ou de traitement impliquant des personnes auxquelles il est personnellement lié. Dans une situation de conflits d’intérêts, le psychologue a l’obligation de se récuser ». Enfin, l’utilisation ultérieure d’un compte rendu de consultation dans une procédure de divorce reste de la seule responsabilité d’une plaignante et de son avocat. Il ne peut que rester circonstancié et daté car le psychologue est conscient du caractère relatif de ses appréciations comme le rappelle l’article 25 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-20
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Aspects déontologiques de l’expertise psychologique dans le contexte d’une séparation. Le cadre d’exercice d’une mission confiée à un psychologue se définit par les fonctions et compétences de ce dernier, comme le stipule l’article 5 : Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. » Dans la situation présente, il est inscrit, sur la page de garde du rapport d’expertise psychologique, le fait que le psychologue a été « commis expert » par l’autorité d’un JAF. L’expertise est une intervention dans un cadre de contrainte qui peut être confiée au psychologue, comme le stipule l’article 3 : Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. » D’une manière générale, le psychologue intervient auprès de personnes pour lesquelles il doit être en mesure de garantir, sans aucune réserve, le respect de leur dimension psychique, comme y invite l’article 2 : Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Dans le cas plus précis où le psychologue intervient dans un cadre de contrainte, il tend à répondre aux questions qui lui sont posées afin d’éclairer les décisions du Juge. Là encore, le psychologue doit s’assurer de respecter chaque personne dans sa dimension psychique comme le préconise l’article 12 du Code : Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte […], le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. » Au-delà de la pluralité des méthodes dont il a la responsabilité, mais aussi de l’obligation de garantir le respect de la dimension psychique des personnes rencontrées, le psychologue doit pouvoir, même dans ce cadre, répondre de la nécessité de respect du but assigné comme le veut le Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Dans le cas présenté, la finalité de la mission attribuée au psychologue est clairement stipulée sur la même page de garde en les termes suivants : « procéder aux expertises psychologiques des enfants » et « à un entretien » avec les parents avec mention de l’identité de chacun. L’exercice d’entretiens d’expertise implique néanmoins que les personnes rencontrées les acceptent, en ayant reçu toutes les informations relatives à la démarche, notamment sur son déroulé, ses finalités et la production finale d’un écrit destiné au magistrat, comme le veut l’article 9 : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » L’écrit soumis à la Commission fait, en effet, état du travail du psychologue mandaté et comprend la restitution de ses expertises et des entretiens. La Commission relève toutefois l’absence d’objectifs clairement énoncés. En cela, elle regrette de ne pas avoir trouvé les questions ayant amené le JAF à missionner le psychologue ce qui, là encore, ne constitue pas une règle intangible. Une contextualisation plus précise de la démarche aurait certainement permis de mieux apprécier dans quelle mesure les éléments restitués par le psychologue dans ce rapport étaient nécessaires ou pas. Cela aurait facilité l’appréciation du respect du secret professionnel, au sens de l’article 7 : Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » C’est en effet sur ce point que le positionnement du psychologue est discuté par la demandeuse qui qualifie son implication de partiale dans le processus d’évaluation ce qui, selon elle, transparait dans l’écrit. La Commission s’est interrogée sur le degré de neutralité d’un psychologue dans un contexte de conflits familiaux. Selon le Principe 2, l’indépendance professionnelle implique de faire preuve en la matière de prudence et d’impartialité. Le psychologue engage sa responsabilité dans les préconisations adressées au magistrat : Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Si les faits attestés par la demandeuse, qu’elle répertorie dans une liste non-exhaustive, sont avérés, alors le contenu du rapport d’expertise psychologique apparaît discutable. La Commission se réfère aux recommandations de l’article 17 qui préconise la plus grande prudence concernant la transmission à un tiers d’éléments psychologiques qui ne concerneraient pas directement le but assigné à l’intervention. Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. » Néanmoins, la Commission s’est étonnée de l’absence d’éléments d’expertise psychologique concernant l’aîné des enfants, aucune mention n’a été apposée permettant de comprendre cette inégalité de traitement. Au cours des entretiens réalisés avec les deux autres enfants rencontrés, le psychologue a eu recours à la passation d’épreuves habituellement utilisées avec des enfants de cet âge, comme l’indique l’article 24 : Article 24 : « Les techniques utilisées par le psychologue à des fins d’évaluation, de diagnostic, d’orientation ou de sélection, doivent avoir été scientifiquement validées et sont actualisées. » De l’ensemble des entretiens, c’est-à-dire autant avec les enfants que les parents, le psychologue a tiré des observations qui devaient lui permettre de répondre aux questions du JAF. Le psychologue a alors été amené à faire des préconisations, et non à poser un diagnostic. Pour autant, la Commission rappelle combien toute observation doit conserver une certaine relativité, au sens de l’article 25 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » Pour se trouver en adéquation avec le Principe 2 et l’article 17, cités plus haut, le psychologue commis en tant qu’expert s’efforce d’être, autant que cela est possible, dans une démarche prudente, notamment quant aux conclusions auxquelles il peut arriver. La restitution d’informations ne peut être considérée comme valide qu’à la condition d’être fidèle aux propos qui ont été tenus par les différentes personnes rencontrées. Là encore, aucun élément ne permet une position critique dans la situation apportée par la demandeuse sur cette question. La Commission rappelle combien l’exercice de l’expertise doit pouvoir se trouver en conformité avec le Principe 1, relatif au respect de la dimension psychique d’une personne : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-23
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Consentement éclairé |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Les écrits du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire impliquant un mineur et but assigné à ses interventions. La Commission a examiné l’écrit de la psychologue. Sur le plan formel, hormis l’objet de l’écrit, les règles précisées à l’article 20 du code de déontologie sont respectées : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Même si l’écrit n’est pas intitulé, il peut, au début, être assimilé à une attestation dans la mesure où la psychologue dit « attester » avoir reçu l’enfant « dans le cadre d’un suivi thérapeutique » et pouvoir dater cette initiative. Mais la Commission a pu constater qu’il prenait par la suite l’allure d’un « rapport » sur l’état « affectif » de l’enfant ainsi que sur le type de relation entretenue avec un père qui « lui a menti ». Enfin, malgré l’absence de mention d’un destinataire, son contenu suggère qu’il s’agisse d’un magistrat. En ce qui concerne le but assigné à son intervention, quels que soient le domaine et les modalités d’exercice du psychologue, ce dernier s’assure d’en définir préalablement les contours. Cela permet de définir l’axe central et le type de travail proposé, permettant ainsi d’en expliciter objectifs, modalités et limites à la(aux) personne(s) concernée(s) afin d’accueillir de leur part un consentement libre et éclairé, comme précisé par l’article 9 : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Or, dans la situation présente, le dispositif psychothérapeutique a été institué en tant que but assigné dès le départ ce qui n’excluait pas, en fonction du contexte, de le redéfinir ultérieurement. Néanmoins, il est curieux que ledit écrit porte sur une situation qui s’est produite plusieurs mois auparavant et non pas dans la période situation actuelle. Son utilité dans cette temporalité est d’autant plus douteuse qu’il est produit cinq jours après l’audition du garçon par la Cour d’Appel. Dans ce sens, comme stipulé à l’article 19, il interroge le maintien de la confidentialité inhérente au dispositif thérapeutique. La levée de cette dernière ne peut s’envisager que dans la situation extrême où une personne est en péril psychique ou physique, contexte qu’un psychologue évalue avec discernement, tout en respectant le secret professionnel comme précisé par l’article 7 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. » Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » Dans le cas du document produit par la psychologue, cette dernière précise qu’elle a été « alertée » par la « situation » de « violence physique et verbale » de la part du père, et verbalisée quelques mois auparavant par son jeune patient. Elle écrit avoir alors « convoqué » le père pour faire un « rappel à la loi ». Or, cela se serait produit il y a plusieurs mois, sans mention que ce contexte perdure actuellement. Si, dans le passé, elle avait estimé qu’il existait un réel danger pour le mineur, elle aurait pu décider d’alerter les autorités compétentes. Or, selon son écrit, ce n’est pas ce qu’elle a fait. Par ailleurs, lorsque le psychologue reçoit les dires d’un consultant ou les difficultés relationnelles que celui-ci exprime vis-à-vis de tiers, il ne peut faire des interprétations ou rendre compte de son évaluation que sur des personnes qu’il a lui-même entendues, comme stipulé à l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. » Outre son souci effectif quant à l’intérêt du garçon, l’écrit de la psychologue suppose qu’il « se sent manipulé par son père » et « a besoin d’un cadre sécurisant ». Elle suggère en filigrane que ce n’est pas auprès de son père qu’il « peut amorcer son processus d’adolescence ». Il aurait été plus prudent d’utiliser, à tout le moins, un conditionnel. Pour finir, la Commission rappelle que la responsabilité professionnelle du psychologue est engagée quant au respect de la personne dans sa dimension psychique. Ceci figure dès le Frontispice même du Code, invitant à faire preuve d’une grande prudence, mesure et impartialité dans toute intervention, comme rappelé par le Principe 2, et en particulier dans le cas de conflits parentaux qui impliquent des mineurs et impactent leur psychisme en devenir : Frontispice : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. » Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence :
Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-06
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Interventions, forme et contenu des écrits du psychologue dans un contexte de conflit judiciaire entre parents d’un mineur. Les interventions d’un psychologue sont orientées par le respect fondamental des droits de la personne, comme le stipule le Principe 1. Les personnes qui consultent un psychologue ont notamment le droit d’être informées de manière éclairée du cadre de la rencontre, comme l’énonce l’article 9 : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue […] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées […] Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu à révéler quoi que ce soit sur lui-même » Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Concernant un enfant mineur, l’article 11 rappelle d’une part, la nécessité de recueillir l’accord de l’enfant, mais également, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale : Article 11 : « L’évaluation, l’observation, ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposées par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » Dans la situation présente, le demandeur indique ne pas avoir été tenu informé de la démarche de son ex-conjointe, quant au suivi de sa fille par une psychologue. Il affirme également que cette psychologue ne l’a pas rencontré et ne lui a jamais demandé son consentement. Selon lui, elle ne « daignerait », par ailleurs, « plus » lui répondre au téléphone depuis quelques temps. Ce père se dit donc « écarté » de toute rencontre avec elle. Au regard du Principe 4 et de l’article 11 cité ci-avant, il était possible, et certainement souhaitable, de recevoir ce père pour lui expliquer la spécificité du cadre de la prise en charge en cours : Principe 4 : Rigueur « Les modes d’intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail ». À la demande adressée à la Commission est joint un document rédigé par la psychologue et transmis à l’ex-conjointe du demandeur. Ce dernier exprime son étonnement à la réception de cet écrit et pose la question de savoir si la professionnelle avait le droit d’affirmer des propos qui peuvent lui être préjudiciables, et ce, sans l’avoir même jamais rencontré. En accord avec le Principe 3 cité ci-dessous, cette psychologue pouvait décider de rédiger un document en exprimant son avis sur la situation mais ne pouvait évaluer la relation de l’enfant avec son père sans l’avoir jamais rencontré comme l’indique l’article 13 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. »
Le psychologue peut, en effet, décider de rédiger divers documents tels que ceux dénommés « attestations », « comptes rendus », « courriers » ou bien encore « expertises ». Une attestation, par exemple, a pour but de certifier qu’un patient a été reçu une ou plusieurs fois, que le suivi continue ou non. Ce type de document est remis en main propre à la personne qui le demande et porte généralement la mention « pour faire valoir ce que de droit ». Quelle qu’en soit la dénomination, l’écrit d’un psychologue doit, par ailleurs, répondre aux règles formelles énoncées dans l’article 20 : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature… » Dans le cas présent, il apparaît que la professionnelle n’a pas contrevenu aux attentes posées par cet article. Ici, apparaissent bien son identité, l’adresse du lieu où elle exerce, l’identification de sa fonction, son numéro ADELI, l’ensemble de ces informations encadrant un écrit daté et signé. Toutefois, le document proposé n’a pas de titre et ne mentionne pas d’objet spécifique. La Commission a estimé qu’il était difficile de savoir avec précision à quelles fins répondait la production d’un tel écrit, contrairement à ce qui est stipulé dans le Principe 6 du Code : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers ». Le demandeur conteste le fait que cet écrit a été produit devant la justice et estime que la psychologue, en le rédigeant, « outrepasse ses fonctions ». Le Principe 3, déjà cité, indique qu’un psychologue a toute latitude pour formuler un avis sur une situation qu’il a pu examiner. La psychologue pouvait donc réaliser un tel document à la demande d’un des parents. Un écrit produit par un psychologue n’est pas qu’un simple document rédigé par un professionnel à la demande de son patient. Il peut avoir des conséquences auprès des personnes mentionnées et aussi de ses destinataires. Les mots ont un poids et, un écrit faisant trace, la question se pose de l’usage que les destinataires en feront, ce que synthétise le Principe 6 déjà énoncé plus haut. Dans les cas de divorces, quand le psychologue reçoit un des membres du couple et qu’il accepte de rédiger un écrit à la demande de celui-ci, il doit veiller à la rigueur de sa rédaction et prendre en considération la diffusion potentielle de son texte, comme le rappelle l’article 17 : Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ». Ainsi, le contenu de l’écrit soumis à la Commission dépasse le simple cadre de ce qui s’apparenterait à une attestation, car la psychologue fait état d’hypothèses et d’interprétations au sujet de l’enfant et de sa situation. En pointant, notamment, une problématique liée à la relation paternelle, basée sur les seules observations de l’enfant avec sa mère et sans jamais avoir rencontré le père, la Commission considère que le document s’apparente à une évaluation non conforme aux recommandations de l’article 13 déjà cité. Pour conclure, les deux parents n’ayant pas été les destinataires conjoints de cet écrit, l’objectif de l’intervention questionne l’impartialité de cette psychologue. Ceci ne coïncide pas avec l’impératif de rigueur énoncé par l’article 25 du Code, dont doivent faire preuve les psychologues en toutes circonstances, en particulier dans le contexte d’un conflit judiciaire entre parents : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ». Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-07
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels) |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Interventions du psychologue auprès d’un mineur dans le contexte d’un divorce conflictuel. Dans les situations de séparation conjugale, il est entendable que l’un des parents souhaite initier un suivi psychologique pour un enfant mineur, en particulier quand celui-ci présente des symptômes ou des troubles perçus comme inquiétants. Ce type de contexte conduit le psychologue à être vigilant dans la détermination de l’objectif de son intervention et son explicitation aux personnes concernées, comme précisé dans les articles 9 et 10 : Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions. » Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. » Ici, le demandeur précise que son consentement n’a pas été explicite. Au début de l’intervention, lorsque son fils avait 3 ans, la psychologue ne l’a pas non plus contacté. Cette dernière précise, pour sa part, que le père était « au courant de la prise en charge » et qu’il ne « s’est jamais manifesté » auprès d’elle, ce qui n’est pas en totale conformité avec l’article 11 qui ne postule aucune modalité particulière pour qu’un parent atteste ou récuse son « consentement » : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l’autorité parentale ou des représentants légaux. » En effet, l’autorité parentale partagée prévoit que le consentement d’un parent est réputé acquis, quand l’autre parent engage une consultation pour leur enfant. Or, dans une situation de séparation conflictuelle, la Commission estime qu’il est important que le psychologue propose de recevoir les deux parents, afin de mieux cerner la dynamique familiale. Il fait ainsi preuve de discernement, d’impartialité et d’équité au sens du Principe 2 en tentant de prévenir son éventuelle instrumentalisation dans le conflit : Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence : (…) de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité éthique de refuser toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Par ailleurs, produire un document écrit à la demande de son consultant ou à la demande d’un tiers, relève de la responsabilité et de l’autonomie du psychologue comme l’énonce le Principe 3 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Ici, le premier écrit de la psychologue se présente comme un compte rendu de consultation. Il a été rédigé au moment où une enquête sociale était mandatée par le JAF pour statuer sur les droits de garde du père. En parallèle, la mère avait déposé plainte contre ce dernier pour agression sexuelle sur leur fils. Ledit écrit met en relation les symptômes du petit garçon avec la reprise des contacts avec son père au domicile des grands-parents paternels, inférant une perturbation psychique en lien avec ce droit de visite. Rien ne précise sur le document s’il a été produit à la demande de la mère « pour faire valoir ce que de droit », comme il est d’usage dans tout document dans lequel le signataire atteste la réalité d’un fait afin qu’il serve de preuve lors d’une procédure judiciaire, par exemple. Le deuxième écrit de la psychologue, rédigé deux mois et demi après le premier, développe de manière très détaillée la même interprétation et implique l’attitude des grands-parents paternels. La Commission tient à souligner que le psychologue ne peut porter des interprétations sur des personnes qu’il n’a pas rencontrées, comme mentionné à l’article 13 : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu lui-même examiner. » Le troisième écrit, rédigé cinq mois après le premier, renforce le contenu des deux premiers. Il manque de discernement et de prudence, en décrivant à nouveau les suspicions de la mère concernant de possibles abus sexuels : son fils serait rentré d’un hébergement chez son père en étant « gercé au niveau de l’anus ». Ledit écrit ne se présente en aucun cas sous la forme d’un signalement à l’autorité judiciaire. Or, si un psychologue estime qu’un enfant est en danger, il ne peut méconnaître les dispositions légales prévues dans ces circonstances, comme le stipule l’article 19 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. » Dans le cas présent, une « Information préoccupante » a déjà été déposée auprès des services départementaux de protection de l’enfance, ainsi qu’un signalement auprès du Parquet des mineurs, les deux classés sans suite. Si la psychologue estimait qu’un danger persistait encore, elle aurait dû effectivement s’appuyer sur l’article sus-cité. Enfin, les trois documents ne respectent pas le cadre formel attendu et rappelé dans l’article 20. Ils ne mentionnent pas l’objet de l’écrit, ni ne renseignent le numéro ADELI de la psychologue : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Pour conclure, la Commission précise qu’il n’est pas dans ses prérogatives de prononcer d’éventuelles sanctions contre cette praticienne. Si, dans ce type de situation, où l’enfant est l’enjeu de problématiques impliquant davantage un ancien couple que des parents, des processus de réparation de préjudice sont souvent engagés, c’est à la Justice qu’il appartient néanmoins de se prononcer sur leur bien-fondé. Le demandeur a vu ses droits de visite et d’hébergement rétablis, plus d’une année après le début des diverses procédures et enquêtes sociales. Cependant, son autorité parentale n’a, à aucun moment, été suspendue. Il lui était donc possible de chercher à rencontrer cette psychologue voire de s’opposer à la poursuite du suivi de son fils chez elle, dès le début de l’intervention, tout en demandant par exemple au JAF d’intervenir, afin de trouver un compromis avec la mère sur le choix d’un lieu plus neutre. Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
Avis CNCDP 2020-08
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Année de la demande : 2020 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : – Autonomie professionnelle |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Aspects déontologiques de l’expertise psychologique dans le contexte d’un divorce. En préambule, il importe à la Commission de préciser qu’aucune normativité n’étant, à ce jour, prescrite aux experts mandatés dans un cadre judiciaire, médico-légal ou médico-social, elle ne peut en rien statuer sur la manière dont une expertise doit être menée par un psychologue, tant sur son maniement que sur son contenu. En revanche, elle se propose de soumettre la demande qui est ici formulée aux attendus du code de déontologie. Ainsi, l’article 3 précise qu’un psychologue peut intervenir dans le cadre d’un tel mandat. Il accepte cette mission lorsqu’il estime en avoir les compétences comme l’article 5 le précise : Article 3 : « Ses interventions en situation individuelle, groupale ou institutionnelle relèvent d’une diversité de pratiques telles que l’accompagnement psychologique, le conseil, l’enseignement de la psychologie, l’évaluation, l’expertise, la formation, la psychothérapie, la recherche, le travail institutionnel. Ses méthodes sont diverses et adaptées à ses objectifs. Son principal outil est l’entretien. » Article 5 : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences. ». Une fois mandaté par un magistrat, le psychologue définit le cadre et l’objectif de son intervention. Le choix des outils et méthodes lui appartient, comme le stipule le Principe 3, et il est de sa responsabilité professionnelle de les porter à la connaissance de chaque personne concernée, comme préconisé dans l’article 9 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie « Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. » Article 9 : « Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités et des limites de son intervention, et des éventuels destinataires de ses conclusions. » À ce titre, le présent rapport d’expertise donne peu d’éléments sur l’information préalable qui a été délivrée à la demandeuse et à son ex-conjoint. Pour ce qui est de sa forme, la Commission remarque l’absence de numéro ADELI et de coordonnées professionnelles de sa signataire. Tous les autres éléments préconisés dans l’article 20 sont présents : Article 20 : « Les documents émanant d’un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l’identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l’objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Les conséquences d’un rapport d’expertise remis à la Justice sont possiblement difficiles pour les personnes concernées. Un cadre contenant est proposé par le premier Principe du Code qui indique le respect des droits fondamentaux de la personne et de son autonomie psychique : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l’intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Or, le document transmis à la Commission contient, comme le souligne la demandeuse, la reproduction quasi-intégrale des propos recueillis auprès des différentes personnes entendues. L’importance de ce verbatim appelle à interroger un défaut de prudence. La psychologue a investigué bien au-delà des questions posées par le magistrat qui portaient essentiellement sur le conflit parental. En allant jusqu’à mentionner des éléments de la vie intime du couple, la question se pose du degré de nécessité du récit détaillé de l’histoire conjugale. L’argumentation psychologique qui accompagne les propos rapportés risquait en effet de parasiter la décision du JAF et rendre potentiellement conflictuel l’exercice de l’autorité parentale conjointe. Leur utilisation dans une procédure judiciaire en diffamation, engagée ultérieurement par le mari à l’encontre de son ex-épouse, alimente l’hypothèse du manque de prudence et de discernement dans cette expertise rappelés au Principe 2 et à l’article 17 : Principe 2 : Compétence « Le psychologue tient sa compétence : […] de sa formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. La transmission à un tiers requiert l’assentiment de l’intéressé ou une information préalable de celui-ci. » De surcroît, si les propos rapportés dans le rapport ont été consignés suite à un enregistrement audio, qui plus est à l’insu du couple parental, alors se pose la question du non-respect de la dimension psychique de chacun. Le cadre de contrainte d’une expertise appelle en effet la pleine adhésion des personnes auditionnées au sens de l’article 12 : Article 12 : « Lorsque l’intervention se déroule dans un cadre de contrainte […], le psychologue s’efforce de réunir les conditions d’une relation respectueuse de la dimension psychique du sujet. » La Commission s’est ainsi interrogée sur la question de l’obligation et de la délimitation du secret professionnel à l’égard de ce qui est confié dans le cadre d’une expertise. En effet, cet exercice n’exonère pas le psychologue de son respect tel que l’énonce le Principe 1 déjà cité et le rappelle l’article 7 : Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » Dans le cadre d’une expertise judiciaire, de par la délimitation du but assigné, le psychologue s’engage à répondre aux seules questions posées par le Juge. Dans la situation présente, la psychologue a engagé sa responsabilité voire sa notoriété dans la manière dont elle a rédigé son rapport. Rien n’indique cependant qu’elle ait manqué de clairvoyance, ni dans son analyse de la situation familiale, ni dans les préconisations finales de son écrit. Néanmoins, il parait opportun de rappeler ici la nécessité pour un psychologue de distinguer d’une part ce qui relève de la stricte confidentialité des éléments recueillis ou compris sur la vie psychique et intime des personnes reçues, et d’autre part la manière dont sont étayées et élaborées, avec mesure et prudence, les hypothèses et conclusions à l’écrit, au sens de l’article 17 déjà cité, et cela pour rester respectueux du Principe 6 : Principe 6 : Respect du but assigné « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. » Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |