Avis CNCDP 2007-08

Année de la demande : 2007

Demandeur :
Psychologue (Secteur Médico-Social)

Contexte :
Questionnement professionnel personnel

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Témoignage en justice

Questions déontologiques associées :

– Secret professionnel (Levée du secret professionnel)
– Compétence professionnelle (Formation (formation initiale, continue, spécialisation))
– Respect de la loi commune
– Mission (Distinction des missions)
– Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
– Traitement équitable des parties
– Respect de la personne

La commission répondra aux questions de la demandeuse en les regroupant en trois points :

  • la  levée du secret professionnel
  • l’intime conviction
  • la distinction des missions

La levée du secret professionnel

 

L’article 13 du Code de Déontologie donne réponse à cette question : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal, et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Conformément aux dispositions de la loi pénale en matière de non assistance à personne en danger, il lui est donc fait obligation de signaler aux autorités judiciaires chargées de l’application de la Loi toute situation qu’il sait mettre en danger l’intégrité des personnes. Dans le cas particulier où ce sont des informations à caractère confidentiel qui lui indiquent des situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou a celle d’un tiers, le psychologue évalue en conscience la conduite à tenir, en tenant compte des prescriptions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en danger. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. »

Or, la loi commune, en la matière, s’énonce dans les  articles 226-13 et 226-14 du Code Pénal :

 

CP Article 226-13
La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

CP Article 226-14
L’article 226-13 n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n’est pas applicable :
1º À celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique. (…)

La Commission estime que, dans cette situation, même si le danger imminent est écarté du fait de la mise sous protection de la personne concernée, un danger potentiel existe toujours.
De plus, conformément au Titre I-1 du Code de Déontologie, concernant le respect des droits des personnes : « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. »

En conséquence, la Commission considère que la psychologue, placée devant une telle situation, peut et même doit lever le secret professionnel.

L’intime conviction

Dans l’audition que sollicite le juge, il appartiendra à la psychologue de discerner ce qui relève de l’analyse psychologique issue d’une position professionnelle, et ce qui relève de l’intime conviction issue d’un témoignage éclairé mais liée par la subjectivité de sa relation à sa patiente. La commission fera référence ici au Titre I-2 du Code de Déontologie : « Le psychologue tient ses compétences de connaissances théoriques régulièrement mises à jour, d’une formation continue et d’une formation à discerner son implication personnelle dans la compréhension d’autrui. »


La distinction des missions

Si le juge sollicite les résultats d’un bilan psychologique, la commission estime que la psychologue est alors confrontée à une mission d’expertise.
Or, la Commission considère que la relation thérapeutique établie par la psychologue avec cette patiente ne lui permet pas d’accepter une telle mission, en référence à l’article 4 du Code : « Il (le psychologue) peut remplir différentes missions qu’il distingue et fait distinguer », d’autant que, comme le précise l’article 9 : « dans les situations d’expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties ».

Toutefois, si un expert est nommé, la commission estime que la psychologue peut lui communiquer, sous réserve de l’accord de la personne concernée, les éléments qu’elle estime utiles à la compréhension de la situation.

 

Avis rendu le 24 mars 2007
Pour la CNCDP
La Présidente
Anne Andronikof

 

Articles du code cités dans l’avis : Titres I-1, I-2, Articles 4, 9, et 13

Avis CNCDP 2011-04

Année de la demande : 2011

Demandeur :
Psychologue (Secteur non précisé)

Contexte :
Questionnement professionnel personnel

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Témoignage en justice

Questions déontologiques associées :

– Confidentialité (Confidentialité du contenu des entretiens/ des échanges)
– Confraternité entre psychologues
– Consentement éclairé
– Discernement
– Écrits psychologiques (Archivage (conservation des documents psychologiques au sein des institutions : dossiers, notes personnelles, etc.))
– Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
– Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
– Respect de la loi commune
– Respect de la personne
– Responsabilité professionnelle
– Secret professionnel (Contenu des entretiens / des séances de groupe)
– Transmission de données psychologiques (Compte rendu à un service administratif)

Au regard de la situation évoquée, la commission de déontologie fera porter sa réflexion sur les deux points suivants :

  • Le secret professionnel et le psychologue : respect du secret, situations particulières de dilemme éthique, nature des informations à caractère secret et confidentiel, levée du secret,
  • L’archivage et la conservation des écrits professionnels.

En préambule, attentive à la demande inhabituelle qui lui est faite par un psychologue, au nom d’un confrère en difficulté, la commission souhaite souligner l’importance de la solidarité entre pairs si justement rappelée par l’article 21 :
Article 21 – Le psychologue soutient ses collègues dans l’exercice de leur profession et dans l’application et la défense du présent Code. Il répond favorablement à leurs demandes de conseil et les aide dans les situations difficiles, notamment en contribuant à la résolution des problèmes déontologiques.
Cette coopération  entre psychologues est réaffirmée, précisément à propos de la conduite à tenir en matière de secret professionnel, dans la dernière phrase de l’article 13 auquel nous reviendrons plus loin :
Article 13 : […] Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés.

Le secret professionnel et le psychologue : respect du secret, situations particulières de dilemme éthique, nature des informations à caractère secret et confidentiel, levée du secret

Le secret professionnel est l’obligation faite à un professionnel de ne pas divulguer les secrets dont il est dépositaire de la part d’une personne (patient, client, résident, bénéficiaire, usager…) auprès de qui il intervient, ainsi que ce qu’il a appris sur cette personne à l’occasion de son intervention.

  • Que dit le code de déontologie des psychologues du secret professionnel ? Que faire en cas de dilemme éthique ?

Quand un texte de loi impose aux membres d’une profession (par exemple professionnels de santé) l’obligation du secret professionnel, ceux-ci peuvent en être déliés dans des cas très précis, mais en dehors de ces cas, la violation du secret expose à une sanction pénale (article 226-13 du code pénal).
Il n’existe pas de texte de loi soumettant le psychologue exerçant en libéral au secret professionnel. En revanche plusieurs évidences sont ici à rappeler qui indiscutablement sur le plan déontologique (mais très largement aussi sur le plan juridique) conduisent à considérer le psychologue comme un professionnel à qui s’impose l’obligation du secret professionnel.
Rappelons d’abord que le Code en son article 7 énonce la nécessaire adéquation des missions acceptées par le psychologue au code lui-même mais également à la loi commune.
Article 7 : Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses compétences, sa technique, ses fonctions, et qui ne contreviennent ni aux dispositions du présent Code, ni aux dispositions légales en vigueur.
Il est évident que le principe affirmé par la loi, selon lequel toute personne a droit au respect de sa vie privée et de son intimité (article 9 du Code Civil et article 226-1 du Code Pénal) s’applique sans réserve au client ou au patient du psychologue. Ce principe est d’ailleurs exposé dès le Titre 1 du Code et explicitement rapporté au secret professionnel qui en est le garant.
Principe I-1, Respect des droits de la personne : […] Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même.
L’article 13 va plus loin en rapprochant ces deux impératifs que sont le respect de la loi commune et le respect des droits de la personne et envisage le dilemme éthique qui peut se présenter au psychologue quand le risque d’atteinte à l’intégrité physique de la personne qui consulte ou d’un tiers est révélé sous le sceau de la confidence.

Article 13 : Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal, et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. […] Dans le cas particulier où ce sont des informations à caractère confidentiel qui lui indiquent des situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue en conscience la conduite à tenir, en tenant compte des prescriptions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en danger. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés.
Il est rappelé que face à ce type de dilemme impliquant le secret professionnel, le psychologue « évalue en conscience la conduite à tenir ». Cette précision a son importance car cette évaluation en conscience, le psychologue ne peut la faire sans référence à sa mission fondamentale telle qu’elle est établie par l’article 3 du Code.
Article 3 – La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur la composante psychique des individus considérés isolément ou collectivement.
Il est incontestable qu’une activité professionnelle qui « porte sur la composante psychique des individus », est une activité qui oblige à pénétrer dans l’intimité des personnes et exige leur confiance. Une telle activité, exercée, de surcroit, par le titulaire d’un titre protégé qui se réfère à un code professionnel, fait de ce dernier ce qu’il est convenu d’appeler un « confident nécessaire ». Cette qualité de « confident nécessaire » s’applique de façon difficilement contestable à un psychologue praticien assurant des consultations et des suivis à finalité thérapeutique. 

  • Que sont des informations à caractère secret et confidentiel ?

Un secret (du latin secretus et secernare, « mettre à part »), est une chose que l’on ne doit dire ou montrer à personne et qui doit rester cachée. Il peut concerner des aspects très divers de la vie privée, familiale, professionnelle, sociale… L’expression « information à caractère secret » est utilisée dans le code pénal pour désigner une information liée à l’intimité d’une personne ou à sa vie privée.
L’adjectif confidentiel (du latin confidens : confiant), caractérise ce que se dit en confidence, ce qui doit rester secret. L’information confidentielle est donc proche de l’information à caractère secret à la nuance près qu’elle met davantage l’accent sur la notion de confiance, si précieuse pour tous les professionnels appelés à recevoir des « confidences » dans le cadre de leur exercice.

 

 L’information que M. « Untel a été suivi de telle à telle date » est donc une information à caractère plutôt confidentiel. S’agissant de la santé des personnes, il existe en outre un consensus pour admettre que le secret professionnel est un impératif.

  • Quelles circonstances permettent la levée du secret ?
  • L’article 13, déjà cité, est à cet égard très clair :

Article 13 : […] Dans le cas particulier où ce sont des informations à caractère confidentiel qui lui indiquent des situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue en conscience la conduite à tenir, en tenant compte des prescriptions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en danger. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés.
C’est donc uniquement dans le cadre de situations pouvant porter atteinte à l’intégrité d’une ou de personne(s) que le psychologue doit évaluer s’il peut révéler des informations à caractère secret et être ainsi délié du secret professionnel.
Le code de déontologie des psychologues n’ayant cependant pas actuellement de valeur légale, le psychologue doit en toute circonstance et prioritairement se référer à la loi commune qui prévaut, en substance les articles 226-13, 226-14 et 434-3 du code pénal, ainsi que l’article 109 du code de procédure pénale.
Concernant la levée du secret, l’article 226-14 énonce les cas de figure dérogatoires où l’article 226-13 ne s’applique pas, la révélation du secret étant alors autorisée. Ce sont notamment les cas où :

  • La loi impose ou autorise la révélation du secret (cela renvoie à d’autres articles du code pénal),
  • Des privations ou sévices sont infligés à un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique.

Toutefois, les personnes astreintes au secret dans l’article 226-13 sont exceptées de cette obligation de dénoncer.
Dans la situation évoquée, compte-tenu du fait que la personne n’est pas en mesure de se protéger en raison de son incapacité et qu’il existe une suspicion de maltraitance par un proche, il semble bien qu’il s’agisse d’un cas de figure dérogatoire à l’obligation du secret.
D’un autre coté,  les renseignements détenus par le psychologue sont anciens, le suivi de la personne est achevé et elle n’est pas en mesure d’exprimer son consentement à la divulgation d’informations la concernant, comme le recommande l’article 9 :
Article 9 – Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent […].
Le psychologue est donc confronté à un dilemme éthique. Face à celui-ci, en fonction de la connaissance qu’il a de la situation, c’est « en conscience » et en gardant à l’esprit l’intérêt supérieur de la personne, que le psychologue devra se positionner et déterminer s’il peut ou non, révéler d’éventuelles informations à caractère secret, répondant ainsi à la demande de la justice (cf. point a)). Le cas particulier de la réquisition par un procureur de la République répond à un autre article du code de procédure pénale (article 109) mais ne modifie pas l’obligation de secret pour le psychologue ; s’il peut être tenu de comparaître et de prêter serment, il a la possibilité d’arguer de son obligation de secret professionnel.

L’archivage et la conservation des écrits professionnels.

Un psychologue exerçant en libéral peut constituer des dossiers patients/clients dans lesquels il verse ses observations, bilans, comptes rendus… et notes personnelles. Il s’agit d’un usage mais pas d’une obligation, comme cela pourrait l’être en tant qu’agent d’un service public. In fine, il reste responsable de l’organisation et conservation de ses dossiers, que ce soit sous forme papier ou informatique.
Principe I-3, Responsabilité : Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Il s’attache à ce que ses interventions se conforment aux règles du présent Code. […] Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels.
Dans le cas où il produit des écrits, il doit respecter un certain nombre de règles énoncées par les articles 14 et 20 :
Article 14 – Les documents émanant d’un psychologue (attestation. bilan, certificat, courrier, rapport, etc.) portent son nom, l’identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire. Le psychologue n’accepte pas que d’autres que lui-même modifient, signent ou annulent les documents relevant de son activité professionnelle. Il n’accepte pas que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite, et il fait respecter la confidentialité de son courrier.
Article 20 – Le psychologue connaît les dispositions légales et réglementaires issues de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. En conséquence, il recueille, traite, classe, archive et conserve les informations et données afférentes à son activité selon les dispositions en vigueur. […].
Le code n’indique cependant aucun délai de conservation des documents archivés par le psychologue exerçant en libéral. Dans la mesure où ces écrits ne sont utiles qu’à lui seul, il appartient au psychologue de décider, en fonction des informations collectées, de la problématique du patient, du contexte de la consultation, de la durée du suivi, de la possibilité de consultations ultérieures après une période d’arrêt, etc., du délai durant lequel il va les conserver.
Une durée de conservation minimale de dix ans, calquée sur le délai de prescription en matière de responsabilité civile professionnelle (1) , est conseillée. Pour un psychologue exerçant sur le long terme auprès d’une clientèle stable, elle peut même s’étendre à la carrière entière.

Avis rendu le 23 mai 2011
Pour la CNCDP
La Présidente
Marie-Claude GUETTE-MARTY

 

Articles du code cités dans l’avis : Principes I-1, I-3 ; Articles 3, 7, 9, 13, 14, 20, 21.

 

(1) Délai de prescription de dix ans à compter de la consolidation du dommage, loi du 4 mars 2002.

Avis CNCDP 2000-06

Année de la demande : 2000

Demandeur :
Psychologue (Secteur non précisé)

Contexte :
Questionnement professionnel personnel

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Témoignage en justice

Questions déontologiques associées :

– Responsabilité professionnelle
– Respect de la loi commune
– Secret professionnel (Témoignage en justice (témoignage en audience))
– Discernement
– Confraternité entre psychologues

La CNCDP ignore bien évidemment la nature des informations dont est porteuse la psychologue.
Dans ses principes généraux, le code rappelle que « Outre les responsabilités définies par la loi commune, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Il s’attache à ce que ses interventions se conforment aux règles du présent Code ».
– En premier lieu, le psychologue est tenu de se conformer à la loi commune.
La CNCDP n’a pas compétence pour conseiller la psychologue sur ce plan juridique mais elle lui rappelle cependant le texte de loi concernant le « Secret professionnel » paru dans le nouveau code pénal et auquel elle peut se référer.
– En second lieu, le code de déontologie ne peut apporter ici de réponse simple. Celui-ci rappelle judicieusement, avant l’énoncé des Principes Généraux, que « La complexité des situations psychologiques s’oppose à la simple application systématique de règles pratiques. Le respect des règles du présent Code de Déontologie repose sur une réflexion éthique et une capacité de discernement, dans l’observance des grands principes « énoncés dans le code.
La psychologue est donc seule responsable de ses « actions et avis professionnels » (Titre I-1), pris avec toute la prudence nécessaire, mais il lui est cependant possible de demander le soutien de collègues tenus de répondre favorablement car « Le psychologue soutient ses collègues dans l’exercice de leur profession et dans l’application et la défense du présent Code. Il répond favorablement à leurs demandes de conseil et les aide dans les situations difficiles, notamment en contribuant à la résolution des problèmes déontologiques « (article 21).

Conclusion

Dans cette situation extrême, compte tenu des dispositions prévues par la loi et par le Code de déontologie, le psychologue se retrouve au coeur d’une réflexion éthique personnelle, confronté à ce qu’il sait et ce qu’il estime devoir dire.

Fait à Paris le 16 juin 2000. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

Avis CNCDP 2000-10

Année de la demande : 2000

Demandeur :
Psychologue (Secteur Judiciaire)

Contexte :
Questionnement professionnel personnel

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Témoignage en justice

Questions déontologiques associées :

– Respect de la loi commune
– Consentement éclairé
– Information sur la démarche professionnelle
– Transmission de données psychologiques (Compte rendu aux parents)
– Responsabilité professionnelle
– Respect du but assigné
– Signalement
– Confraternité entre psychologues

En conformité avec l’Article 13 « le titre (du psychologue) ne le dispense pas de la Loi commune », la psychologue, qui a pris la responsabilité d’un écrit au juge des enfants, qui contenait « des éléments d’analyse de la potentialité du mineur et de sa famille », ne peut se soustraire, sauf raison de santé et/ou d’incapacité, à la demande qui lui est faite par une Cour d’Assises des mineurs d’avoir à témoigner en personne sur le contenu de ce qu’elle a indiqué dans cet écrit.
La psychologue qui est amenée par sa profession à être dépositaire d’informations à caractère secret n’est nullement tenue pour autant de révéler ces informations dans son témoignage, qui ne devrait porter que sur son avis initial.
Cette psychologue ne pourrait être accusée de non-respect du secret professionnel dans ces circonstances, même si elle révélait des éléments nouveaux qui lui seraient apparus, par exemple au cours de rencontres ultérieures du mineur et de sa famille dans le cadre d’une mesure d’aide éducative, pourvu que ceux-ci soient en rapport avec le but visé par son témoignage, soit l’attestation du contenu de son avis initial.
Ceci est d’autant plus vrai qu’elle aura pris soin, comme le lui prescrit l’article 9 du Code de Déontologie de « s’assurer du consentement » de ceux qui ont participé à son évaluation et de les « informer des modalités, des objectifs et des limites de son intervention ». Elle les aura donc informés de la mission qui lui était assignée, du but qu’elle visait, et du fait que le cadre dans lequel elle les rencontrait lui faisait obligation de rendre un avis par écrit au juge des enfants. Les personnes concernées auront eu, comme le leur garantit l’article 12 du Code de Déontologie « un compte rendu compréhensible des évaluations les concernant, quels qu’en soient les destinataires. »
Dans le cadre du respect du Titre I-6 du Code de Déontologie, elle aura eu le souci de l’utilisation possible de son écrit destiné au juge : « Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers ».
Comme le lui indique l’article 12 « le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs de manière à préserver le secret professionnel. (…) Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers (…) elles ne comportent les éléments qui les fondent que si nécessaire ».
La psychologue conserve la possibilité de faire un signalement, comme le lui indique l’Article 13 du Code de Déontologie, si cela lui permet d’agir « Conformément aux dispositions de la loi pénale en matière de non-assistance à personne en danger [qui lui] fait obligation de signaler aux autorités judiciaires chargées de l’application de la Loi toute situation qu’il sait mettre en danger l’intégrité des personnes ».
Elle peut cependant s’appuyer sur cet article du Code pour s’abstenir de révéler des informations de nature confidentielle « Dans le cas particulier où ce sont des informations à caractère confidentiel qui lui indiquent des situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui consulte ou d’un tiers, le psychologue évalue en conscience la conduite à tenir, en tenant compte des prescriptions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en danger ».
Enfin l’Article 13 lui indique qu’elle peut « éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».

Conclusion

La responsabilité professionnelle de la psychologue mise en jeu dans son intervention se prolonge dans un témoignage qui lui fait obligation, non pas de révéler des faits à caractère secret, mais d’attester elle-même auprès du tribunal de la véracité et du sérieux de son avis.

Fait à Paris, le 16 juin 2000. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente