La FFPP est, depuis quelques années maintenant, régulièrement invitée à participer à des groupes de travail à la HAS sur des domaines divers et variés en vue d’élaboration de recommandations. Citons pour exemple la prévention du risque suicidaire chez l’enfant et l’adolescent ou la question des conséquences psychologiques d’atteintes somatiques comme l’obésité. Une nouvelle recommandation visant le dépistage et le traitement du TDA-H a récemment été publiée. La FFPP, qui milite pour la pluralité des approches, n’a pas, cette fois-ci, été sollicitée.
Sans entrer dans les débats épistémologiques et étiologiques concernant l’émergence de tels troubles, nous souhaitons poser quelques menues questions de réflexion, à la lecture des dernières recommandations sur le TDA-H :
- Si la personne atteinte de TDA-H présente un risque d’aggravation des conséquences psychologiques, scolaires, familiales et sociales, pourquoi en exclure la compréhension du vécu de l’enfant y compris du vécu de son trouble et de l’impact qu’il peut avoir sur le développement de sa personnalité, sur ses relations sociales et affectives ? …bref, c’est une évaluation qui va bien au-delà d’une investigation des symptômes cités dans le DSM-5.
- Si l’on peut considérer que le TDA-H relève d’un diagnostic clinique et médical, et qu’il convient, dans la dynamique de développement de l’enfant, d’être particulièrement attentif aux comorbidités et autres diagnostics différentiels (troubles de l’attachement de l’enfance, vécus traumatiques ou problématiques de violences et d’abus, troubles anxieux – en somme des troubles impactant le développement), pourquoi laisser si peu d’espace au psychologue, qui est compétent pour effectuer l’évaluation globale de l’enfant et porte son intérêt et son attention aux liens précoces parents-enfants ?
- Quid de la prise en compte des besoins de la personne et/ou de sa famille à pouvoir bénéficier d’un espace de parole, de compréhension et de l’impact du trouble sur son développement, sa qualité de vie, ses projets… que ce soit à titre préventif, curatif ou palliatif ? Qu’en est-il de la prise en considération de son point de vue, celui des parents, en termes de choix thérapeutiques ?
- Dans la mesure où l’un des objectifs de l’entretien (point 2.4.1 des recommandations) est d’évaluer le développement de l’enfant notammment dans ses dimensions affective, psychologique et cognitive, pourquoi nier la pertinence du bilan psychologique au sens large et global (comprenant une évaluation psychométrique, des fonctions exécutives, des capacités attentionnelles et une évaluation de l’économie psychique de l’enfant) ? Tout au plus est-il fait mention du bilan neuropsychologique, qui n’est désormais plus nécessaire pour poser le diagnostic, mais qui pourrait objectiver les difficultés à l’œuvre dans le TDA-H.
Ces recommandations nous semblent éloignées de la réalité du terrain : si elles préconisent un diagnostic et une prise en charge par des professionnels formés au TDA-H, dans les faits ce sont bien les psychologues, qui, dans leurs lieux de soins, prennent le temps d’élaborer l’anamnèse, observent l’enfant, se préoccupent de son parcours de vie et permettent aux médecins qualifiés de poser leur diagnostic. Ce sont également les psychologues, entre autres professions non médicales, qui en majorité, proposent les programmes d’entrainements aux habilités parentales préconisés par ces recommandations. De plus, les psychologues apportent une contribution essentielle au repérage diagnostique par leurs bilans, très régulièrement demandés par les médecins pour l’établissement du diagnostic ou pour appuyer une hypothèse diagnostique (lorsque la pénurie médicale ne leur permet pas de rencontrer les enfants).
Réduire un enfant, son vécu, à une liste de symptômes à rééduquer est un parti-pris que nous observons, las, depuis quelques années. Les psychologues accompagnent des personnes qui sont atteintes de troubles ou de maladies non nécessairement d’origine psychologique ; nous prenons en charge dès lors les incidences de ceux-ci sur la vie psychique de la personne. Ainsi donc, à la lecture de cette recommandation, nous pouvons nous demander, pourquoi l’évaluation et l’accompagnement psychologique, de plus en plus préconisés en vue d’une prise en soin plus globale ne sont plus envisagés dès lors qu’il s’agit d’un enfant porteur de TND ?